1938

Le manifeste du marxisme révolutionnaire à l'époque de l'impérialisme - celle des guerres et des révolutions.


Programme de Transition

Léon Trotsky

 

Contre l'opportunisme et le révisionnisme sans principes

La politique du parti de Léon Blum en France démontre de nouveau que les réformistes sont incapables de rien apprendre des leçons les plus tragiques de l'histoire. La social-démocratie française copie servilement la politique de la social-démocratie allemande et marche à la même catastrophe. Durant des dizaines d'années, la II° Internationale a grandi dans les cadres de la démocratie bourgeoise, en est devenue une partie inséparable, et pourrit avec elle.

La III° Internationale est entrée dans la voie du réformisme à l'époque où la crise du capitalisme avait définitivement mis à l'ordre du jour la révolution prolétarienne. La politique actuelle de l'I.C. en Espagne et en Chine - politique qui consiste à ramper devant la bourgeoisie "démocratique" et "nationale" - démontre que l'I.C., elle non plus, n'est plus capable d'apprendre quelque chose ou de changer. La bureaucratie, qui est devenue une force réactionnaire en URSS, ne peut jouer un rôle révolutionnaire sur l'arène mondiale.

L'anarcho-syndicalisme a connu, dans l'ensemble, une évolution du même genre. En France, la bureaucratie syndicale de Léon Jouhaux est devenue depuis longtemps une agence de la bourgeoisie dans la classe ouvrière. En Espagne, l'anarcho-syndicalisme s'est débarrassé de son révolutionnarisme de façade dès qu'a commencé la révolution, et est devenue la cinquième roue du char de la démocratie bourgeoise.

Les organisations intermédiaires centristes, qui se groupent autour du Bureau de Londres, ne sont que des accessoires "gauche" de la social-démocratie et de l'I.C. Elles ont montré leur incapacité complète à s'orienter dans une situation historique et à en tirer les conclusions révolutionnaires. Leur point culminant fut atteint par le POUM espagnol qui, dans les conditions de la révolution, s'est trouvé absolument incapable d'avoir une politique révolutionnaire.

Les défaites tragiques subies par le prolétariat mondial durant une longue série d'années ont poussé les organisations officielles à un conservatisme encore plus grand et ont conduit en même temps les "révolutionnaires" petits-bourgeois déçus à rechercher des "voies nouvelles". Comme toujours, dans les époques de réaction et de déclin, apparaissent de toutes parts les magiciens et les charlatans. Ils veulent réviser toute la marche de la pensée révolutionnaire. Au lieu d'apprendre du passé, ils le "corrigent".

Les uns découvrent l'inconsistance du marxisme, les autres proclament la faillite du bolchevisme. Les uns font retomber sur la doctrine révolutionnaire la responsabilité des erreurs et des crimes de ceux qui l'ont trahie; les autres maudissent la médecine, parce qu'elle n'assure pas une guérison immédiate et miraculeuse. Les plus audacieux promettent de découvrir une panacée et, en attendant, recommandent d'arrêter la lutte des classes. De nombreux prophètes de la nouvelle morale se disposent à régénérer le mouvement ouvrier à l'aide d'une homéopathie éthique. La majorité de ces apôtres ont réussi à devenir eux-mêmes des invalides moraux avant même de descendre sur le champ de bataille. Ainsi, sous l'apparence de "nouvelles voies", on ne propose au prolétariat que de vieilles recettes, enterrées depuis longtemps dans les archives du socialisme d'avant Marx.

La IV° Internationale déclare une guerre implacable aux bureaucrates de la II° et de la III° Internationales, de l'Internationale d'Amsterdam et de l'Internationale anarcho-syndicaliste, de même qu'à leurs satellites centristes; au réformisme sans réformes, au démocratisme allié de la Guépéou, au pacifisme sans paix, à l'anarchisme au service de la bourgeoisie, aux "révolutionnaires" qui craignent mortellement la révolution. Toutes ces organisations ne sont pas le gage de l'avenir, mais des survivances pourrissantes du passé. L'époque des guerres et des révolutions ne laissera pas d'elles pierre sur pierre.

La IV° Internationale ne recherche ni n'invente aucune panacée. Elle se tient entièrement sur le terrain du marxisme, seule doctrine révolutionnaire qui permette de comprendre ce qui est, de découvrir les causes des défaites et de préparer la victoire. La IV° Internationale continue la tradition du bolchevisme, qui a montré pour la première fois au prolétariat comment conquérir le pouvoir. La IV° Internationale écarte les magiciens, les charlatans et les professeurs importuns de morale. Dans une société fondée sur l'exploitation, la morale suprême est la morale de la révolution socialiste. Bons sont les méthodes et moyens qui élèvent la conscience de classe des ouvriers, leur confiance dans leurs propres forces, leurs dispositions à l'abnégation dans la lutte. Inadmissibles sont les méthodes qui inspirent aux opprimés la crainte et la docilité devant les oppresseurs, étouffent l'esprit de protestation et de révolte, ou substituent à la volonté des masses la volonté des chefs, à la persuasion la contrainte, à l'analyse de la réalité, la démagogie et la falsification. Voilà pourquoi la social-démocratie, qui a prostitué le marxisme, tout comme le stalinisme, antithèse du bolchevisme, sont les ennemis mortels de la révolution prolétarienne et de sa morale.

Regarder la réalité en face; ne pas chercher la ligne de moindre résistance; appeler les choses par leur nom; dire la vérité aux masses, quelque amère qu'elle soit; ne pas craindre les obstacles; être rigoureux dans les petites choses comme dans les grandes; oser, quand vient l'heure de l'action : telles sont les règles de la IV° Internationale. Elle a montré qu'elle sait aller contre le courant. La prochaine vague historique la portera à son faîte.


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