1939

Première partie de La Bureaucratisation du Monde, 1939.

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Le collectivisme bureaucratique

Bruno Rizzi

 


1

Nature de l'Etat soviétique

C'était en 1917, et vers la fin d'octobre (calendrier russe) se passait un événement politique d'une grande portée, dont la date se gravait en caractère ineffaçable sur le livre de l'histoire. Le prolétariat de Saint-Pétersbourg et de Moscou, guidé par le parti bolchevique, s'emparait du pouvoir. Deux chefs se sont élevés comme géants dans ce grand événement historique : Lénine, l'incomparable maître du mouvement révolutionnaire, et Trotski, l'âme et le génie de l'insurrection prolétaire.

Le monde en fureur arrêta, pendant un instant, son oeuvre sauvage de destruction et il promena son regard incrédule et étonné sur les plaines infinies de Russie. Sur les neiges se détachait un drapeau rouge, orné d'une faucille et d'un marteau. Mais, cet instant de perplexité fini, les hommes se plantèrent à nouveau les yeux en face, comme pour dire : « On verra bien, après », et ils recommencèrent leur lutte d'anéantissement.

En attendant, un souffle d'espérance passait sur les masses appauvries et décimées. Au milieu de tout cet obscurantisme, de toute cette fureur, une lumière avait jaille, très haut ; cela avait bien une signification pour tous ces pauvres hères : « C'est d'Orient qu'arrive la lumière » ; voilà le nouveau Verbe. Pour la seconde fois dans l'histoire, les masses des abrutis, des indifférents, ont levé la tête de leur besogne et ont scruté l'horizon, en flairant le vent comme des animaux de proie sortant de leur tanière. Il leur sembla que c'était du bon vent et que le moment favorable était arrivé. Cent quarante ans auparavant, ces masses avaient été réveillées par la canonnade de Valmy et même les montagnards, armés de piques et de haches, avaient descendu leurs vallées reculées. Mais arrivés au débouché des vallées, ils ont vu monter, au loin, dans la plaine, de petits nuages blancs ; puis une pluie de feu s'abattit sur leurs rangs : c'était les canons du Tiers-Etats qui les accueillaient. Les bons montagnards s'étaient trompés, ils firent demi-tour et regagnèrent leur vallée d'où ils étaient partis avec un espoir séculaire soudainement verdi. Les montagnards ont agi en hommes sages, ils ont compris que leur temps n'était pas encore arrivé et ils se sont tapis à nouveau dans leurs montagnes, pour une nouvelle et longue attente.

Cette fois les montagnards ne se sont plus arrêtés là où les vallées débouchent dans la plaine ; ils n'ont plus rencontré le feu de barrage de l'artillerie bourgeoise, mais ils se sont répandus en maîtres par les champs des seigneurs. L'Etat des ouvriers et des paysans était proclamé ; des tours du Kremlin, le signal de la révolution se répandait par vagues et les gardes rouges bivouaquaient dans les cours du palais d'Ivan le Terrible.

Le peuple, des couches les plus misérables, réveillé de son assoupissement séculaire, quitta ses masures, étala ses haillons dans les rues principales des grandes villes et y apporta la psychose propre de la veille d'une révolution.

Peu s'en est fallu que cette marée montante, durant trois ou quatre ans, ne brisât les digues puissantes du capitalisme ; puis les eaux refluèrent en gargouillant. De temps à autre, l'eau avait, pour ainsi dire, des sursauts ; c'étaient des vagues, provenant de loin comme celles que produit le passage d'un paquebot, des vagues ne provenant pas des remous profonds de la mer. Alors, ou bien la force potentielle de cette marée montante révolutionnaire a été mal employée, ou bien cette force n'a pas été mise en oeuvre. En effet, les techniciens de la révolution, là où ils ont su transformer cette force potentielle en énergie, l'ont ensuite retrouvée, cette force, à sec, isolée, impuissante, car le niveau des eaux avait baissé tout autour. L'opportunisme des partis prolétariens d'Occident isola la révolution russe, comme une oasis dans le désert, de sorte qu'il ne fut plus question de socialisme, c'est-à-dire d'économie prolétarienne internationale. Cependant il ne faut même pas parler de capitalisme pour ce qui est de la nature de l'Etat dit soviétique. Et alors, de quoi s'agit-il ? Voilà la question.

La Révolution russe date de plus de vingt ans et il est bien étrange que personne ne soit appliqué à l'étude des résultats sociaux de ce grand événement historique. L'U.R.S.S. fournit des sujets à discussions, des commentaires, des chroniques ; ses partisans et ses adversaires en parlent uniquement sous le point de vue politique, mais ils ont toujours négligé le point de vue social. Pourtant, après vingt ans, nous ne croyons pas qu'on puisse encore considérer la révolution russe dans une période de transition et de transformation. Elle doit bien avoir obtenu des résultats positifs, acquis désormais, fixés dans une cristallisation sociale.

