1934

"Notre programme d'action veut être celui du prolétariat entraînant les autres couches laborieuses de la nation depuis la lutte pour leurs revendications immédiates jusqu'à celles pour l'établissement du pouvoir des ouvriers et des paysans."

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Programme d’action

Ligue Communiste

Juin 1934 [*]


Table des matières

Préface (extraits)
I : Le fascisme et la guerre menacent :
II : Le plan de la bourgeoisie française
III : Abolition du secret commercial !
IV : Contrôle ouvrier et paysan sur les banques, l'industrie et le commerce
V : Aux ouvriers !
VI : Nationalisation des banques, des industries‑clés, des assurances, des moyens de transport
VII : Monopole du commerce extérieur
VIII : L'Entente des Ouvriers et des Paysans
IX : Services Sociaux pour la collectivité !
X : Licenciement de la police, droits politiques aux soldats
XI : Droit des Nationalités à disposer d'elles‑mêmes, y compris jusqu'à la séparation
XII : Contre la guerre, pour les États‑Unis Socialistes d'Europe !
XIII : Pour la défense de l’Union Soviétique
XIV : Á bas « l'État fort » bourgeois ! Pour le pouvoir ouvrier et paysan !
XV : La lutte pour la Commune ouvrière et paysanne
XVI : Pour une Assemblée unique
XVII : La bourgeoisie ne s'inclinera jamais de bon gré
XVIII : La seule voie de salut

Préface (extraits)

Aux travailleurs de France qui cherchent à unifier leur lutte sur un programme, nous soumettons le nôtre qui s’inspire totalement des problèmes posés par la situation présente et du plus important de tous, de la conquête du pouvoir.

Depuis février 1934, a commencé, en France une nouvelle période historique : la nation ne se contentera plus d'exprimer une fois tous les quatre ans son sentiment politique : désormais le nombre grandit prodigieusement de ceux qui comprennent que leur avenir dépend de leur action propre et qui sont résolus à l'action. Mais quelle action ? Quels moyens employer ? Par quoi remplacer le vieil état de choses vermoulu ?

A cette demande des masses a répondu une abondance de plans. Dans le Parti socialiste, les tendances « planistes » ont été très fortes ; et la CG.T. a convoqué des États Généraux pour faire adopter son plan.

Que reprochons-nous à ces plans ? Qu'est-ce qui différencie essentiellement notre programme d'action de ces plans ? C'est ce que nous voulons en quelques mots souligner dans cette préface.

Tous ces plans comportent un système de mesures d'ordres divers destinés à planifier l'économie ; les auteurs de plans se combattent sur l'efficacité plus ou moins grande des mesures qu'ils avancent ; qu'il y en ait d'excellentes dans le nombre - nous ne le contesterons pas. Mais tous ces plans sont conçus et présentés aux masses sans leur indiquer comment les réaliser, se bornant à leur demander de confier leurs destinées entre les mains des auteurs de plans. Dans ces conditions, ces plans ne sont que des utopies dangereuses et sur ce domaine, la démagogie fasciste avec ses revolvers et ses matraques l'emportera toujours aisément sur les dissertations des faiseurs de plans. Ceux-ci ont été fortement Impressionnés par le Plan quinquennal soviétique. Ils oublient tout simplement que celui-ci (abstraction faite de l’orientation générale de la politique de la bureaucratie dirigeante en U.R.S.S.) n'a été possible que parce qu'en octobre 1917 les ouvriers et les paysans russes ont abattu la domination du capitalisme et instauré la dictature du prolétariat.

Notre programme d'action veut être celui du prolétariat entraînant les autres couches laborieuses de la nation depuis la lutte pour leurs revendications immédiates jusqu'à celles pour l'établissement du pouvoir des ouvriers et des paysans. Il contient de grands mots d'ordre généraux pour la réalisation desquels peut et doit s'effectuer la mobilisation des travailleurs des villes et des campagnes : le contrôle ouvrier et paysan, les grandes nationalisations, des mesures pour la défense de la paysannerie pauvre, les droIts des soldats, etc... etc... Mais pour chacune de ces revendications, il donne Ies moyens de lutter pour leur réalisation : l'organisation des couches intéressées dans des comités (comités d’usines, comités de paysans, comités de soldats, etc...) dans lesquels serait suscitée et développée l'initiative des travailleurs en lutte. Il ne peut s'agir seulement de travailleurs inscrits dans les partis et syndicats, mais des plus larges masses, constituant ainsi, par l'Alliance ouvrière, dans un vaste réseau de comités, la représentation véritable des travailleurs n'attendant pas la manne d'en haut, mais réalisant leurs exigences.

Nous ne disons pas aux travailleurs : voici un plan excellent, faites-nous confiance ; nous leur disons : voici des solutions pour sortir du bourbier ; voici les méthodes sur lesquelles vous devez vous unir et que vous devez employer pour y parvenir. Car la situation présente ne peut offrir d'issue favorable aux travailleurs que si ceux-ci prennent en mains leur cause, leurs intérêts et les défendent ardemment.

Sur le problème du pouvoir ce programme d'action apporte aussi une solution réaliste faisant appel également à l'initiative populaire. Inspirée des traditions révolutionnaires de la Grande Révolution Française et basée sur l'expérience de la victoire bolchevik d'octobre 1917.

