1919

Source : numéro 5 du Bulletin communiste (première année), 15 avril 1920.


L'autocratie du prolétariat à la fabrique

Lev Natanovitch Kritzman



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Bien que l'atmosphère en Europe comme en Amérique soit imprégnée depuis près d'un siècle déjà des idées de liberté, de constitution, de république et de souveraineté du peuple, il existe pourtant un domaine où personne n'avait encore l'audace de rêver à la liberté ou à la souveraineté du peuple, où l'on n'aurait pu faire la plus timide allusion à la Constitution et où le seigneur et maître exerçait une autocratie complète. Ce domaine est celui dont Marx disait il y a un demi-siècle : « Il existe des endroits soigneusement cachés à tout œil étranger, au seuil desquels le visiteur se heurte à l'écriteau : « Défense d'entrer... » ce sont les fabriques, les usines, les mines, tous lieux où le capital croît et se multiplie merveilleusement, vivant de la force ouvrière. »1 C'est ici le sanctuaire même du capitalisme.

Défendant jalousement leurs droits sacrés, les capitalistes se refusèrent longtemps à toute intervention constitutionnelle même de la part du gouvernement capitaliste (leur commis) qui craignait à juste titre que le culte effrayé du bénéfice, auquel se livraient les capitalistes, ne les entraînât à épuiser prématurément la malheureuse victime de cette passion — l'énergie ouvrière — poule aux œufs d'or, dont la disparition arrêterait la merveilleuse croissance du capital.

Cette résistance fut la cause des difficultés que rencontra partout la législation industrielle qui d'ailleurs ne fut jamais appliquée intégralement.

Ne perdons cependant pas de vue que messieurs les capitalistes permettaient tout de même quelques licences à leurs gouvernements ; mais il suffisait qu'une organisation ouvrière, fût-elle la plus raisonnable et la plus inoffensive des trade-unions — se permît de soulever la question d'une constitution industrielle aussi médiocre que ce fût pour que le capital se levât sur ses ergots, écumant de rage devant cet attentat à ses « droits naturels », devant ce crime de lèse-majesté.

Il ne voulait entendre parler d'aucune concession dans ce domaine.

Lorsque l'aveugle enthousiasme des capitalistes devant l'accroissement monstrueux de leurs bénéfices au moment de la catastrophe mondiale de 1914-1918 amena dans la chaîne de l'exploitation capitaliste cruellement rivée à la chair vive du monde, la rupture soudaine de son plus faible anneau — la Russie, le pouvoir capitaliste vacillant du gouvernement provisoire russe qui pendant huit mois avait dansé sur le sol mouvant de la révolution prolétarienne unit tous ses efforts pour garantir la sécurité du sanctuaire capitaliste.

A l'exigence d'un contrôle ouvrier exprimant de la part du prolétariat encore insuffisamment affermi dans son pouvoir le désir d'établir une constitution industrielle qui en réalité lui aurait seulement octroyé le droit de contrôle, le gouvernement de la coalition « socialiste » devenu le défenseur du capitalisme et des capitalistes et l'ennemi du socialisme, répondit par une féroce attaque contre la classe ouvrière et par une campagne provocatrice contre les bolcheviks, parti de l'avant-garde prolétarienne.

Le mot d'ordre de contrôle ouvrier avait été lancé comme mesure de défense du prolétariat, car MM. les capitalistes comptaient étouffer « par la main décharnée de la famine » selon l'expression d'un de leurs leaders, M. Riabouchinsky2, la tendance de plus en plus déterminée du prolétariat à s'emparer du pouvoir. Ils entreprenaient dans ce but toutes les mesures en leur pouvoir pour arriver à l'arrêt des entreprises créant artificiellement des crises de combustible et de matières premières, négligeant les réparations indispensables du matériel, etc... Mais à mesure que la nécessité d'un contrôle qui n'aurait pas admis le sabotage de la production, devenait de plus en plus pressante pour le prolétariat, le capital multipliait ses efforts pour la défense de son autocratie à la fabrique.