D'aucuns ont vu, dans la révolution russe, « L'Empire du travail forcé », ou bien : « La Révolution trahie ! », d'autres l'ont qualifiée de : « Triomphe du Fascisme » et d'autres de : « Pays du grand mensonge ». L'un pousse des soupirs en pleurant le : « Destin d'une Révolution » ; il y en a aussi d'autres qui ont fait : « Le Bilan du Communisme ». Des écrivains de toute gradation politique, depuis les communistes aux fascistes, en passant par les partis du centre, ont écrit des oeuvres d'un vrai mérite, soit pour les argumentations, soit pour la documentation. Des hommes d'étude se sont intéressés au sujet et ils se sont rendus sur la place faire leurs observations directes. Des ouvriers français, allemands, américains ont accouru, enthousiastes, au pays où l'on devait réaliser leurs espoirs sociaux. Ils en sont revenus le coeur gonflé de tristesse, l'âme empoisonnée et ils nous ont laissé des documentations objectives, pratiques, fort intéressantes sur la vie, le travail et la liberté au pays des Soviets.

Toute cette énorme masse de publications ne traite pas du tout de la cristallisation sociale de l'U.R.S.S., moins encore elle nous offre une synthèse. Sans doute çà et là pointent des allusions n'ayant pas un véritable intérêt direct ; c'est plutôt un fruit naturel, dont la polémique en fut l'occasion, que le résultat systématique d'une recherche sociologique. Trotski, lui-même, que nous considérons le plus profond connaisseur des conditions actuelles et de l'évolution de l'Etat soviétique, avoue d'avoir employé neuf paragraphes dans la tentative faite pour donner une définition de cet Etat. Ce qui nous manque jusqu'à présent, c'est une vue d'ensemble panoramique, une synthèse, une représentation cristallisée de ce qu'est l'U.R.S.S. du point de vue social.

Nous-mêmes, il y a deux ans, dans notre modeste ouvrage Où va l'U.R.S.S.? , n'avons réussi à donner aucune réponse. Le point d'interrogation était là précisément pour demander ce que nous-mêmes demandions ; mais si nous n'avons pas réussi à donner une réponse, nous avons, du moins, posé la question. En 1938, notre esprit a cessé de se tourmenter, car nous étions fixés. Ce qui arrivait dans le champ social des autres pays confirmait ce que nous avions fini par considérer comme acquis dans le domaine social de l'Etat soviétique.

Etant donné que le monde est désormais réduit à une seule forme de civilisation, la capitaliste, il s'ensuit que la transformation sociale d'un Etat quelconque présente un extrême intérêt pour le reste de notre planète, puisque c'est dans une transformation hâtive et localisée que le monde peut voir l'image réfléchie de sa propre forme sociale future.

On en a dit de toutes couleurs sur l'U.R.S.S. La presse à gages et les orateurs à la pièce ont artificieusement obscurci le problème au lieu de le rendre plus clair. On a dit les plus grandes balourdises et, aussi, on a fait preuve de la plus grande lâcheté.

Le phénomène social, en réalité, était même difficile à comprendre, surtout par tous ces journalistes visitant la Russie et qui savent bien peu ou rien du tout de Marx, de Lénine et de leurs théories. Le phénomène social en formation eut d'abord, par surcroît, une direction communiste ; puis l'arrêt de la révolution prolétarienne dans le monde produisit une dégénération, laquelle en ces dernières années a fixé ses formes dans l'ordre social. Aujourd'hui, la construction sociale de l'Etat soviétique a pris des lignes nettes, presque complètes. Du moins, nous les reconnaissons, ces lignes, comme telles, même si les spécialistes du problème insistent sur une thèse différente. Ces spécialistes, réduits à un petit nombre, on les doit rechercher dans les groupes des révolutionnaires qui ont abandonné la Troisième Internationale, la retenant désormais passée définitivement, et depuis longtemps, dans un champ tout à fait opportuniste. Ces spécialistes sont aussi arrivés à la question de la nature de l'Etat soviétique seulement en conséquence de diatribes intérieures à leurs fractions politiques, sur la tactique et la stratégie de la révolution prolétarienne. Ils ne se doutaient même pas qu'il y aurait la possibilité d'une cristallisation sociale, placée entre le capitalisme et le socialisme ; mais dans le feu de leurs polémiques le problème de cette cristallisation s'est posé catégoriquement et il maintient ces divergences doctrinales qui sont la base de l'impuissance politique de ces spécialistes.