Enfin ce programme d'action, montrant aux travailleurs une bourgeoisie féroce, décidée à les réduire à la portion congrue par le fer et par le feu des bandes fascistes, pose avec vigueur pour la légitime défense des travailleurs, la nécessité de la création de milices antifascistes et de l’armement du prolétariat et des paysans pauvres. C'est un des points décisifs de la politique révolutionnaire à l'heure présente : les travailleurs ont en face d'eux un ennemi mortel, armé jusqu'aux dents. Il s'agit de savoir s'ils vont répondre aux couteaux et aux revolvers fascistes par des couteaux et des revolvers ou... par des discours et des bulletins de vote. Malheur aux travailleurs s’ils ne comprennent pas à temps leur devoir sur ce point !


Forts des enseignements des grandes luttes passées de la classe ouvrière, n'ayant pas d'autres intérêts que ceux de la classe ouvrière, les bolcheviks-léninistes de France ont, pour les grandes luttes qui viennent, élaboré ce programme d'action avec la volonté d'y gagner les larges masses de travailleurs, d’œuvrer pour qu'elles donnent vie à chacun de ses grands mots d'ordre. Le but de ce document, c’est que le militant, le travailleur qui l'aura lu, se dise : « Je vais en convaincre les camarades de mon syndicat, ceux de ma section socialiste ou de ma cellule communiste.

« Au travail pour constItuer un comité d'usine dans mon entreprise. Au travail pour constItuer une milice ouvrière dans mon entreprise ou dans mon quartier !

« Il n’y a plus une minute à perdre ! »

24 août 1934


I : Le fascisme et la guerre menacent :

Dirigée par la grande bourgeoisie, la France sombre dans la décomposition du monde capitaliste. Dans les couches dirigeantes de la société, dans toutes les institutions du régime, les scandales pullulent, la corruption des riches s'étale.

Pour les ouvriers, c'est le chômage grandissant ; pour les petits paysans, c'est la ruine ; pour tous les exploités, c'est la misère accrue.

Le capitalisme agonisant a fait faillite. Et pour essayer d'échapper à cette banqueroute historique, les classes dirigeantes n'ont qu'un plan : encore plus de misère pour les masses laborieuses ! Suppression de toutes les réformes, même les plus minimes ! Suppression du régime démocratique !

Le talon de fer du fascisme devient dans le monde entier l’argument suprême du capitalisme aux abois.

L'Impérialisme frappé à mort par la révolution russe d'octobre 1917, est parvenu à maintenir sa domination sur l'humanité par suite de l'échec des partis prolétariens dans les différentes périodes de l'après‑guerre : trahison générale de la social‑démocratie, et dégénérescence de l'I.C. consécutive à ces défaites. L'échec de la révolution allemande en 1923, de la révolution chinoise en 1927, du prolétariat allemand et autrichien en 1933 et 34 marquent les moments décisifs où le capitalisme est parvenu à se maintenir.

Cependant, ces victoires précaires, obtenues sans qu'en Russie Soviétique les anciennes classes dirigeantes aient pu se rétablir, n'ont fait elles-mêmes qu'exaspérer la crise universelle. Plus violemment et anarchiquement crue jamais les exigences des monopoles sur le marché mondial se heurtent aux limites nationales et au principe de la propriété privée.

Profitant des revers du prolétariat dans sa marche révolutionnaire vers le socialisme, la bourgeoisie mondiale utilise une dernière arme, le fascisme, au moyen duquel elle fait un effort désespéré pour écarter de sa route la classe ouvrière organisée.

Telle est la situation internationale qui pousse la bourgeoisie française vers le fascisme.

Mais le fascisme lui‑même n'est pas encore le dernier mot du capitalisme en décomposition. Lorsqu'il a battu son ennemi à l'intérieur, chaque impérialisme veut s'étendre à l'extérieur. Telle est la source d'une nouvelle guerre mondiale . Cinquante millions d'hommes ont péri dans les atroces souffrances de la dernière guerre et de ses suites. C'est par centaines de millions que les travailleurs de l'humanité entière se verraient massacrer dans une prochaine guerre. La France, dont la population est stagnante, y échapperait moins que tout autre pays.

À ces plans criminels de la bourgeoisie, les travailleurs doivent s’opposer de toutes leurs forces !

II : Le plan de la bourgeoisie française

Pour essayer de sortir du chaos où elle plonge le pays, la bourgeoisie française doit d'abord résoudre le problème monétaire. Les uns veulent le faire par L'INFLATION , c'est‑à‑dire l'émission de papier‑monnaie, l'avilissement des salaires, la hausse du coût de la vie, l'expropriation de la petite bourgeoisie, et les autres la DÉFLATION , c'est‑à‑dire les économies sur le dos des travailleurs (baisse des traitements et salaires), l'extension du chômage, la ruine des petits producteurs paysans et de la petite bourgeoisie des villes.

L'un comme l'autre signifie pour les exploités la misère accrue. Choisir entre ces deux méthodes capitalistes serait un choix entre les différents instruments avec lesquels les exploiteurs s'apprêtent à couper la gorge aux travailleurs.

La déflation brutale est la première étape du plan des capitalistes français.

Les ouvriers se voient retirer les allocations de chômage ; les assurances sociales sont menacées ; les salaires sont diminués. Les fonctionnaires sont frappés et les petits paysans vont l'être.

Cela n'empêchera pas demain la bourgeoisie de passer à l'autre méthode, si elle lui est utile. L'Allemagne hitlérienne en montre l'exemple. À la réalisation, de ce plan de la bourgeoisie, les exploités doivent s'opposer avec une énergie farouche !

