1936

Source: Fondation Andreu Nin. Traduit de l'espagnol par nos soins. Article paru dans La Batalla, 23 septembre 1936, nº 45.

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Pourquoi les syndicats de la FOUS entrent-ils à l'UGT ?

Andreu Nin

 

23 septembre 1936


MIA: Pourquoi les syndicats de la FOUS entrent-ils à l'UGT ? (A. Nin)

Cela a certainement déclenché une certaine surprise que, deux mois et demi après sa fondation, la Fédération Ouvrière d'Unité Syndicale (FOUS [1] ), qui disposait d'une force réelle dans toute la Catalogne, décide d'entrer à l'UGT. Cela signifie t-il qu'après la conférence du 2 mai où nous décidions de grouper tous les syndicats autonomes nous serions arrivé à la conclusion que nos positions étaient erronées et que, par conséquent, il fallait renoncer à l'objectif visant à constituer une seule centrale syndicale ? Non, aujourd'hui comme hier nous sommes persuadés de la justesse de ces positions. Aujourd'hui comme hier nous estimons profondément nuisible aux intérêts de la classe ouvrière leur division en deux centrales syndicales et considérons qu'il ne doit exister qu'une seule organisation. Il ne s'agit pas donc pas d'une rectification de principe mais d'un changement tactique.

Rappelons d'abord que, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire, la FOUS n'était pas une nouvelle centrale, mais un organisme destiné à coordonner et à centraliser les efforts de tous les syndicats aspirant à l'unité. Le mouvement représenté par la FOUS avait une importance indiscutable, comme le prouve le fait que plus de 50.000 travailleurs envoient leurs délégués à la Conférence d'Unité Syndicale. Mais c'était un mouvement qui débutait. Rappelons d'abord que, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire, la FOUS n'était pas une nouvelle centrale, mais un organisme destiné à coordonner et à centraliser les efforts de tous les syndicats aspirant à l'unité. Le mouvement représenté par la FOUS avait une importance indiscutable, comme le prouve le fait que plus de 50.000 travailleurs envoient leurs délégués à la Conférence d'Unité Syndicale. Mais c'était un mouvement qui débutait.

Le soulèvement militaire du 19 juillet a pipé ses possibilités de développement. La FOUS, qui se trouvait encore en période d'organisation, était insuffisamment connue, pour ne pas dire complètement ignorée des grandes masses ouvrières, tout particulièrement à Barcelone. Le soulèvement militaire du 19 juillet a pipé ses possibilités de développement. La FOUS, qui se trouvait encore en période d'organisation, était insuffisamment connue, pour ne pas dire complètement ignorée des grandes masses ouvrières, tout particulièrement à Barcelone.

Rien de surprenant, dans ces circonstances, qu'elle ne puisse se transformer en un pôle d'attraction. Le mouvement s'est polarisé autour de la CNT et de l'UGT. Le courant en ce sens était impétueux. Les travailleurs voulaient rejoindre l'une ou l'autre des deux centrales, traduisant ainsi intuitivement leur aspiration à l'unité. Pouvions-nous nous opposer à ce courant ? En aucune façon. Même en considérant que nous nous trouvions en présence d'un courant instinctif, que le maintien de deux centrales était une mauvaise chose, les travailleurs devant relever syndicalement d'une seule organisation, il était indispensable de passer par cette étape intermédiaire, fermement convaincus toutefois qu'avec l'expérience les travailleurs arriveraient aux mêmes conclusions que nous. Si nous avions voulu maintenir la FOUS à tout prix la classe ouvrière ne nous aurait pas compris et le maintien d'une organisation dont la raison d'être était la lutte pour l'unité aurait été interprété comme une manœuvre de scission. Disposés comme toujours à ne pas nous couper de la masse ouvrière, nous nous posons le problème d'entrer dans une des deux centrales. Laquelle ? Rien de surprenant, dans ces circonstances, qu'elle ne puisse se transformer en un pôle d'attraction. Le mouvement s'est polarisé autour de la CNT et de l'UGT. Le courant en ce sens était impétueux. Les travailleurs voulaient rejoindre l'une ou l'autre des deux centrales, traduisant ainsi intuitivement leur aspiration à l'unité. Pouvions-nous nous opposer à ce courant ? En aucune façon. Même en considérant que nous nous trouvions en présence d'un courant instinctif, que le maintien de deux centrales était une mauvaise chose, les travailleurs devant relever syndicalement d'une seule organisation, il était indispensable de passer par cette étape intermédiaire, fermement convaincus toutefois qu'avec l'expérience les travailleurs arriveraient aux mêmes conclusions que nous. Si nous avions voulu maintenir la FOUS à tout prix la classe ouvrière ne nous aurait pas compris et le maintien d'une organisation dont la raison d'être était la lutte pour l'unité aurait été interprété comme une manœuvre de scission. Disposés comme toujours à ne pas nous couper de la masse ouvrière, nous nous posons le problème d'entrer dans une des deux centrales. Laquelle ?