Qu'est-ce que aujourd'hui l'U.R.S.S. ? D'abord nous serons tout exprès imprécis dans le diagnostic de cette société, c'est ensuite que nous passerons aux précisions. Avant tout nous voulons fixer seulement ce qui a été unanimement admis. Certes, il ne s'agit pas d'un Etat démocratique, mais bien d'un Etat autoritaire. Son économie n'est pas capitaliste ; elle n'est pas fondée sur la propriété privée, mais elle est fondée sur la propriété collective des moyens de production. De Citrine à Trotski et de Roosevelt à Mussolini, on a admis, d'une manière générique, que l'économie soviétique n'est pas socialiste. Le seul Staline est d'un avis différent, et pour cause ; par conséquent nous n'en ferons pas grand cas. Les écrivains, par dizaines, lui ont fait ravaler son socialisme et sa Constitution « la plus démocratique du monde ». Lui, Staline, ne bronche pas et naturellement il interdit ces publications dans le pays de la « vie heureuse » et le plus « démocratique du monde ». c'est, sans doute, une autre caractéristique documentée par Trotski, Citrine, Victor Serge, Ciliga et par une foule d'écrivains des plus différentes nationalités et théories politiques, que celle-ci : en aucun pays capitaliste ou fasciste, le prolétariat ne se trouve dans de tristes conditions pareilles à celles du prolétariat de la Russie des Soviets. Il n'y existe pas de liberté de parole, de réunion et de presse. La délation est très fréquente et l'Etat est surtout policier. Tous ces écrivains sont d'accord en ceci : l'exploitation de l'homme existe encore dans le pays de la « vie heureuse », cette exploitation devient concrète dans cette fameuse plus-value, que Messieurs les capitaliste s soutiraient aux travailleurs. (Les divergences paraissent seulement quand il s'agit d'individualiser les accapareurs.) Un autre côté caractéristique, et qui ne doit pas être négligé, c'est que les manifestations de l'Etat ne sont que de la réclame grandiose, théâtrale, comme dans les Etats totalitaires occidentaux, de même que la vénération, vraie ou feinte, pour le Chef élevé presque à la divinité, y est égale et, peut-être, plus grande. La hiérarchie y jouit d'un grand crédit et le servilisme est poussé jusqu'à la dernière limite. La population vit dans une ambiance de peur comme si les murs pouvaient écouter et parler ; elle a un visage pour le public autre que celui qu'elle a en son particulier.

Ces données admises en général, et complétées de nos différenciations, la physionomie politique et sociale de l'Etat soviétique en ressortit bien définie et c'est cette physionomie que nous nous proposons d'expliquer au lecteur.

Le but principal de la révolution d'Octobre, c'était de servir de levier à la révolution d'Occident. Cependant, en même temps, on a pris des dispositions pour une politique économique socialiste. Fondamentalement on abolit la propriété privée du sol et des grandes entreprises industrielles. La direction économique de cette propriété passa des mains de la classe bourgeoise battue, à celle du prolétariat triomphant.

Une transformation sociale dans l'U.R.S.S. devait partir des conditions économiques qui n'étaient certainement pas des plus gaies ; en effet, le pays était foncièrement constitué de laboureurs et d'illettrés, son industrie était de beaucoup inférieure aux nécessités d'une économie d'avant-garde.

Si les Bolcheviks, dès qu'ils se sont emparés du pouvoir, se sont tout de suite servis de la radio pour solliciter les divers prolétariats à suivre leur exemple, c'est qu'ils comprenaient que la nécessité s'imposait de greffer sur la Révolution russe les nations d'Occident développées du point de vue de la technique et ayant une classe prolétarienne vaste et cultivée. Dans le cas contraire, cette Révolution était fatalement destinée à la débâcle sur le terrain économico-social même si avec les armes elle réussissait à résister, d'une manière héroïque, aux assauts du vieux monde.

Le prolétariat allemand se présentait comme un allié naturel de la révolution bolchevique. Sa bourgeoisie, sortant de la guerre défaite et brisée, lui offrait le pouvoir presque sans coup férir. Sauf les émeutes spartakistes, le sacrifice de Charles Liebkneckt et de Rosa Luxemburg, le prolétariat allemand passa, sans honneur, de défaite en défaite. En 1923, on lui a offert, une fois encore, le pouvoir, mais ce prolétariat déserta le camp, et sans lutter il abandonna ce camp même aux bandes hitlériennes. Est-ce la faute aux chefs ? A la Troisième Internationale ? Non, c'est la faute à tous en bloc, prolétariat allemand y compris, trop froid, attaché à l'ordre et d'un naturel bien peu révolutionnaire. Cinquante ans auparavant, les ouvriers de Paris avaient proclamé la Commune, après la débâcle de la bourgeoisie française de 1870, et cent mille d'entre eux, qui s'étaient battus seulement avec un mince espoir et dans une ambiance économique prématurée, se laissèrent abattre stoïquement sur les remparts de Paris. Messieurs les marxistes, qui s'occupent seulement de l'économie et font uniquement de la politique par des statistiques, peuvent bien se mettre en colère, mais nous affirmons que l'esprit peu révolutionnaire du prolétariat allemand y est pour beaucoup dans cette défaite de la classe ouvrière européenne et mondiale. De même l'esprit nettement révolutionnaire du prolétariat russe y est pour beaucoup dans la victoire d'Octobre. Le peuple allemand n'a jamais fait une révolution ; dans son développement politique il a toujours suivi les autres nations, mais en retard d'un siècle au moins. La France, au contraire, a toujours donné tout son sang pour tout le monde.