Au programme de déflation, de diminution de leurs moyens d'existence, les travailleurs doivent opposer leur programme de remaniement fondamental des rapports sociaux par la « déflation » totale des privilèges et profits de la bande d'oustricards et de stariscrates qui exploitent le pays ! Telle est la seule voie de salut.

III : Abolition du secret commercial !

Pour trouver la solution favorable aux masses travailleuses, il faut sans tarder établir le bilan impitoyable de la faillite capitaliste , dresser l'inventaire des recettes et des dépenses de toutes les classes, de toutes les couches sociales.

Pour les prolétaires, les exploités de toutes catégories, ce n'est pas difficile. Les salaires des travailleurs sont fixés dans les livres de comptabilité des capitalistes. Quant aux dépenses, les petits commerçants les contrôlent de semaine en semaine. Les revenus et les dépenses des paysans, artisans, petits commerçants, petits fonctionnaires, ne sont un secret pour personne. Les banques rapaces évaluent exactement la mine croissante des paysans par les crédits hypothécaires !

Mais les capitalistes, les gros exploiteurs gardent jalousement leurs secrets !

Les trusts, les monopoles, les grandes compagnies qui dominent la totalité de la production du pays, et qui en possèdent directement les 9/10°, ne rendent jamais compte de leurs vols.

Cette maffia exploiteuse se couvre du sacro‑saint « secret commercial ».

Mais ce secret commercial est un prétexte pour contrôler la vie des pauvres en dissimulant toutes les affaires bancaires, industrielles et commerciales des riches, des Stavisky et des de Wendel, qui s'abritent derrière le manteau de « l'intérêt général » et de l' « économie nationale ».

À bas le secret commercial ! Ceux qui demandent des sacrifices doivent commencer par présenter leurs livres de comptabilité. Ainsi seront dévoilées leurs escroqueries !

IV : Contrôle ouvrier et paysan sur les banques, l'industrie et le commerce

La démocratie bourgeoise accordait aux masses laborieuses une apparence de contrôle politique sur ses dirigeants grâce au bulletin de vote. Tant que cela ne lui était pas nuisible, la bourgeoisie a permis cette démocratie. Mais elle n'a jamais permis l'ombre méme d'un contrôle sur sa gestion économique, sur la base de son exploitation, qui aboutit à l'anarchie, la faillite et la misère des masses.

L'actionnaire parasite a le droit de savoir comment fonctionne l'entre­prise, qui l'enrichit. Mais l'ouvrier, le producteur exploité, n'a qu'à obéir et à se taire : il n'est qu'une partie de l'outillage.

Mais les travailleurs veulent connaître toutes les pièces de la machine. Eux seuls peuvent juger son fonctionnement. A l'autorité capitaliste des directions, imposons le contrôle implacable des travailleurs.

Les comités d'usine, les comités de paysans, les comités de petits fonctionnaires, d'employés, pourraient très facilement, avec l'aide de techniciens honnêtes, d'ingénieurs, de comptables dévoués au peuple travailleur, démêler les « secrets commerciaux » des exploiteurs. C'est par ce moyen qu'il faut instaurer le CONTROLE PUBLIC SUR LES BANQUES, L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE .

V : Aux ouvriers !

Sous ce mot d'ordre général la Ligue Communiste combat pour les mesures suivantes en faveur des ouvriers :

  1. SEMAINE DE 40 HEURES, AUGMENTATION DES SALAIRES. Le contrôle démontrerait que le niveau des forces productives permet la réduction de la journée de travail. Augmentation des salaires, au détriment des magnats du Comité des Forges et du Comité des Houillères, des Finaly, des Schneider et des Stavisky, et à l'avantage matériel et moral du peuple travailleur.
  2.  

  3. ASSURANCES SOCIALES (et en premier lieu l'assurance chômage) véritables. Congé annuel d'un mois au minimum. Retraite permettant de vivre à partir de 50 ans.
  4.  

  5. A TRAVAIL ÉGAL, SALAIRE ÉGAL. Abolition de la surexploitation imposée aux femmes, aux jeunes, aux immigrés et aux coloniaux.
  6.  

  7. POUR LES TRAVAILLEUSES , mêmes salaires et mêmes droits que pour les travailleurs. Protection de la maternité avec congés supplémentaires.
  8.  

  9. POUR LES JEUNES . Salaire égal à celui des adultes. Prolongation de la scolarité et apprentissage aux frais de la collectivité, Mesures d'hygiène spéciales.
  10.  

  11. SUPPRESSION DE TOUTE LÉGISLATION PARTICULIÈRE POUR LES TRAVAILLEURS ÉTRANGERS ET COLONIAUX.
  12.  

VI : Nationalisation des banques, des industries‑clés, des assurances, des moyens de transport

Actuellement, ce sont les Banques qui dirigent et contrôlent effectivement toute l'économie du pays. Mais si le peuple travailleur s'empare des banques et commence à diriger par leur intermédiaire l'industrie, les transports, le commerce, le niveau général de vie pourra être immédiatement augmenté.

La nationalisation des banques, grande production, transports et assurances, est la condition préalable d'une économie dirigée vers le bien‑être des grandes masses travailleuses, du peuple tout entier.

Cette nationalisation doit se faire sans aucune indemnisation des grands capitalistes qui se sont enrichis en saignant les prolétaires pendant des dizaines d'années, et qui n'ont pu engendrer que la misère et l'anarchie économique.