Ce n'est qu'après l'éclatante rupture de la chaîne capitaliste et lorsque le prolétariat s'empara du pouvoir politique que fut enfin tranché le nœud gordien du sabotage et renversée l'autocratie du capital à la fabrique. Mais le prolétariat vainqueur ne pouvait se contenter de la modeste exigence d'une constitution industrielle : la pratique de la vie elle-même avait clairement prouvé que le capitaliste ne voulait ni ne pouvait être un monarque constitutionnel et que, contrairement à toutes ses assurances, il ne cesse d'ourdir quelque trahison et de chercher quelque moyen pour continuer le sabotage ; qu'il n'est point du tout enclin à enseigner aux ouvriers l'art de diriger une entreprise, ainsi que se l'imaginaient les naïfs partisans du contrôle ouvrier après la révolution d'octobre et enfin qu'il est d'autant plus disposé à berner les autres qu'il l'est moins à se laisser berner lui-même. Et au lieu d'une constitution, ce fut l'autocratie du peuple qui s'établit à la fabrique, au lieu d'un contrôle ouvrier, une direction ouvrière.

Ce passage de l'autocratie du capital à l'autocratie du prolétariat à la fabrique représenta un fait historique grandiose — car c'est cette période qui incarne l'essence même de la révolution sociale du prolétariat. Il ne pouvait évidemment se faire en un jour, comme par enchantement, au moyen d'un décret du pouvoir soviétiste ; il fut réalisé dans ses grandes lignes dans l'espace d'une année. Cette réalisation fut possible grâce à l'existence dans un pays capitaliste aussi arriéré que la Russie d'une grosse industrie capitaliste suffisamment concentrée et réalisée, couronnée par l'appareil central de plusieurs banques importantes.

Bien que les directions d'entreprises fussent très lentes à se débarrasser des représentants isolés du capitalisme et des agents parfois secrets du capital, embusqués dans l'ancienne administration capitaliste, restée fidèle à son maître, bien que la composition de cette dernière ne devint purement ouvrière que peu à peu, ce fut bien dès le début et même dans les entreprises n'ayant formellement qu'un contrôle ouvrier, qu'une direction ouvrière s'établit à la fabrique.

Avant la révolution encore de nombreux syndicats patronaux existaient en Russie et une notable partie de l'industrie était unie par lies banques.

Il va de soi que l'autocratie du capital fut remplacée par celle du prolétariat dans les syndicats et dans les banques bien avant de l'être dans les fabriques et les usines et que le processus de la concentration industrielle reçût un développement et une profondeur sans exemple dans le monde.

Pour estimer à leur juste valeur les résultats de l'activité économique du prolétariat au pouvoir, il est indispensable de prendre avant tout en considération les conditions infiniment difficiles dans lesquelles elle dut s'exercer.

Le premier obstacle était dû au caractère môme de la révolution. L'industrie et toute la vie économique en général ne peuvent exister et se développer que lorsqu'elles sont systématiquement organisées et possèdent une direction régulièrement établie, autrement dit lorsque des relations productives déterminées y sont établies. Pendant la réorganisation de la direction, qui de capitaliste qu'elle était se transforme peu à peu en direction ouvrière, toute l'activité productrice traverse une période d'arrêt qui dure jusqu'au moment où la nouvelle direction ouvrière arrive à se mettre suffisamment au courant de ses fonctions.

Le deuxième obstacle avait pour cause l'état particulièrement arriéré de la Russie en tant que pays capitaliste.

Bien que la grosse industrie capitaliste concentrée ait joué en Russie sans contredit un rôle dominant dans le domaine économique, la majorité écrasante de la population, par suite du développement insuffisant du capitalisme, se composait de paysans dont une partie importante était à demi prolétaire et indigente ; ces classes paysannes soutinrent le prolétariat dans sa lutte pour le pouvoir, dans l'espoir de s'emparer des terres et de détruire à jamais les servitudes féodales.