Ce sont bien les conditions de l'économie, les véritables sine qua non auxquelles la possibilité d'une transformation sociale est attachée. Mais une fois que ces conditions existent et qu'elles ont mûri, le succès de la Révolution n'est qu'une question d'esprit révolutionnaire, par rapport à ceux qui doivent se battre, et de capacité révolutionnaire par rapport aux chefs. Que Messieurs les marxistes expliquent, s'ils en sont capables, la défaite du prolétariat européen d'après le matérialisme historique, tel que celui-ci est entendu par les orthodoxes ! Est-ce que l'économie allemande n'était pas ultra-mûre pour le passage ?

Pour en finir et pour ne pas répéter ce qui a été dit de mille manières, nous affirmons qu'à la suite de la défaite de la révolution prolétarienne allemande et européenne, la dictature du prolétariat russe se trouvait isolée dans un monde capitaliste et hostile. Le reflux de la vague révolutionnaire était général, de cette vague qui, immédiatement après la guerre, avait effrayé la bourgeoisie. Il s'ensuivit que pour tout observateur de bon sens les perspectives révolutionnaires étaient renvoyées aux calendes grecques. En attendant, le capitalisme reprenait haleine et augmentait la production jusqu'à 1929 et cela surtout était dû aux travaux de réparation dans les zones ravagées par la guerre, et à la reconstitution des stocks.

La Révolution russe était à l'alternative : ou bien vivoter dans l'attente de la révolution prolétarienne de l'Occident d'Europe, ou bien s'accorder avec le monde extérieur et changer par conséquent de politique intérieure. C'est la seconde solution qu'on a choisie ; Staline en fut d'abord l'inspirateur et puis il en fut l'exécuteur impitoyable. Ce changement radical de politique, il fallait naturellement le cacher, du moins dans un aspect extérieur, soit au prolétariat russe, soit au prolétariat de toutes les nations. Ce ne fut pas une affaire très difficile, puisque depuis près de cent ans les travailleurs sont systématiquement dupés par les « rouges » de tous les partis, et de toutes les nuances, qui ont paru sur la scène politique. Le prolétariat russe et le prolétariat d'autres nations ont essuyé aussi cette énorme mystification et ils n'ont donné que trop peu de signes de colère contre leurs chefs, de véritables traîtres. On dirait que ces prolétariats en ont pris l'habitude et, de plus, qu'ils se sont endurcis à la mystification.

Lénine mort, il fallait bien un successeur ; c'était Trotski, la figure la plus digne autant du point de vue moral qu'intellectuel. Sa droiture révolutionnaire et son génie auraient certainement défendu très bien le premier et le seul Etat prolétarien du monde. Mais Trotski fut mis au rancart, il fut ostracisé et boycotté d'une manière unanime par les épigones de la révolution. Ceux qui connaissent un peu les partis socialistes et communistes ne s'étonnent pas du tout d'un phénomène de ce genre-là.

Trotski s'élevait comme un géant dans l'entourage de Lénine, alors on s'avisa bien de le neutraliser, de sorte que l'on mettait de côté un gros obstacle, qui aurait gêné la campagne nationale et internationale de bourrage des crânes. La réalité est encore celle-ci : la vraie dictature, ce fut celle du parti bolchevique et non pas celle du prolétariat, une dictature que l'on concentra dans les cellules et non dans les soviets. Il arriva ainsi que le parti bolchevique, le seul qui n'avait pas trahi les travailleurs avant la révolution, les trahit dès qu'il eut remporté la victoire, c'est-à-dire quand il croyait qu'il n'y aurait plus de dangers.

Les théoriciens de la dictature sur le prolétariat, qui concevaient, pour ainsi dire, le parti bolchevique comme un guide dans un régime démocratique de soviets, en effet, ils l'ont conçu comme le monopoliseur de la direction sociale prolétarienne. Ces théoriciens ont prêté le flanc à une dégénération bureaucratique qu'un concours de circonstances avait beaucoup facilitée.

Les hommes jouissant de la confiance du prolétariat l'ont dépossédé, ainsi que l'ont dépossédé ceux qui avaient conduit ce prolétariat à l'assaut et à la victoire et, surtout, l'ont dépossédé ceux qui forment la grande masse de parvenus.