Mais la nationalisation des grands moyens de production et d'échange ne signifie absolument pas l'étouffement des petites entreprises paysan­nes, commerciales et artisanales. Au contraire ce sont les grands mono­poles privés qui étranglent les petites économies.

Non seulement les petites entreprises seraient laissées libres, mais les travailleurs ayant nationalisé les grandes entreprises pourraient leur venir en aide. L'économie dirigée, appuyée sur les immenses richesses accumulées par les banques, trusts, sociétés anonymes, etc... permettrait d'établir un plan de production et de distribution qui offre aux petits producteurs privés des commandes directes de la part de l'État, des matières premières et des crédits à des conditions absolument favorables. Ainsi la paysannerie recevrait à bon marché des machines agricoles et engrais.

La nationalisation par les travailleurs signifie la destruction des grands monopoles privés, le soutien des petites entreprises, une répartition des produits au bénéfice de la grande masse des producteurs.

VII : Monopole du commerce extérieur

Tout le commerce avec l'extérieur devrait passer entre les mains de l'État. Ainsi, ce ne seraient plus les maîtres du trafic des monopoles privés qui régleraient les importations et exportations, sans souci de l'intérêt des consommateurs. Des avantages inappréciables pour la grande masse proviendraient de cet intermédiaire entre la production nationale et le marché mondial.

Ainsi seulement l'État sous la domination des travailleurs, contrôlerait réellement tous les échanges avec l'extérieur au profit de la collectivité.

VIII : L'Entente des Ouvriers et des Paysans

La paysannerie constitue à peu près la moitié de la population françaiise. L'État prolétarien doit reposer aussi bien sur les ouvriers des villes et des campagnes que sur les paysans exploités. Notre programme répond aussi bien aux besoins de la classe ouvrière qu'à ceux de la grande masse rurale.

Nous affirmons que notre but définitif est la collectivisation de l'agriculture, aussi bien que de l'industrie, comme formes supérieures du progrès, Mais le prolétariat ne peut imposer ce but à la paysannerie. De sa part, il ne peut s'agir que de faciliter l'évolution vers ce but. Il ne peut que faire des propositions en ce sens, propositions qui doivent être complétées, corrigées et élargies par l'expérience commune des deux classes également opprimées par les exploiteurs capitalistes. Nous devons d'abord assurer aux paysans une possibilité réelle de disposer d'eux-mêmes, de leurs forces et de leurs propriétés, de donner la préférence à telle ou telle forme d'exploitation rurale, de choisir par leur libre appréciation le moment de passer de l'économie privée à l'économie collective.

La population rurale est loin d'être homogène, La classe dirigeante et ses savants serviteurs, cachent soigneusement le fait qu'une petite minorité a accaparé une énorme partie de la propriété foncière, et concentré entre ses mains les meilleurs moyens de production agricole (machines, tracteurs, cheptel, etc ... ) sans parler de, leur possession des sources de crédit.

Nous proposons la lutte pour la réalisation immédiate des mesures suivantes :

  1. MÊMES DROITS AUX OUVRIERS AGRICOLES QU'À CEUX DES VILLES. Lois communes portant sur les contrats, la journée de travail et le repos hebdomadaire, assurances sociales (chômage compris), législation prudhomale. L'extension de la législation du travail s'applique entièrement aux ouvriers agricoles.
  2.  

  3. EXPROPRIATION DES GRANDES PROPRIETES, DOMAINES ET FERMES MODELES en faveur de l'exploitation collective, coopérative et des petits exploitations paysannes.
  4.  

  5. ABOLITION DES FORMES ESCLAVAGISTES DU METAYAGE, REVISION DES BAUX EN COURS PAR DES COMITES DE PAYSANS TRAVAILLEURS ELUS PAR DEPARTEMENT.
  6.  

  7. REVISION DES HYPOTHEQUES. Moratoire. Arrêt de toutes poursuites et saisies.
  8.  

IX : Services Sociaux pour la collectivité !

Les grandes administrations de l'État (postes, douanes, enseignement, etc... ) qui exploitent plusieurs millions de travailleurs, fonctionnent au profit du capitalisme. Les scandales ont montré la corruption qui règne dans leurs sommets.

Les petits fonctionnaires sont exploités par le haut personnel corrompu, vénal, qui utilise ses fonctions pour permettre aux possédants de gruger davantage encore les travailleurs.

Il faut porter le fer rouge dans l'administration. Avec la collaboration de tous les exploités, les comités et syndicats de petits fonctionnaires opéreront la transformation nécessaire pour leur substituer de véritables services Sociaux fonctionnant pour et par la masse des travailleurs.

X : Licenciement de la police, droits politiques aux soldats

C'est par milliards que le gouvernement soutire l'argent aux pauvres, aux exploités, aux gens de toutes conditions, pour développer et armer sa police, ses gardes mobiles et son armée, en un mot pour développer non seulement la guerre civile , mais préparer la guerre impérialiste . Les jeunes travailleurs mobilisés par centaines de milliers dans les armées de terre et de mer sont privés de tous droits.

Nous voulons le licenciement des officiers et sous‑officiers réactionnaires et fascistes, instruments de coup d'État. Les travailleurs sous les armes doivent au contraire conserver tous les droits politiques, et se faire représenter par des comités de soldats élus dans des assemblées spéciales. Ils resteront ainsi liés réellement à la grande masse des travailleurs, et unifieront leurs forces avec celles du peuple organisé et armé contre la réaction et le fascisme.

