1918

« Le programme du parti communiste n'est pas seulement le programme de la libération du prolétariat d'un pays. C'est le programme de la libération du prolétariat du monde entier. Car c'est le programme de la révolution internationale. »

N.I. Boukharine

Le programme des Communistes (Bolcheviks)

XVI. Aucune relation commerciale entre les bourgeois et les impérialistes étrangers (Nationalisation du commerce extérieur)

Chaque pays vit au milieu d’autres pays et dépend deux extraordinairement. Il est très difficile de vivre sans les échanges commerciaux internationaux : Un pays produit davantage d'une certaine marchandise, un autre d’une autre, L'Allemagne bloquée, apprend à ses propres dépens combien il est difficile de vivre sans importations des autres pays. Mais si l'on avait entouré l'Angleterre, par exemple, d’un cercle aussi étroit, il y a longtemps qu'elle serait perdue, L’industrie russe nationalisée par la classe ouvrière ne peut vivre non plus sans recevoir quelques marchandises de l’extérieur. D’un autre côté, l’étranger, en particulier l'Allemagne, a un extraordinaire besoin de matières premières. Nous ne devons pas oublier un instant que nous vivons au sein des empires pillards du capital, il n'y a donc rien d'étonnant que ces empires pillards s'efforcent d'obtenir tout ce qui leur est nécessaire par leurs moyens de voleurs. D'autre part, la bourgeoisie russe qui rencontre tant d’entraves en Russie serait, trop heureuse d'entrer en relations avec les impérialistes étrangers. Il n'y a pas de doute que les bourgeois étrangers pourraient payer les spéculateurs russes encore plus cher que nos bourgeois indigènes, patriotes et bien Russes. Le spéculateur ravitaille ceux qui payent le plus. Il est naturel que ce ne serait pas le salut de la république socialiste des soviets de laisser à nos bourgeois la liberté d'exporter toutes les marchandises à l'étranger et de laisser aux pillards étrangers la liberté d'arranger ici à volonté leurs chères affaires.

Autrefois, quand on parlait de la question du commerce extérieur, on discutait pour savoir s'il était utile de frapper les marchandises étrangères d'un fort droit de douane ou si l'on devait au contraire complètement abolir ces taxes. Dans les dernières années du régime capitaliste, les industriels ont mené avec ardeur une politique protectionniste. Les syndicats capitalistes en reçurent un plus grand bénéfice : A l’intérieur du pays ils avaient le monopole du marché, ils n'avaient point de concurrents, les murailles douanières barraient la voie aux étrangers. A l'aide des hauts tarifs douaniers les syndicats, les gros requins du capital, pillèrent leurs compatriotes sans aucune vergogne. Ils allèrent si loin, en exploitant ce droit de piller leurs concitoyens, qu'ils commencèrent à exporter les marchandises à de très bas prix à l’étranger dans le seul but de débusquer leurs concurrents, les syndicats étrangers. On comprend que ces bas prix n'existaient que pendant un moment. Dès que les concurrents étaient chassés, les prix commençaient à monter aussi sur le marché nouvellement conquis. Pour employer une telle tactique, ils avaient précisément besoin des droits de douane. Lorsqu'ils parlaient de la protection de l'industrie, les syndicats réclamaient en réalité un moyen d'attaque, un moyen de conquête économique de marchés étrangers. Comme il arrive dans tous ces cas, les trompeurs professionnels du peuple se drapèrent dans des phrases sur la protection des soi-disants intérêts du peuple. Quelques socialistes, voyant cela, élevèrent le mot d'ordre du libre commerce des peuples. Cela signifiait que tout serait laissé à la lutte économique libre des diverses bourgeoisies. Mais ce mot d’ordre reposait sur le vide parce qu'il ne rimait à rien. Quel syndicat renonce au profit ? S'il retire ce profit à l’aide des hauts tarifs douaniers qui le préservent de la concurrence étrangère, comment ce syndicat renoncerait-il à ces tarifs douaniers ? On doit d’abord renverser ce syndicat ; il faut d'abord la révolution socialiste, — c'est ainsi que répondent à cette question les vrais socialistes, — dans notre langue, les communistes bolcheviks. La révolution socialiste est l'établissement d’un régime où tout est aux mains de la classe ouvrière organisée en un État. Nous avons vu le dommage qu'a causé le commerce privé à l'intérieur du pays. Le commerce libre avec les autres pays ne cause pas un moindre dommage. Ce serait un non-sens de rétablir le commerce extérieur après avoir détruit le commerce libre à l'intérieur du pays. Du point de vue de la classe ouvrière, le système de l'imposition des capitalistes étrangers est une même absurdité. Il y a une troisième issue ; cette issue consiste dans la nationalisation du commerce extérieur par l’État prolétarien.

Qu’est-ce que cela signifie ? Personne, qui vit en Russie, n’a le droit de conclure des affaires avec les capitalistes étrangers. Si quelqu’un est attrapé, il peut s’attendre à une peine ou à la prison. L'État ouvrier et paysan dirige tout le commerce extérieur. Il conclut tous les contrats d'après les besoins. On offre par exemple des machines américaines en échange d’une marchandise ou d’une certaine somme d'argent, mais les Allemands offrent les mêmes machines pour un autre prix et sous d'autres conditions. Les organisations ouvrières (le gouvernement, les conseils) examinent si l’on doit faire cet achat et chez qui il est le plus avantageux de le faire. On achète où c’est le plus avantageux. La population reçoit les produits achetés sans qu'on ait gagné sur l’opération. Car ce ne sont pas les capitalistes qui dépouillent la classe ouvrière qui ont conclu l'affaire, mais les ouvriers eux-mêmes. De cette manière, la domination du capital est aussi chassée de cette redoute. Les ouvriers doivent prendre en mains le commerce extérieur (ils le font et l’ont déjà fait) et l’organiser de façon qu'aucun spéculateur, qu’aucun maraudeur ne puisse échapper aux patrouilles ouvrières.

Il est compréhensible qu’un tribunal sans pitié doive être institué contre les capitalistes et les contrebandiers. Il faut une fois pour toutes les déshabituer de tout escamotage. Lu vie économique est maintenant l'œuvre des niasses ouvrières Ce n’est qu’en fortifiant davantage un tel régime que la classe ouvrière pourra finalement se libérer de tous les usages du satané régime capitaliste.

Archives Boukharine
Sommaire Sommaire Haut Sommaire Suite Fin
Archives Internet des marxistes