Un parti politique ne peut pas prétendre à s'ériger en dictateur, avec un programme social énorme, demandant la participation et le contrôle de tous les travailleurs. La seule garantie c'était la classe prolétarienne, avec tout le pouvoir aux Soviets. Divers écrivains ont raconté, d'une manière large, tout ce qui est arrivé depuis la mort de Lénine, mais ce qui intéresse dans notre ouvrage, c'est de fixer les résultats atteints. Les fonctionnaires de l'Etat et du parti bolchevique, en socialisant la terre et en industrialisant le pays, ont de plus en plus sapé le pouvoir des travailleurs et ils ont fini par avoir le monopole de l'Etat. Dans cette oeuvre, ils ont dû se lier avec les techniciens, dont ils ne pouvaient pas se passer ; ainsi on réalisait en Russie la première grande soudure dans le procès de formation de la nouvelle classe dirigeante. La campagne stakhanoviste en est une expression et, en même temps, elle est aussi une nouvelle méthode pour aiguillonner la masse des travailleurs afin d'en obtenir un plus grand rendement. D'autres soudures suivirent avec les flagorneurs du Régime, avec l'achat des hauts postes dans l'armée et dans la bureaucratie para-étatique.

Nous en sommes ainsi à un point où la direction économique et politique est monopolisée par la bureaucratie et la nouvelle Constitution a sanctionné cela. Dans cette bureaucratie il n'y a qu'une répartition de travail, lequel, dans son ensemble, a pour but le maintien de la prédominance politique et des privilèges économiques. Les bureaucrates, avec leurs familles, forment à peu près une masse de 15 millions d'habitants. Il y en a assez pour former une classe, et puisque Trotski nous assure que les 40 % de la production sont happés par la bureaucratie, nous pouvons dire que cette classe est aussi privilégiée !

Elle est toute-puissante, cette classe, car elle a en main les leviers économiques, que sauvegarde un Etat policier dressé tout exprès. Elle fixe, comme bon lui semble, les salaires et les prix de vente au public avec des majorations sur les prix de revient telles que les « sangsues » bourgeoises d'autrefois nous apparaissent comme « d'honnêtes commerçants ». Les quelques données que nous avons nous permettent d'affirmer que les majorations sur les prix de revient des produits de première nécessité sont deux ou trois fois supérieures aux majorations dont on use dans les honnis pays capitalistes.

Citrine nous en donne une documentation incontestable. Il arrive parfois que les bureaucrates achètent du blé aux paysans, à un vil prix, et puis ils le revendent aux ouvriers à un prix majoré de dix fois. Le plan économique est naturellement une affaire qui ressort de la bureaucratie et les placements suivent logiquement les voies les plus profitables aux intérêts de la nouvelle classe. La propre presse soviétique documente les conditions misérables des maisons où habitent les ouvriers, à qui on réserve, en moyenne, cinq mètres carrés d'habitation. Eh bien ! au lieu de bâtir de nouvelles maisons ouvrières, dont on a une grande nécessité, et seulement de celles-ci, on pense, par exemple, à la construction de la « Maison des Soviets », haute de 360 mètres, puisque en réalité ce n'est pas là la Maison des Soviets, mais celle de la bureaucratie. Si l'on demande de justifier cette mauvaise administration de l'argent public, le bureaucrate répond toujours que les ouvriers n'ont avancé aucune objection, comme s'il était paisiblement permis aux travailleurs de l'U.R.S.S. de donner leur avis et surtout de s'opposer aux désirs de leurs maîtres. Parmi les bureaucrates (fonctionnaires, techniciens, policiers, officiers, journalistes, écrivains, gros bonnets des syndicats, enfin tout le parti communiste en bloc) une solidarité s'est établie, de sorte que les fautes sont mises au compte des travailleurs, liés comme des esclaves à la machine économique de l'Etat, une machine que les bureaucrates, par comble de dérision, qualifient d'organe de la classe prolétarienne.

Si les fonctionnaires administrent, les techniciens représentent aussi ce qu'on appelle les hommes de confiance. La police est chargée de sauvegarder la nouvelle propriété et de maintenir la conduite des citoyens sur la ligne politique que les hauts hiérarques ont fixée. Des journalistes et des écrivains sont chargés de tromper « scientifiquement » le gros public. Les mandarins syndicaux sont devenus de véritables fonctionnaires, placés au beau milieu des travailleurs pour en sonder les humeurs et pour les duper, ainsi qu'on l'a fait, et qu'on le fait toujours, dans toutes les organisations ouvrières, jaunes ou rouges, de tous les pays capitalistes. Entre la bureaucratie syndicale soviétique et celle américaine, anglaise ou française, il n'y a pas beaucoup de différences, quant au but à atteindre. Il y a, au contraire, une différence substantielle, car, tandis que la bureaucratie syndicale des pays capitalistes est au service de la bourgeoisie, dans l'Etat soviétique cette bureaucratie est au service d'un Etat bureaucratique et, partant, elle est au service d'elle-m6me.