Toute la police exécutrice des volontés du capitalisme, de l'État bourgeois et de ses clans politiciens corrompus doit être licenciée. Exécution des fonctions de police par la milice des travailleurs. Abolition de la justice de classe, extension du jury, éligibilité de tous les juges, extension du jury pour tous les crimes et délits : le peuple rend justice lui-même.

XI : Droit des Nationalités à disposer d'elles‑mêmes, y compris jusqu'à la séparation

Le traité de pillage de Versailles fut une source de maux atroces non seulement pour les travailleurs de l'Europe entière, mais aussi pour ceux du pays « vainqueur », la France. La défense des rapports internationaux issus de ce traité par lequel la bourgeoisie a annexé l'Alsace­-Lorraine, sans même un plébiscite comme celui qu'elle réclame pour la Sarre, CONDUIT AUJOURD'HUI À LA GUERRE.

La bourgeoisie française n'opprime pas seulement indirectement toute une partie de l'Europe : elle écrase et ruine aussi des colonies immenses.

Pour tous les peuples opprimés par les grands capitalistes français, par les de Wendel et les Michelin, les Banques de Paris et autres, pour les Alsaciens-Lorrains aussi bien que pour les Indochinois, les Marocains et les Malgaches, nous réclamons le DROIT À DISPOSER ENTIÈREMENT D'EUX-MÊMES, JUSQUES ET Y COMPRIS LA SÉPARATION S'ILS LE VEULENT.

Les masses travailleuses de ce pays n'ont aucun intérêt à aider les banquiers français à maintenir leur domination sur d'autres peuples. Au contraire, ils s'en feront des frères et des soutiens pour leur propre lutte, en les aidant a la libération.

XII : Contre la guerre, pour les États‑Unis Socialistes d'Europe !

Pour pouvoir transformer la Société et la sortir du chaos, il faut en pre­mier, lieu la préserver de la guerre dans laquelle la bourgeoisie veut de nouveau plonger le monde.

Aux entreprises du fascisme alle­mand, les capitalistes français opposent une politique de blocs d'États appuyés sur le respect du traité cri­minel de Versailles. La France utili­se la Société des Nations, assemblée de rapaces bourgeois, pour couvrir son action des voiles du pacifisme. La course aux armements fait peser des charges écrasantes sur le peu­ple travailleur. Et le mensonge « dé­fensif » de la « sécurité » permet au délire chauvin de faire son œuvre, de précipiter le pays vers les mons­trueuses hécatombes de demain.

Les prolétaires les paysans, les commerçants, artisans, fonctionnaires ne peuvent éviter cet avenir qu'en étendant toutes les formes de leur contrôle en démasquant la politique secrète, en s'opposant par tous les moyens à la préparation à la guerre, en arrachant le gouvernement des mains de l'impérialisme.

Seule la victoire des révolutionnai­res, des travailleurs en France anéantirait toute possibilité de guerre im­périaliste, soulèverait les peuples as­servis de l'Europe et des colonies. Pactes et traités tomberaient en poussière, seule deviendrait possible cet­te solution qui aurait pu voir le jour dès 1919 : LES ÉTATS‑UNIS SOCIALISTES D'EUROPE.

Contre la politique des blocs impé­rialistes, contre le mensonge pacifiste de la S.D.N., contre la diplomatie secrète de guerre, et la folie des arme­ments, dans le vieux continent euro­péen divisé, militarisé, ensanglanté et menacé de la, ruine totale par une nouvelle guerre, nous dressons le seul étendard libérateur, celui des ÉTATS-UNIS DES OUVRIERS ET PAYSANS D'EUROPE, CELUI DE LA FÉDÉRA­TION FRATERNELLE DES ÉTATS SOVIÉTIQUES !

XIII : Pour la défense de l’Union Soviétique

Le premier pas dans ce sens réside pour chaque prolétaire dans la DÉFENSE INCONDITIONNÉE DE L'UNION SOVIÉTIQUE où la révolution d'Octobre 1917 a créé les prémisses grandioses de la première expérience de dictature prolétarienne fondée sur l'abolition de la propriété privée des grands moyens de production.

La lutte contre l'Union Soviétique reste toujours un objectif fondamental de la réaction impérialiste mondiale.

Les travailleurs de France lutteront pour la défense de l'Union Soviétique en démasquant les plans « pacifistes » de la bourgeoisie. Ce ne sont pas les pactes et les traités qui défendront efficacement le prolétariat soviétique c'est la lutte révolutionnaire pour le renversement de la bourgeoisie dans les autres pays.

C'est la coopération économique contrôlée par les travailleurs, c'est ensuite l'union des républiques socialistes de France et de Russie qui élargiront la solidarité prolétarienne internationale et non les arrangements avec Barthou, Tardieu, Herriot et leur séquelle impérialiste.


Seules ces grandes mesures peuvent sauver les masses de la déchéance, et les conduire vers le Socialisme. Dès aujourd’hui, les différentes catégories de travailleurs lutteront énergiquement pour leur réalisation.

Mais ce n’est pas par l’action individuelle, ce n’est pas par l’action de tel ou tel groupement, qu’elles pourront être mises en application. C’est le pouvoir d’État qui est le gouvernail de l’économie, de la politique et de la culture de tout le pays. Qui tient dans ses mains le gouvernail ? Toute la question est là !

