1919

Source : numéro 6 du Bulletin communiste (première année), 22 avril 1920, sous le titre « Le programme des spartakistes » avec l'introduction suivante : « Le Comité Central du Parti communiste allemand (K. P. D.), ancien groupe Spartacus, a fait voter à la Conférence d'Heidelberg (octobre 1919), les thèses que voici : ». Corrections de la MIA à l'aide du texte original.

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Thèses sur les principes et la tactique communistes

K. P. D.

1919


  1. La Révolution, née de l'exploitation économique du prolétariat par le capitalisme et de son oppression politique par la bourgeoisie, qui veut maintenir ses privilèges d'exploitation a une double tâche : Suppression de l'oppression politique et suppression de l'exploitation économique.

  2. La substitution de la production socialiste à l'exploitation capitaliste a pour condition la suppression de la puissance politique de la bourgeoisie et son remplacement par la dictature du prolétariat.

  3. Dans tous les stades de la révolution qui précèdent la prise du pouvoir par le prolétariat, la révolution est une lutte politique des masses prolétariennes pour la prise du pouvoir politique.

    Cette lutte sera menée par tous les moyens politiques et économiques. Le Parti communiste allemand (K. P. D.) sait que cette lutte ne sera victorieuse que par l'emploi des plus grands moyens politiques (grèves générales, démonstrations de masses, insurrections).

    Le K. P. D. ne peut donc renoncer en principe à aucun moyen politique qui sert de préparation à ces grandes luttes.

    La participation aux élections, au Parlement, aux Conseils de villes, aux Conseils d'usines légalement reconnus, etc., peut être aussi considérée comme un de ces moyens.

    Mais comme les élections ne sont que des moyens préparatoires de la lutte révolutionnaire, on peut renoncer à l'emploi de ce moyen dans des situation politiques spéciales, en particulier lorsque l'emploi du moyen parlementaire est rendu momentanément ou définitivement superflu par les actions révolutionnaires en cours et décisives. Le K. P. D. repousse donc d'un côté la conception syndicaliste qui déclare superflue et nuisible l'action politique, d'un autre côté la conception du Parti indépendant1, qui croit que les conquêtes révolutionnaires peuvent être introduites au moyen de décisions parlementaires ou de pourparlers avec la bourgeoisie.

  4. Déjà, avant la prise du pouvoir, on doit accorder la plus grande importance à l'achèvement de l'organisation soviétique existante et à la création de nouvelles organisations.

    A ce sujet, il faut comprendre que les Soviets et l'organisation des Conseils ne peuvent être créés ni maintenus par des statuts, des règlements électoraux, etc.

    Leur existence est due seulement à la volonté et à l'action révolutionnaire des masses ; ils sont l'expression idéologique et organique de la volonté du prolétariat à l'égard du pouvoir, comme les Parlements sont l'expression de la bourgeoisie.

    Les Conseils d'ouvriers sont donc aussi les porteurs de l'action révolutionnaire des masses. Les membres du K. P. D. doivent se constituer en fraction au sein des Conseils d'ouvriers, et chercher, par des paroles appropriées, à élever les Soviets à la hauteur de leur tâche révolutionnaire et à obtenir la direction des Soviets et des masses ouvrières.

  5. La révolution, qui ne se fait pas d'un seul coup, mais qui est l'opiniâtre lutte d'une classe opprimée depuis des milliers d'années, et par conséquent non pleinement consciente de ses devoirs et de sa force, est soumise au flux et au reflux. Elle change ses moyens d'après la situation ; elle attaque le capitalisme tantôt du côté politique, tantôt du côté économique, tantôt des deux côtés. Le K. P. D. lutte contre l'opinion qu'une révolution économique est indépendante d'une révolution politique.

    Les moyens de lutte économiques sont particulièrement importants, parce qu'ils ouvrent mieux les yeux du prolétariat sur les causes spéciales de sa misère économique et politique. La valeur de ces moyens de lutte croît d'autant plus que grandit, dans le prolétariat l'idée que ces moyens de luttes économiques servent le but politique de la révolution.

    C'est une tâche du parti politique d'assurer au prolétariat le libre emploi de ce moyen économique, entravé par une bureaucratie syndicale réactionnaire, où c'est nécessaire, même au prix de la destruction de l'organisation syndicale et de la création de nouvelles formes d'organisation.

    La conception qu'on pourrait obtenir des actions de masses grâce à une forme d'organisation spéciale, que la révolution est donc une question de forme d'organisation, est repoussée comme un retour aux utopies petites bourgeoises.

  6. L'organisation économique est celle dans laquelle se rassemblent les grandes masses. Une grande partie de la masse qui mène la lutte révolutionnaire s'y trouve. Le parti politique, par contre, est appelé à diriger la lutte révolutionnaire des masses. Dans le K. P. D. se rassemblent les éléments les plus avancés et les plus conscients du prolétariat qui sont appelés à marcher à l'avant-garde des luttes révolutionnaires.

    L'intérêt de l'unité, de l'éducation intellectuelle et de l'accord de cette avant-garde l'oblige à s'unir dans un parti politique.

    L'opinion syndicaliste que cette union des prolétaires les plus conscients dans un parti n'est pas nécessaire, que le parti doit disparaître devant les organisations économiques du prolétariat, ou qu'il doit se fondre en elles, que le parti doit abandonner sa direction des actions révolutionnaires aux organisations d'usines et qu'il doit se limiter à la propagande, est contre-révolutionnaire, parce qu'elle veut remplacer les vues claires de l'élite de la classe ouvrière par la poussée chaotique de la masse en révolte. Le parti ne peut être prêt à cette tâche que s'il est fortement centralisé dans l'époque révolutionnaire. Le fédéralisme, dans de tels moments, n'est qu'une forme cachée de négation et de dissolution du parti parce que le fédéralisme paralyse en réalité le parti. L'organisation économique comme l'organisation politique du prolétariat réclame aussi la plus forte centralisation. Le fédéralisme dans les organisations économiques rend impossible les actions unifiées des ouvriers. Le K. P. D. repousse tout fédéralisme.

  7. Les membres du K. P. D. qui ne partagent pas ces conceptions sur l'essence, l'organisation et l'action du parti doivent sortir du parti.

Note

1 Il s'agit de l'USPD, Parti social-démocrate indépendant d'Allemagne, qui occupait une position « centriste » entre la social-démocratie (SPD) et le parti communiste (KPD).


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