Le parti communiste russe est devenu la proie des bureaucrates et dans son sein les travailleurs ne sont presque plus présents. Ce parti n'est autre chose que le chien tenant en ordre les moutons ; Staline, qui vient après, en est le « grand berger », son bâton sur l'épaule et sa besace en bandoulière. Si quelque mouton sort des rangs, le chien aboie et Staline lâche un coup de bâton. Le troupeau en prend acte, redoute toujours plus le chien et adresse au « grand berger » ses bêlements plaintifs.

Le prolétariat n'a que le droit de travailler dans ces entreprises, dont la propriété lui est encore accordée, d'une manière dérisoire ; mais il n'a pas la moindre fonction dirigeante. Il peut seulement suer sang et eau, car il est aiguillonné par des systèmes, n'ayant rien de socialiste, mais qui sont par surcroît pires que les systèmes en vogue dans les pays capitalistes, jamais assez honnis.

Cette esquisse n'est pas une invention à nous, mais elle n'est que la conclusion tirée des relations de ces « spécialistes » de la question, avec qui nous discuterons plus loin. On voit bien, d'après cette esquisse, que le socialisme n'y est pour rien dans cette société. Tout le monde est d'accord sur ce point hors, bien entendu, Staline et la bureaucratie soviétique.

Voici le grand argument de Tritski et Cie et de toute la gradation des sectes révolutionnaires anti-Troisième Internationale : la propriété des moyens de production en résulte socialisée, et l'économie en est planifiée.

Selon Trotski, malgré tout le reste, l'Etat soviétique demeure ouvrier et la dictature du prolétariat est encore en vigueur ! Nous traiterons plus loin cette question, maintenant nous voulons seulement déduire, à l'aide du bon sens, la nature de l'Etat soviétique, puis nous passerons à l'examen des dispositions que l'on qualifie de « scientifiques ».

A notre sens une autre classe dirigeante, la bureaucratie, est sortie de la révolution d'Octobre et de son recul, tandis que la bourgeoisie est expédiée et, par conséquent, n'a aucune possibilité de retour.

La possession de l'Etat donne à la bureaucratie la possession de tous les biens meubles et immeubles qui, tout en étant socialisés, n'appartiennent pas moins in toto à la nouvelle classe dirigeante. Cela va sans dire que la nouvelle classe se garde bien de déclarer officiellement qu'elle jouit de cette possession, mais, en effet, elle a, en ses mains, tous les leviers économiques et elle fait garder sa propriété par la Guépèou et par les baïonnettes de l'armée « purifiée ». Toute entreprise a son corps de Guépéou qui monte la garde, mais, dans de grandes entreprises, il y a même un soldat de l'armée régulière qui monte la garde, baïonnette au canon. Il contrôle ceux qui entrent, examine les documents et il suit pas à pas le visiteur, même s'il s'agit d'un personnage, tel le trade-unioniste Walter Citrine, et envers qui on devrait avoir des attentions.

L'Etat soviétique, plutôt que de se socialiser, se bureaucratise ; voire, au lieu de disparaître lentement dans une société sans classes, il se gonfle démesurément. Quinze millions d'individus se sont déjà collés au tronc de l'Etat et ils en sucent la sève. On exploite, en bloc, la classe prolétarienne conformément à la transformation de la propriété. La classe bureaucratique exploite la prolétarienne et lui fixe le standard, auquel cette classe doit conformer sa manière de vivre, par les salaires et par les prix de vente des marchandises des magasins de l'Etat. La nouvelle classe dominante a acheté, en bloc, le prolétariat. Il ne reste même plus aux travailleurs la liberté d'offrir leur « force-travail » aux divers entrepreneurs : c'est la bureaucratie la monopolisatrice, c'est elle qui a perfectionné le système d'exploitation. Les prolétaires russes sont tombés de fièvre en haut mal.

Cette forme nouvelle de la société résout, d'un point de vue social, l'insoutenable antagonisme qui rendait la société capitaliste incapable de tout progrès. Dans la société capitaliste, la forme de production est collective depuis longtemps, car tout le monde prend part, d'une manière directe ou indirecte, à la production de n'importe quelle marchandise. Mais la propriété des marchandises est individuelle, cela en conséquence précisément du maintien de la propriété. En socialisant la propriété et en la mettant effectivement sous la direction d'une classe, agissant comme un complexe harmonique, on fait disparaître l'antagonisme existant dans le système de production de la société capitaliste, remplacé par un nouveau système. A ses débuts ce système exploite les travailleurs d'une manière féroce, tout comme le capitalisme avait fait auparavant. A mesure que le système se renforce et qu'il se perfectionne, la production augmente et alors il se peut que la classe dirigeante ait la possibilité de distribuer une ration plus abondante à ses exploités. Dans une ambiance internationale, et normale, le développement de la production sur des bases collectivistes, même en laissant la direction à la bureaucratie, devrait être certain, puisque on éliminerait ou, du moins, on réduirait de beaucoup les énormes dépenses pour les armements qu'aujourd'hui on fait partout. Les armements vont toujours bon train et on ne fait que transformer les Etats en organismes foncièrement militaires. Cet énorme gaspillage de travail peut bien neutraliser, et la rendre négative, l'impulsion que la production reçoit incontestablement à la suite de la collectivisation de la propriété et de l'organisation éc onomique d'après un plan préétabli.