XIV : Á bas « l'État fort » bourgeois ! Pour le pouvoir ouvrier et paysan !

La bourgeoisie commence à réaliser son plan de transformation du pouvoir d'État, afin d'éliminer la résistance des travailleurs : amoindrissement des droits des institutions démocratiques élues (parlement et communes), et même suppression complète de celles‑ci, car la pression prolétarienne s'y fait sentir, même d'une façon déformée.

La bourgeoisie veut concentrer le pouvoir exécutif entre les mains de quelques hommes imposant leurs décisions au moyen d'un appareil administratif, militaire et policier, brutal, incontrôlé et coûteux.

Ce plan bourgeois d'État fort, dirigé contre les exploités, doit être impitoyablement battu en brèche par les masses travailleuses. Ce sont les masses laborieuses seules qui, prenant leur sort dans leurs propres mains, peuvent dans un puissant élan révolutionnaire, avec une énergie farouche, et une volonté de fer, créer le pouvoir fort nécessaire pour sauver la Société de l'oligarchie capitaliste qui la pourrit et la conduit à la ruine.

Il s'agit de remplacer l'ÉTAT CAPITALISTE , fonctionnant au profit des grands possédants, par l' ÉTAT PROLETARIEN , ouvrier et paysan. Il s'agit d'imposer dans ce pays la domination du peuple travailleur. A tous nous déclarons qu'il ne peut s'agir là d'une « modification » secondaire, mais qu'il s'agit du remplacement de la domination de la classe bourgeoise, petite minorité, par la direction et le pouvoir de l'immense majorité des travailleurs.

L'ENTENTE DES PAYSANS ET DES OUVRIERS EST NÉCESSAIRE POUR CELA. La réaction veut effrayer les paysans par le spectre de la dictature du prolétariat en assimilant celle-ci à l'assujettissement des paysans aux ouvriers. Mais en réalité l'État prolétarien ne peut être réalisé tant que le prolétariat reste passif et divisé et isolé, par sa faiblesse, de la classe paysanne.

L'exemple de la révolution d'Octobre, de la Russie Soviétique doit nous servir. En France nous pourrons faire mieux que nos frères russes, et éviter certaines de leurs erreurs. Le niveau économique de la France est plus élevé, et nous voulons agir en conformité avec les conditions réelles de notre pays. C'est sous la forme d'une entente étroite et sur la base d'un programme clair et précis entre le prolétariat et les paysans exploités que peut être réalisée en France la dictature prolétarienne.

La paysannerie est éparpillée. C'est une des raisons de son impuissance politique, malgré son nombre et son importance dans la production. Les paysans ne peuvent accéder au pouvoir autrement qu'en faisant cause commune avec les ouvriers contre la bourgeoisie.

XV : La lutte pour la Commune ouvrière et paysanne

L'entente de la paysannerie et de la classe ouvrière ne s'obtiendra que si la classe ouvrière montre à l'ensemble du pays travailleur sa force, son initiative décidée, et sa capacité de réaliser ce programme. C'EST POURQUOI IL FAUT AVANT TOUT CRÉER LES CONDITIONS POUR L'UNITÉ D'ACTION.

L'ALLIANCE OUVRIERE DES PARTIS ET SYNDICATS OUVRIERS sans intermédiaires, indépendamment de leurs tendances, et ayant pour but la coordination à chaque instant de la résistance de la classe ouvrière à l'offensive de la réaction, par la défense des positions et des droits acquis du prolétariat, doit se constituer sans tarder du haut en bas, et englober toutes les forces des travailleurs, sans exception.

UN COMITÉ NATIONAL DE L'ALLIANCE OUVRIÈRE , des COMITÉS REGIONAUX , des COMITÉS LOCAUX où les organisations existantes collaboreraient pour y assurer la représentation de toutes les couches ouvrières sur le lieu du travail, qui est le terrain le plus solide de la résistance ouvrière, seraient organisées. Création de comités d'entreprises, de comités de caserne, élus par tous les travailleurs.

L'impulsion donnée par ces Comités d'Alliance ouvrière, leur autorité auprès des masses, incitera les couches travailleuses des campagnes à s'organiser dans des COMITÉS PAYSANS .

Dans la lutte contre le fascisme, la réaction et la guerre, le prolétariat accepte l'aide des groupements petits‑bourgeois (pacifistes, Ligue des Droits de l'Homme, Front Commun, etc ... ), mais des ententes pareilles ne peuvent avoir qu'une importance secondaire. Il s'agit avant tout d'assurer l'unité d'action de la classe ouvrière elle-même dans les usines et les quartiers ouvriers des centres industriels. L'entente entre les importantes organisations ouvrières (P.C., P.S., C.G.T., C.G.T.U., L.C.), n'aurait de valeur révolutionnaire que si elle est orientée vers la création :

  1. De comités de lutte représentant la masse elle‑même (embryons de Soviets) ;
  2.  

  3. de la milice ouvrière, toujours unie dans l'action, même si elle est organisée par des partis et organisations différents.
  4.  

Pour renforcer la lutte des uns et des autres, des comités ouvriers établiraient une étroite liaison avec les comités paysans. Constitués comme organes de défense commune contre le fascisme, ces Comités d'Alliance ouvrière et ces Comités paysans se transformeraient dans le cours de la lutte en organismes directement élus par la masse, en organes du pouvoir des ouvriers et des paysans.