Cette masse paysanne dans laquelle s'éveille par moments un instinct prolétarien ou révolutionnaire et à d'autres l'instinct du petit propriétaire, de l'agrarien et du marchand, unie à la petite bourgeoisie des villes (artisans et commerçants) qui se rapproche beaucoup de la première en tant que classe, compliquent excessivement par leurs vacillations et leur instinct de propriété désordonné et réfractaire aux idées du communisme, la réalisation d'une organisation communiste dans le domaine économique et par cela même toute l'activité économique du pouvoir soviétiste.

Le troisième obstacle est représenté par le caractère universel de la révolution prolétarienne russe, Etant elle-même le résultat d'une catastrophe mondiale — la guerre entre les titans impérialistes — notre révolution menace d'allumer l'incendie de la révolution sociale prolétarienne dans le monde entier et de transformer la guerre mondiale impérialiste en une guerre de classes. Pour cette raison la république prolétarienne des soviets a sans cesse été en butte tantôt aux attaques des puissances impérialistes (de l'Allemagne en 1918, de l'Angleterre, de la France et des autres en 1919), tantôt à celles des mercenaires russes ou étrangers organisés, soutenus et subsidiés par ces mêmes puissances impérialistes (Tchécoslovaques, Serbes, Grecs, Koltchak, Dénikine, Lianosoff, Tchaïkovsky, etc.). Grâce à ce concours des forbans impérialistes, la guerre civile traîne en longueur, la bourgeoisie russe ruinée par le prolétariat reçoit les moyens de se réorganiser et de lutter pour le rétablissement du droit sacré d'exploiter le prolétariat. Grâce à cette circonstance la production de la Russie soviétiste qui se trouve sous la direction ouvrière se trouve isolée des sources de combustible (de charbon : le bassin du Don a été occupé par les Allemands ; de pétrole : Bakou a été occupé par les Allemands, puis par les Anglais), de celles de matières premières (de l'étoupe : le Turkestan a été occupé par les Tchécoslovaques, puis par Koltchak ; de minerai : Krivoï Rog a été occupé par les Allemands puis par Dénikine ; l'Oural — par les Tchécoslovaques ; puis par Koltchak), de celles des produits alimentaires (l'Ukraine et le Caucase septentrional, occupés d'abord par les Allemands, puis par Dénikine ; la région du Volga, l'Oural et la Sibérie, occupés d'abord par les Tchécoslovaques, puis par Koltchak). Enfin un blocus bien que non déclaré officiellement, mais sévèrement organisé par les puissances impérialistes de l'Entente, sépare la république des soviets des sources où elle aurait pu renouveler son outillage très détérioré pendant la guerre et dont le renouvellement est absolument indispensable à l'industrie comme à l'agriculture.

Malgré toutes ces difficultés, la direction ouvrière de l'économie, dans un pays arriéré, ruiné et serré dans l'étau puissant d'un impitoyable blocus, continue, tenant le marteau d'une main et le fusil de l'autre, à lutter voilà déjà près de deux ans pour la réalisation de la révolution sociale universelle, marchant en tête du prolétariat du monde entier et défendant ses positions contre un ennemi qui semblait et semble encore pour certains esprits tout-puissant. Cette force de résistance colossale et que personne n'aurait pu prévoir, la république prolétarienne la doit à son désir inné de sauver de la décomposition les forces vives du travail. La force humaine est une des plus grandes forces productrices de la société. Le capital en général et tout capitaliste en particulier se conduisait dans le domaine économique à l'égard de la force ouvrière en exploiteur invétéré. De toutes les forces productrices de la société seule la main-d'œuvre appartenait au prolétariat. Les capitalistes ne jouissaient que du droit de l'exploiter, droit basé sur la nécessité où se trouvait le prolétaire de vendre sa capacité de travail à quiconque était en état de le rétribuer. Les capitalistes n'étaient donc pas directement intéressés à son accroissement. Il en résultait que la main-d'œuvre était continuellement soumise à l'action des facteurs de destruction : en temps ordinaire la longueur excessive de la journée de travail et d'intensité du travail. Dans les périodes de grands développements industriel (et de guerre) la force ouvrière de même que les instruments de production était vouée à une usure rapide par suite de l'intensification fiévreuse du travail ; pendant les crises c'est la faim provoquée par le chômage et la baisse des salaires qui était d'un effet destructif pour la force ouvrière.