Ce nouveau système social se présente dans le développement de l'histoire de l'humanité, comme un phénomène parasitaire. Le pouvoir aurait dû logiquement passer de la bourgeoisie au prolétariat, mais cela n'est pas arrivé à cause, évidemment, de l'immaturité politique du prolétariat. En effet on passe à une direction sociale qui n'est ni bourgeoise ni prolétarienne. Le personnage du bourgeois capitaliste est devenu superflu, dans le phénomène de la grande production, et il est automatiquement écarté. L'ancien fonctionnaire, le rond-de-cuir de la bourgeoisie, prend un aspect juridique en s'alliant à la bureaucratie syndicale et à celle de l'Etat totalitaire : une nouvelle classe monte à l'horizon. Le prochain avenir seulement pourra nous dire si cette nouvelle classe, pointant partout dans le monde, est à même d'aplanir d'abord toutes les divergences qu'a laissées l'impérialisme et, ensuite, d'augmenter le volume de la production en employant la nouvelle organisation économique et politique. On verra aussi si cette classe est à même d'améliorer les conditions de vie des masses ; c'est là qu'elle donnera la preuve de sa « virtuosité ».

Les symptômes politiques concordent avec la naissante bureaucratisation du monde. Munich n'est qu'une première coagulation de la conscience bureaucratique. Les capitalistes et les représentants des nouveaux régimes, après s'être réciproquement poussés jusqu'au bord de l'abîme, se sont soudainement mis d'accord ; certes ils ont été éperonnés par le pressentiment du prochain devenir social. Les vieux impérialismes, le français, l'anglais et l'américain, se rendent compte qu'il est inutile et impossible de maintenir leur hégémonie dans un monde qui, s'il veut survivre, ne peut plus être impérialiste et qui se transforme, d'une manière bureaucratique, à vue d'oeil.

Les vieilles démocraties jouent le rôle d'une politique antifasciste, pour ne pas réveiller le chat qui dort. Les prolétaires, il faut les tenir tranquilles et, en attendant, la transformation sociale survient en cachette dans leurs pays. En même temps, et à tout moment, les vieilles démocraties donnent de l'antifascisme à manger aux classes ouvrières. C'est bien leur affaire, à ces démocraties, que l'Espagne soit devenue, en attendant, une véritable boucherie des prolétaires de toutes nations ; cela afin d'apaiser les ardeurs révolutionnaires des travailleurs et de débiter les produits de leur industrie lourde. En Chine, les prolétaires sont poussés vers une politique antijaponaise et cela arrive précisément sous la direction du fameux Tchang Kaï-Chek, celui qui a encore les mains souillées du sang de la fine fleur des prolétaires chinois. Cela va sans dire que les travailleurs gobent tout, cette fois aussi, et ils vont à la queue leu leu, sans rien savoir, presque résignés. Peu à peu les travailleurs de France, d'Angleterre et d'Amérique perdront leur qualité de citoyens, ils ne seront devenus que les « sujets » d'un régime bureaucratique, qui nationalisera la propriété et prendra beaucoup d'autres mesures à l'empreinte « socialiste ». Ce régime ne se nommerait pas fascisme ni national-socialisme, il aurait certainement un autre nom, mais les bases en seraient toujours les mêmes, c'est-à-dire : la propriété collectivisée aux mains de l'Etat, ayant une bureaucratie comme classe dirigeante ; l'organisation collective et planifiée de la production, enfin l'exploitation du travailleur passerait du domaine de l'individu à celui de la classe.

A ce point le marxiste Trotski criera à tue-tête que, non seulement les conditions de distribution, mais celles aussi de production ne sont pas socialistes, à l'encontre de ce qu'il nous révèle au sujet de la Russie ; ensuite il passera plus loin faire de la propagande révolutionnaire contre la bureaucratie de tout le monde !

L'affermissement de cette bureaucratie représente, selon ses conceptions, « une possibilité historique et non un fait accompli ». Donc nous devons attendre que le fait soit accompli pour donner à Trotski la manière d'en déduire son analyse ! Ensuite il faudra s'adresser au prolétariat, se trouvant déjà sous la tutelle des gouvernements bureaucratiques, alors imaginez-vous le résultat !