C'est sur cette base que s'édifiera le pouvoir prolétarien opposé au pouvoir capitaliste, ET QUE TRIOMPHERA LA COMMUNE OUVRIÈRE ET PAYSANNE !

XVI : Pour une Assemblée unique

Nous sommes donc fermement partisans d'un État ouvrier et paysan qui élimine du pouvoir des exploiteurs, les oppresseurs, les magnats du féodalisme moderne. L'État qui ne s'appuie que sur les masses travailleuses des villes et de la campagne et qui in­carne leur volonté d'affranchissement, ne peut être réalisé que par la volonté de la majorité du prolétariat. Gagner la majorité de nos frères de classe à ce programme est notre but suprême.

Cependant tant que la majorité de la classe ouvrière reste sur la base de la démocratie bourgeoise, nous sommes prêts à la défendre de toutes nos forces contre les attaques violentes de la bourgeoisie bonapartiste et fasciste.

Mais nous exigeons de nos frères de classe qui se réclament du socialisme « démocratique » qu'ils soient fidèles à eux-mêmes, qu'ils s'inspirent des idées et des méthodes non de la Troisième République, mais de la Convention. A bas le Sénat, Chambre élue au suffrage restreint et qui rend illusoire les pouvoirs du suffrage universel !

A bas la Présidence de la République qui sert de point de concentration occulte à toutes les forces du milita­risme et de la réaction !

UNE ASSEMBLÉE UNIQUE doit concentrer le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Les membres en seraient élus pour deux ans, au suffrage universel depuis l'âge de dix-huit ans, sans distinction de sexe ni de nationalité. Les députés seraient élus sur la base d'assemblées locales, constamment révocables par leurs mandants et recevraient pendant le temps de leur mandat le traitement d'un ouvrier qualifié.

Telle est la seule mesure qui entraînerait les masses en avant au lieu de les repousser en arrière. Une dé­mocratie plus large faciliterait la lutte pour le pouvoir ouvrier.

Si, au cours d'une lutte implacable contre l'ennemi de classe, le parti du socialisme « démocratique » (S.F.I.O.), dont nous séparent des oppositions irréductibles de doctrine et de mé­thode, regagnait la confiance de la majorité, nous sommes et serions toujours prêts à défendre l'action de dé­fense prolétarienne d'un gouverne­ment socialiste contre la bourgeoisie.

Nous voulons atteindre nos buts non par des conflits armés entre les différentes couches de travailleurs, mais par la vraie démocratie ouvriè­re, par la propagande et la critique loyale, par le regroupement volontaire de la grande majorité du prolétariat sous le drapeau du communisme inté­gral.

Les ouvriers se réclamant du socialisme démocratique, doivent en plus comprendre qu'il ne suffit plus de dé­fendre la démocratie, mais qu'il s'agit de la reconquérir. Le déplacement du centre de gravité politique du parle­ment vers le gouvernement, du gouvernement vers l'oligarchie du capital financier, des généraux, des policiers est un fait accompli. Ni le parlement actuel, ni de nouvelles élections ne peuvent rien en changer. On ne peut défendre les pauvres restes de la dé­mocratie, et d'autant plus élargir l'arè­ne démocratique pour l'activité des masses qu'en détruisant, qu'en anéan­tissant les forces fascistes armées qui ont déplacé l'axe de l'État le 6 février 1934 et qui continuent de le déplacer.

XVII : La bourgeoisie ne s'inclinera jamais de bon gré

La bourgeoisie ne consentira jamais de bon gré aux mesures qui peuvent sortir la société du bourbier. Elle veut consacrer tous ses privilèges, et, pour les défendre, elle commence à employer les bandes fascistes contre les exploités qui veulent agir, comme elle use de violence contre les tra­vailleurs qui manifestent pour leurs salaires, leurs traitements, leurs pen­sions, qui font grève pour défendre leurs conditions d'existence.

Désormais, la question de la répar­tition des charges, la bourgeoisie n'aura plus la force de la résoudre à son profit autrement que par les armes. Les exploités doivent donc se défen­dre.

Or, tandis que les bandes réactionnaires s'organisent militairement et s'arment, la classe ouvrière ne dispose pas encore pour sa défense d'organisations entraînées pour le combat. Persister dans cet état ce serait vouer le nombre à succomber devant l'organisation. Si le peuple reste désarmé, les exploiteurs aux abois lui imposeront leur plan par phases successives.

Notre mot d'ordre n'est pas le désarmement des bandes du capital financier par la police du capital financier. Nous nous refusons à semer l'illusion criminelle qu'un gouvernement capitaliste puisse réellement procéder au désarmement des bandes du capitalisme. Les exploités doivent se défendre contre les fascistes. Notre mot d'ordre est :

ARMEMENT DU PROLÉTARIAT ; ARMEMENT DES PAYSANS PAUVRES !

MILICE ANTIFASCISTE DU PEUPLE !

C'est seulement si les travailleurs sont armés et qu'ils entraînent la masse que les exploiteurs qui ne sont qu'une infime minorité, reculeront devant le déclenchement de la guerre civile et que les bandes fascistes et réactionnaires perdront de leur audace.