La direction ouvrière fut la première à prophétiser et à poursuivre dans la fabrique la politique de la conservation de la force ouvrière, la tenant pour une des conditions essentielles de l'activité productive ininterrompue de la société ; seule elle remisa enfin le programme minimum de la social-démocratie 'dans le domaine politique.

Bien plus, le pouvoir ouvrier, au nom de la conservation du prolétariat ne se contente pas de donner à l'ouvrier une ration alimentaire plusieurs fois supérieure (de 2 à 4 fois) à celle des représentants de la bourgeoisie ne travaillant point ; elle confisque même à la bourgeoisie en cas de besoin les objets de première nécessité, les logements y compris pour les remettre au prolétariat. Ce que les ennemis du pouvoir ouvrier appellent le communisme de consommation n'est donc autre chose que la politique de conservation de la force productrice fondamentale de la société de la force du prolétariat.

L'accroissement de l'armée rouge est un exemple probant du succès de la direction ouvrière. Nous soulignons ici un seul des actes de la grande œuvre historique du prolétariat russe, à savoir le ravitaillement de l'armée rouge. Elle a contre elle un adversaire entre les mains duquel se trouvent les sources de produits alimentaires, de matières premières, de combustible, un adversaire pourvu par les soins du capital mondial et l'armée rouge se trouve néanmoins aussi bien et parfois mieux pourvue que celle de l'ennemi.

Ce résultat n'a pu être atteint que grâce à une concentration rationnelle des efforts dirigés vers la résolution des problèmes les plus importants, autrement dit grâce à l'organisation solide de la vie économique. La Russie a fait dans ce domaine pendant la période de dictature prolétarienne un grand pas en avant. Il ne reste plus actuellement une seule branche d'industrie qui ne soit centralisée et qui ne se trouve aux mains d'un organe ouvrier spécial, connaissant toutes les ressources et toutes les possibilités de ses entreprises, et les dirigeant par l'entremise des directions ouvrières. Chez nous, non seulement la grosse, mais la petite industrie également et jusqu'à l'agriculture sont organisées actuellement. Un grand travail statistique est entrepris pour enregistrer toutes les forces productrices du pays. De cette manière, nous avons non seulement commencé la construction du fondement de notre future société communiste, mais nous possédons déjà les moyens d'une concentration rationnelle des efforts pour la réalisation des problèmes particulièrement urgents. Une telle organisation de l'économie nationale permet en outre à la direction ouvrière de lutter contre la baisse des forces productrices qui a commencé encore pendant la guerre ; cette lutte donne des résultats positifs, malgré la désorganisation générale provoquée par la guerre et malgré tous les obstacles presque insurmontables énumérés plus haut. Une des méthodes de la lutte contre la baisse des forces productrices est la concentration de la production ; la fermeture des petites entreprises mal organisées au point de vue technique et antihygiéniques pour la plupart. Cette méthode est appliquée avec succès par le pouvoir soviétiste presque dans toutes les branches de l'industrie. Un autre système consiste à placer les entreprises dans des conditions économiques plus favorables, c'est-à-dire à les transporter plus près des sources d'énergie — du combustible, des matières premières ; à ce point de vue, il faut souligner le transfert d'une série d'entreprises de Pétrograd, qui vivait en grande partie de charbon étranger et de matières premières du sud de la Russie, dans la Russie centrale et dans la région de l'Oural.

Un grand travail a été également accompli dans le sens de l'adaptation de la production aux nouvelles conditions dans lesquelles elle a été placée : le passage d'une grande partie des entreprises au chauffage de bois.

Dans beaucoup de fabriques et d'usines les cadres de la production ont été diminués de telle sorte que les produits se trouvent réduits à quelques types fondamentaux ; ceci a pour résultat une augmentation de la productivité du travail. Des mesures sont prises en outre pour empêcher la falsification et pour adapter la qualité du produit aux nécessités des grandes masses de la population.

