2001

Bulletin des députés LO-LCR au Parlement Européen
(Groupe GUE/NGL)
numéro 5 - février 2001


NICE : MARCHANDAGE AU SOMMET

     Le traité de Nice, en continuité avec ceux de Maastricht et d'Amsterdam, est révélateur des choix prioritaires opérés par les chefs d'Etat pour la construction de leur Europe.

     La Charte des droits fondamentaux, même si elle n'a pas été intégrée dans le traité, peut devenir une référence à l'échelle européenne, certains pensant même qu'elle pourrait être le préambule d'une éventuelle constitution européenne. Cette Charte constitue une régression par rapport à quelques législations sociales actuellement en vigueur, et sera utilisée pour tirer vers le bas les acquis sociaux.

     Pour affirmer une " Europe puissance " et pour le plus grand bonheur des grands groupes industriels européens de l'armement, le sommet de Nice a adopté la création de la force de réaction rapide de 60000 hommes, de même qu'un statut européen pour les sociétés anonymes, outil nécessaire à l'approfondissement de leur marché intérieur.

     Les réformes institutionnelles avancent plus lentement que ce que souhaitent certains gouvernements, et reflètent les contradictions d'intérêts. Elles expliquent l'échec à propos de l'établissement de la " majorité qualifiée ", et de la réforme de la Commission visant à imposer aux " petits " Etats une sous-représentation. Le Conseil des ministres a été réformé pour permettre qu'un vote y soit qualifié s'il représente au moins 62 % de la population de l'Union. Mais ce qui freine les quatre principales puissances européennes pour imposer leur domination commune sur les pays moins développés du Sud et de l'Est du continent qui demandent leur adhésion, ce sont leurs propres concurrences entre elles. La Grande-Bretagne, dont la législation sociale est la plus déficiente parmi les grands pays, met en avant " l'exception anglaise " concernant les droits sociaux et la fiscalité. La France met en avant " l'exception française " sur les productions culturelles. Mais aucun des Átats n'a mis en avant " l'exception sociale " pour préserver ce qui, dans sa propre législation sociale, est le moins défavorable aux travailleurs ou pour s'opposer à la privatisation des services publics. Mais on peut penser qu'une nouvelle Conférence Inter Gouvernementale annoncée en 2004 leur permettra de trouver les compromis nécessaires. D'ailleurs, la suppression du droit de veto dans la législation des " coopérations renforcées " permet déjà des accords entre les pays les plus puissants de l'Union européenne.On retiendra l'entente sans faille entre Chirac et Jospin dans la conduite des négociations sous l'égide de la présidence française, reflet de leur vision commune sur la politique européenne.

     Il n'y a rien de mieux à attendre de l'Union européenne que de chaque Átat national, rien de bon à espérer de ces institutions européennes totalement anti-démocratiques et au service des grands groupes financiers et industriels. La défense des services publics, l'interdiction des licenciements dans les entreprises qui font des profits, à Danone par exemple, l'alignement vers le haut des législations sociales, des salaires et notamment des salaires minimums, au niveau des pays où ils sont les plus élevés sont les objectifs que nous continuerons à défendre au Parlement européen comme ailleurs. Seule la mobilisation massive et collective des travailleurs pourra les imposer à l'échelle de l'Europe.

Le contre sommet de la rue

     Temps fort de la présidence française du Conseil de l'UE, le sommet de Nice a été l'occasion d'exprimer les mécontentements face à des politiques patronales confortées par la complaisance du gouvernement de la gauche plurielle. Quatre mois après les manifestations contre le Fonds Monétaire International à Prague, Nice fut également une occasion de manifester contre la politique anti-sociale des institutions européennes. Au-delà des débats et initiatives qui ont permis aux différents réseaux militants syndicaux, associatifs et politiques, d'échanger les expériences, le contre sommet des 6 et 7 décembre a, avant tout, fait parler de lui pour ses manifestations de rue.

     En réunissant plus de 60000 personnes venues d'Europe, la manifestation du 6 a été un véritable succès. Elle était composée d'importants cortèges syndicaux de la Confédération européenne des syndicats (CES), représentée notamment par une forte délégation de la CGT. Átaient aussi présents de nombreux mouvements sociaux et associatifs, ou encore des partis politiques, avec la présence de plusieurs députés européens dont nos camarades Armonie Bordes et Chantal Cauquil pour LO et Alain Krivine et Roseline Vachetta pour la LCR.

     À côté des revendications sociales pour l'emploi, contre les licenciements et la précarité, beaucoup de slogans dénonçaient vigoureusement la Charte des droits fondamentaux.

     Le jeudi 7 au matin à l'aube, l'encerclement " pacifique mais déterminé " du sommet par plusieurs milliers de manifestants a été un prolongement de la journée du 6 pour faire entendre au plus près des chefs d'Etat les revendications. La police a cherché à repousser systématiquement les manifestants qui occupaient les différentes rues. C'est donc des chefs d'Etat " gênés par les gaz lacrymogènes " qui ont ouvert un sommet qui traitait de l'élargissement, de la réforme des institutions et de la défense européenne. Une défense à l'image de l'Europe forteresse qui concrètement s'est exprimée, ce jour-là, en bloquant 1000 jeunes manifestants italiens à la frontière. Les protestations auprès du gouvernement français de plusieurs députés européens et la présence de deux d'entre eux, dont Alain Krivine, n'y ont malheureusement rien changé. Preuve une fois de plus que dans cette Europe, capitaux et marchandises circulent plus librement que les individus.
Bref, un contre sommet réussi et une lutte qui continue!

LIBERALISATION DES POSTES

     Le PS ou la politique du saucisson

     Les offensives contre les services publics postaux ont continué au Parlement. La dernière en date portait sur la tentative de retirer aux services postaux le monopole du transport des paquets de moins de 350 g. La proposition consistait à abaisser cette limite à 50 g, autrement dit à laisser aux entreprises privées le droit de transporter tous les paquets à l'exception des lettres. Tout à fait d'accord avec cette politique générale de libéralisation, les élus socialistes, en conformité avec le gouvernement français, ont tout de même voulu se donner une image de défenseurs du service public. Tout en acceptant les perspectives générales de libéralisation, ils proposaient un " moindre mal ": que cette limite se limite à 150 g. A la commission économique et monétaire, seule notre camarade Armonie Bordes a dénoncé cette reculade. Finalement, malgré l'opposition d'une centaine d'élus dont ceux de LO et de la LCR, cette mesure a été adoptée en assemblée générale.

     Lors d'une réunion organisée à Tours par des militants du PCF et des syndicalistes de la CGT et de SUD, qui souhaitaient des éclaircissements, Armonie Bordes et Roseline Vachetta, invitées, ont pu vérifier à quel point les militants, les syndicalistes de La Poste étaient choqués de cette politique qui vise à supprimer les services publics au profit du privé et dont ils subissent les conséquences par une détérioration de leurs conditions de travail.


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