Ce sera bien scientifique et marxiste cent pour cent que l'examen de Trotski, mais cet examen viendra tard quand il n'y aura plus aucune possibilité ! Il pourra même convaincre les dirigeants bureaucratiques qui, pour toute réponse, lui montreront le mot fasciste : je m'en f……

Le fait accompli existe en Russie et il faut l'approfondir. Ce fait est en train de s'accomplir, et il est aussi visible en Italie qu'en Allemagne. Les premiers indices de ce fait pointent partout, même dans les pays des grandes démocraties.

Il restait encore une carte à jouer à Trotski, à lui précisément, mais nous sommes persuadés qu'il n'a aucune envie de la jeter. Sa grande figure décline lentement dans un ciel gris, et en même temps le souvenir d'une journée ensoleillée pâlit, effacé par le crépuscule qui monte. Joffre, avant de se suicider, lui avait écrit une lettre et il lui avait recommandé de ne pas craindre l'isolement, à condition de maintenir intacte la ligne léniniste. Il nous semble que Trotski a suivi ce conseil au pied de la lettre, il ne l'a certainement pas suivi à la manière de Lénine. Au moment de la scission du parti social-démocratique russe, quand on jeta Plekhanov par la fenêtre, Lénine pria plusieurs fois Trotski de rester avec lui. Il n'y réussit pas ; mais quand, en 1917, Léon Trotski retourna à Saint-Pétersburg et qu'il reconnut s'être trompé, alors Lénine l'accueillit dans les rangs bolcheviques, car il avait compris qu'une faute politique n'est pas une trahison. Trotski, au contraire, a coupé toute communication avec ceux qui n'ont pas sa manière de penser à lui. Il a dressé à son école des jeunes gens qui suivent « la ligne » d'après ses propres systèmes. Le Danton de la révolution d'Octobre ne se doute pas du tout qu'il pourrait se tromper. Il est trop sûr de lui-même. Voilà qui est bien jusqu'à un certain point ; mais c'est là un véritable malheur quand le raisonnement est fondé sur des moyens polémiques douteux. Cela signifie qu'on n'a pas assez de confiance dans ses forces. Cela devrait aussi inciter à prendre en considération les raisons d'autrui et à reconnaître ses fautes sans crainte, car toute autre solution amènera à des résul tats bien pires.

A notre sens, l'U.R.S.S. représente un nouveau type de société, dirigée par une classe sociale nouvelle : voilà notre conclusion. La propriété, collectivisée, appartient effectivement à cette classe qui a installé un nouveau - et supérieur - système de production. L'exploitation passe du domaine de l'individu à celui de la classe.

Autant de luttes politiques, se déroulant en U.R.S.S. depuis 1923, autant de batailles que la nouvelle classe en formation a livrées au prolétariat ; qu'importe si à leur début ces luttes n'ont pas eu un but bien déterminé. Le massacre de la Vieille Garde léniniste, et de tous ceux qui pouvaient donner de l'ombrage à la bureaucratie, qui fait les délices de l'Union Soviétique depuis la mort de Kirov, n'est que la guerre civile nécessaire à la nouvelle classe pour affermir son pouvoir. Il ne s'agit pas d'un signe de faiblesse, mais bien d'une démonstration de force de cette classe.

Depuis longtemps l'U.R.S.S. a abandonné toute velléité révolutionnaire et est tombée aux pieds de la bourgeoisie franco-anglaise. Les capitalistes sont bien persuadés qu'en Russie il n'existe aujourd'hui qu'une apparence de la révolution et du socialisme à l'intention des nigauds, voilà pourquoi ont-ils invité, et accepté, l'Union Soviétique même dans leur sanctuaire de Genève. Chez eux, ces capitalistes ne font que protester contre les menées révolutionnaires du Komintern, mais ils le font seulement pour mieux duper les prolétaires. Ce qui a de l'importance, ce sont les faits nous disant que désormais, et depuis pas mal d'années, l'U.R.S.S. a été accrochée au train bourgeois des capitalismes. En effet, Paris, Londres et New York ont manifestement reconnu un Etat exploiteur et oppresseur des travailleurs dans la soi-disant République Soviétique.

Malgré cette réelle situation politique et sociale du pays de Staline, Léon Trotski et ses disciples prétendent que l'U.R.S.S. représente encore un Etat ouvrier avec un régime de dictature prolétarienne. Eux, et ceux qui suivent ses courants d'idées ne souscrivant pas à la politique de la Troisième Internationale, sont les seuls s'intéressant, dans leurs discussions, à la nature de l'Etat soviétique, n'importe s'ils le font d'une manière indirecte. Nous polémiquerons précisément avec Trotski et ses disciples, car c'est à ce point que nous avons fixé, d'une manière définitive, notre jugement sur la nature sociale actuelle de la Réublique Soviétique.


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