Dans beaucoup de branches de l'économie nationale la centralisation du ravitaillement et l'approvisionnement en matières premières par le gouvernement sont organisés.

Les travaux de construction continuent dans des proportions plus restreintes, mais par contre sur un plan plus rationnel ; nous entendons par là la construction des voies d'approche qui faisaient presque totalement défaut jusqu'à présent. De grandes stations électriques sont également en voie de construction, pour le chauffage à la tourbe et pour l'exploitation de l'énergie fournie par les cours d'eau.

Des industries nouvelles se forment, souvent encore inconnues en Russie, parfois de peu d'importance par leurs proportions, mais toujours utiles dans l'économie du pays.

En résumé, de grands préparatifs se font pour la société de l'avenir, car l'avenir appartient au prolétariat victorieux.

Des explorations de grande envergure ont été faites dans une grande partie de la Russie ; ces explorations ont déjà donné de grands résultats et en promettent de plus grands encore dans l'avenir. Des projets de travaux grandioses ont été élaborés, des projets d'irrigation du Turkestan, de développement de la production du coton, de la construction des stations électriques pour le pays en électricité, des projets de canaux, de chemins de fer, etc. Enfin des expériences scientifiques se font sur l'application d'une série d'inventions importantes, sans compter d'autres nombreux travaux en préparation.

Des forces productrices colossales sommeillent dans le prolétariat. En plus de l'organisation rationnelle du travail social, empêchant la dépense improductive de la force ouvrière inévitable dans la désorganisation de la société capitaliste, en plus de la hausse maximum de toute l'énergie sociale atteinte par certaines des meilleures entreprises, la direction ouvrière qui réalise la synthèse de l'organisation de la production et de celle de la classe ouvrière (organisations antagonistes dans l'ancienne société), ajoute un facteur nouveau : l'enthousiasme pour le travail qui s'est manifesté avec une telle intensité aux samedis communistes — travail volontaire et gratuit accompli par les ouvriers communistes tous les samedis, après leur journée terminée ; ce travail ne s'accomplit pas pour un salaire, mais par enthousiasme devant la grande révolution prolétarienne délivrant l'humanité et la conduisant de l'empire du sang, de la boue et des larmes à celui du travail ; il se trouve être 3, 4 et 5 fois plus productif que le travail ordinaire.

Cet enthousiasme s'allumera d'une flamme encore plus éclatante lorsque cette avant-garde russe du prolétariat, encore isolée pour le moment, verra arriver à son aide d'autres détachements ; c'est alors que le prolétariat universel, serrant les rangs rompra définitivement d'un effort unanime la chaîne déjà rompue à un endroit de l'esclavage capitaliste et proclamera l'autocratie du prolétariat universel — du communisme universel.

Notes

1 Citation de mémoire, ou déformations dues à des traductions multiples, il semble que Kritzman se réfère à ce passage, Capital I, deuxième section, chapitre VI.

2 « Au congrès du commerce et de l'industrie qui réunit, au début du mois d'août, environ trois cents représentants des plus importantes organisations de Bourse et d'entreprises, le discours-programme fut prononcé par le roi du textile, Riabouchinsky, qui ne mit pas son flambeau sous le boisseau. « Le gouvernement provisoire n'avait qu'une apparence de pouvoir... En fait s'y est installée une bande de charlatans de la politique... Le gouvernement pressure d'impôts, en tout premier lieu, et rigoureusement, la classe des commerçants et des industriels... Est-il rationnel de donner de l'argent au dissipateur? Ne vaudrait-il pas mieux, pour le salut de la patrie, mettre en tutelle les gaspilleurs ?... » Et, enfin, pour conclure, cette menace : « La main squelettique de la famine et de la misère populaire saisira à la gorge les amis du peuple ! » La phrase sur la main squelettique de la famine, donnant son sens général à la politique des lock-out, s'inséra dès lors fortement dans le vocabulaire politique de la révolution. Elle coûta cher aux capitalistes. » » (Trotsky, Histoire de la révolution russe, chapitre 29).


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