C'est seulement si les travailleurs montrent une telle disposition dans le combat que la plus grande partie des soldats et des marins, enfants du peuple travailleur à qui notre propagande doit inlassablement rappeler leurs origines et leur devoir de classe, seront gagnés à la cause des travailleurs et dans les luttes décisives vers lesquelles nous allons, prendront fait et cause pour la masse des ouvriers contre les officiers réactionnaires et fascistes qui voudraient les employer contre leur classe.

XVIII : La seule voie de salut

La tâche est énorme, mais c'est la seule voie de salut ! La Ligue Communiste montre et éclaire cette voie.

Les vieux partis se réclamant du prolétariat se sont révélés incapables non seulement de résoudre cette tâche, mais même de la poser d'une manière juste. Le prolétariat mondial vient d'en payer chèrement l'enseignement dans l'expérience allemande.

La social‑démocratie reste par ses cadres et son programme attachée à la démocratie bourgeoise qu'elle n'a cessé de défendre depuis 1914, bien qu'à présent un large courant de ses membres essaye de l'entraîner vers la voie révolutionnaire. Le Parti « Communiste », sous son radicalisme verbal, est dominé par l'opportunisme bureaucratique.

Les événements de février ont clairement, démontré que notre organisation avait vu juste, prévu les événements, et préconisé les solutions adéquates. La pression des masses s'est exercé à ce moment exactement dans le sens prévu par notre Ligue, qui se tenait à l'avant‑garde.

Cette expérience fondamentale nous a plus profondément convaincu encore de la nécessité du regroupement radical de l'avant‑garde prolétarienne dans le nouveau parti, sur les bases de Marx et d'Engels , de Lénine et de Trotsky ; la création du Parti dépend elle­-même de la création de la nouvelle internationale, la quatrième, celle de la victoire mondiale du prolétariat.

C'est sur ce plan que nous appelons les travailleurs avancés à venir rejoindre nos rangs.

Les divisions des partis ont des raisons historiques : l'hétérogénéité du prolétariat, la conscience plus ou moins avancée de ses différentes couches, l'échec ou les victoires des organisations, liées à la situation objective. Pour la victoire, l'arme d'un nouveau parti est indispensable.

Mais cela n'exclut pas l'action et même l'organisation commune de l'action. Au contraire, cela l'impose.

En ce qui concerne les syndicats, la base de leur action est la défense des besoins immédiats des travailleurs, sans distinction de tendance politique : par conséquent, ils doivent être unifiés sur tout le territoire, et fusionnés en une seule centrale.

C'est pourquoi nous sommes prêts à collaborer avec toutes les organisations ouvrières. Dans ce programme d'action, où sont concentrées nos propositions sur les sujets les plus brûlants de la lutte, la Ligue Communiste exprime les besoins de toute la masse exploitée tels que les formule son avant‑garde. Mais elle est prête à discuter toutes les autres propositions orientées dans le même sens.

Ce qu'il faut créer sans délai, c'est le terrain sur lequel toutes les organisations ouvrières puissent se rencontrer pour discuter, décider et agir en commun. Ce terrain, matérialisant le front unique, c'est l'ALLIANCE OUVRIÈRE.

OUVRIERS, PAYSANS, FONCTIONNAIRES, PETITS COMMERÇANTS, EXPLOITÉS DE TOUTES CONDITIONS,

La société, qui ne subsiste que par votre travail, se décompose parce que la bourgeoisie dominante ne veut céder aucun de ses privilèges odieux.

Pour les conserver, la bourgeoisie dresse des bandes menaçant votre existence.

Le 12 février, vous avez manifesté votre puissance et votre volonté de ne pas subir sa violence. Mais dans cette journée vos dirigeants vous ont dupés : aucun mot d'ordre concret, aucune perspective sérieuse de lutte ne vous a été tracée par eux. Pour réaliser votre force, pour défendre votre droit à l'existence, pour ne plus travailler et enrichir une minorité d'exploiteurs sans vergogne, préparez votre révolu­tion, joignez‑vous à l'action de la Ligne Communiste.

Juin 1934


Note

[*] L'édition en langue anglaise des " Writings of Leon Trotsky " comprend ce texte, accompagné de la note ci-dessous. (Voir aussi : "Pour un programme d'action" Léon Trotsky, printemps 1934.)

Première publication : La Vérité, juin 1934. La Vérité était le journal de la Ligue Communiste de France, section de la LCI. Les idées principales de ce document, publié au nom de la Ligue, venaient de Trotsky qui en dicta des passages à ses secrétaires durant les semaines agitées où il essayait de trouver un endroit pour vivre, et le tout étant relu par lui. Ce programme était une réponse à la situation pré-révolutionnaire qui se développait après le 6 février 1934 , où eut lieu devant la Chambre des députés une manifestation armée des groupes fascistes et réactionnaires contre le gouvernement Daladier. Les ouvriers français répondirent le 12 février par une journée de grève générale et des manifestations dans tout le pays. La situation politique française se polarisa rapidement et le gouvernement vira plus à droite, Doumergue remplaçant Daladier comme premier ministre et promettant de diriger un gouvernement " fort ". L'idée d'un front uni contre le fascisme, qui était depuis quelques temps un point fort de l'agitation de la Ligue Communiste, commença a être reprise dans les partis ouvriers de masse et les syndicats. " Un programme d'action " était destiné à fournir le contenu politique et les buts du futur front uni. Ce texte peut aussi être lu comme une première version du " Programme de Transition " adopté par la conférence de fondation de la Quatrième Internationale en 1938, bien que ce dernier présente naturellement un point de vue international non limité à un seul pays.


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