Ceux qui avaient tenacement soutenu la thèse de la division en deux grands secteurs nous donnaient la solution. Selon cette thèse, les syndicats anarchistes devaient entrer à la CNT ; ceux dirigés ou influencés par les marxistes devaient le faire à l'UGT. La seconde solution était indiquée pour les organisations de la FOUS, dans la mesure où, malgré leur caractère nettement syndical, elles étaient principalement inspirées par des éléments marxistes. Il y a, en outre, une autre considération qui nous inclinait à opter pour entrer à l'UGT : la nécessité de contribuer à sa rénovation avec le concours actif des forces qui iraient élargir ses rangs. Ceux qui avaient tenacement soutenu la thèse de la division en deux grands secteurs nous donnaient la solution. Selon cette thèse, les syndicats anarchistes devaient entrer à la CNT ; ceux dirigés ou influencés par les marxistes devaient le faire à l'UGT. La seconde solution était indiquée pour les organisations de la FOUS, dans la mesure où, malgré leur caractère nettement syndical, elles étaient principalement inspirées par des éléments marxistes. Il y a, en outre, une autre considération qui nous inclinait à opter pour entrer à l'UGT : la nécessité de contribuer à sa rénovation avec le concours actif des forces qui iraient élargir ses rangs.

Jusqu'au 19 juillet l'influence de l'UGT en Catalogne était insignifiante. Cette centrale n'avait ni prestige ni tradition. Son nom n'était attaché à aucune des grandes luttes du prolétariat catalan. Les organisations qui s'y affiliaient ne s'étaient distinguées ni par leur esprit révolutionnaire ni par leur combativité. Elles étaient de typiques "sociétés de résistance", d'inspiration pabliste [2] , dont les représentants étaient comme des poissons dans l'eau dans les institutions d'arbitrage, de conciliations et dans les organismes officiels.

Le mouvement syndical déclenché par les événements révolutionnaires change fondamentalement la base sociale des syndicats de l'UGT, vers laquelle affluent de grandes masses de travailleurs. Mais l'esprit réformiste de la direction persiste et constitue un obstacle à l'unification syndicale et un frein au développement victorieux de la révolution. Dans le fonds, la lutte, souvent violente, entre la CNT et l'UGT, n'est rien de plus que le choc entre les exigences révolutionnaires du moment, plus fidèlement représentées par la CNT, malgré certaines déformations, que par l'UGT, dont la direction, inspirée par la politique de Front Populaire du Parti Socialiste, tend à freiner la révolution, en la maintenant dans les limites de la République démocratique bourgeoise. Le mouvement syndical déclenché par les événements révolutionnaires change fondamentalement la base sociale des syndicats de l'UGT, vers laquelle affluent de grandes masses de travailleurs. Mais l'esprit réformiste de la direction persiste et constitue un obstacle à l'unification syndicale et un frein au développement victorieux de la révolution. Dans le fonds, la lutte, souvent violente, entre la CNT et l'UGT, n'est rien de plus que le choc entre les exigences révolutionnaires du moment, plus fidèlement représentées par la CNT, malgré certaines déformations, que par l'UGT, dont la direction, inspirée par la politique de Front Populaire du Parti Socialiste, tend à freiner la révolution, en la maintenant dans les limites de la République démocratique bourgeoise.

Il faut en finir avec cet état de choses. Les intérêts de la cause prolétarienne exigent une transformation radicale, fondamentale, de l'UGT. Nous allons vers cela en proposant aux syndicats jusqu'à présent affiliés à la FOUS d'entrer dans cette centrale. Il faut transformer l'UGT en une organisation combative et révolutionnaire, avec laquelle nous rendrons bien plus facile l'unification de tous les travailleurs dans une seule centrale et créerons une force redoutable tant par son importance numérique que par son esprit révolutionnaire. C'est sûr que la direction réformiste combattra désespérément pour conserver ses positions - la résistance qu'elle a opposé à notre entrée est significative à ce sujet - - mais nous ne faiblirons pas, avec l'appui des masses mêmes de l'UGT, dans la certitude que la victoire couronnera nos efforts. Il faut en finir avec cet état de choses. Les intérêts de la cause prolétarienne exigent une transformation radicale, fondamentale, de l'UGT. Nous allons vers cela en proposant aux syndicats jusqu'à présent affiliés à la FOUS d'entrer dans cette centrale. Il faut transformer l'UGT en une organisation combative et révolutionnaire, avec laquelle nous rendrons bien plus facile l'unification de tous les travailleurs dans une seule centrale et créerons une force redoutable tant par son importance numérique que par son esprit révolutionnaire. C'est sûr que la direction réformiste combattra désespérément pour conserver ses positions - la résistance qu'elle a opposé à notre entrée est significative à ce sujet - - mais nous ne faiblirons pas, avec l'appui des masses mêmes de l'UGT, dans la certitude que la victoire couronnera nos efforts.


Notes

[1] La Fédération ouvrière d'unité syndicale (FOUS) a été formée à partir des syndicats de Lérida, Tarragone et Gérone exclus de la CNT parce que dirigés par des poumistes. Son secrétaire général était Andreu Nin.

[2] Le terme pabliste fait référence Pablo Iglesias, dirigeant du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol et de l'Union Générale des Travailleurs.


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