1843-50

"On remarquera que, dans tous ces écrits, et notamment dans ce dernier, je ne me qualifie jamais de social-démocrate, mais de communiste... Pour Marx, comme pour moi, il est donc absolument impossible d'employer une expression aussi élastique pour désigner notre conception propre.." F. Engels, 1894.

Une publication effectuée en collaboration avec la bibliothèque de sciences sociales de l'Université de Québec.


Le parti de classe

K. Marx - F. Engels

Le parti dans la révolution (1848-1850)

Phase de la République rouge


Expulsions d'Engels et Dronke de Belgique

Cologne, 13 octobre 1848  [1].

Un ami, fort bien informé, nous écrit de Bruxelles : « Engels et Dronke ont été arrêtés et conduits à la frontière en voiture cellulaire après qu'il eurent simplement décliné leur nom. Un ouvrier de Cologne, Schmitz, qui aurait été actif lors de la libération de Wachter, a connu le même sort. En effet, la police de Bruxelles détenait une longue liste d'hommes qui s'étaient enfuis de Cologne, de sorte que la police belge était parfaitement informée de la prétendue participation de Schmitz à la libration de Wachter. »

Nous demandons au commissaire-directeur de police, M. Geiger, s'il est au courant des expédients utilisés pour confectionner cette liste noire et s'il en connaît les auteurs ?

Interventions de Marx dans la Société démocratique de Vienne

Marx estime qu’il est indifférent de savoir qui est ministre, dès lors qu'il s'agit maintenant ici — comme à Paris — de la lutte entre bourgeoisie et prolétariat [2]. Son discours était très intelligent, radical et riche d'enseignements…

Le docteur Marx parle des ouvriers, surtout allemands de l'étranger, des ateliers nationaux et de la récente révolution ouvrière de Paris. Il estime que les ouvriers allemands peuvent être fiers qu'un grand nombre de leurs compatriotes figurent parmi les déportés. Il parle ensuite des chartistes en Angleterre, et de leur dernière agitation. Avec l'Angleterre, il est possible de réaliser l'émancipation complète des ouvriers d'Europe. Il évoque ensuite la Belgique...

Le docteur Marx, rédacteur de La Nouvelle Gazette rhénane, salue la Société et affirme que c'est pour lui un honneur de parler devant une assemblée d'ouvriers à Vienne, comme il l'a fait précédemment à Paris, Londres et Bruxelles.

Procès contre « La Nouvelle Gazette rhénane »

Cologne. 5 décembre 1848  [3].

Il y a quelques jours, le rédacteur en chef de La Nouvelle Gazette rhénane, Karl Marx, était à nouveau convoqué devant le juge d'instruction. Quatre articles ont poussé le pouvoir central à une plainte en diffamation : l. Schnapphanski ; 2. un article de Breslau sur Lichnowski ; 3. un article où il est question d'un compte rendu « déformant » d'un certain « étrange citoyen » ; 4. la reproduction de la déclaration de trahison contre le peuple prise dans la salle Chez Eiser contre la majorité de Francfort dans le conflit du Schleswig-Holstein [4].

La Nouvelle Gazette rhénane attend maintenant avec nostalgie de nouvelles plaintes en diffamation en provenance de Berlin, Pétersbourg, Vienne, Bruxelles et Naples. Le 20 décembre se déroulera le premier procès de La Nouvelle Gazette rhénane contre le Parquet et la Gendarmerie.

Nous n'avons pas eu écho jusqu'ici de ce qu'un quelconque Parquet rhénan ait trouvé un quelconque article du Code pénal qui sanctionnerait les grossiers et manifestes actes d'illégalité commis par toutes les autorités rhénanes. « Il faut distinguer » est évidemment la devise favorite du Parquet de Rhénanie.

Légalité et révolution

Nous ne l'avons jamais dissimulé : le terrain sur lequel nous agissons, ce n'est pas le terrain légal, c'est le terrain révolutionnaire. Pour sa part, le gouvernement vient de renoncer à l'hypocrisie du terrain légal. Il s'est ainsi placé sur le terrain révolutionnaire, car le terrain contre-révolutionnaire est, lui aussi, révolutionnaire [5].

Aux yeux de la Couronne, la révolution de mars a été un fait brutal [6]. Un fait violent ne peut être effacé que par une autre violence. En cassant les récentes élections en vertu de la loi d'avril 1848, le ministre reniait sa propre responsabilité et cassait même le tribunal devant lequel il était responsable. La faculté d'en appeler à l'Assemblée nationale du peuple, il en faisait d'emblée une illusion, une fiction, une duperie. En inventant une première chambre basée sur le cens et faisant partie intégrante de l'Assemblée législative, le ministère déchirait ses propres lois organiques, abandonnait le terrain légal, faussait les élections populaires, déniait au peuple tout jugement sur l’« action salvatrice de la Couronne.

Ainsi donc, Messieurs, on ne saurait nier le fait, et nul historien futur ne le niera jamais : la Couronne a fait une révolution, elle a renversé la légalité existante, elle ne peut en appeler aux lois qu'elle-même a abrogées sans vergogne.

Si l'on parvient à accomplir jusqu'au bout une révolution, on peut pendre son adversaire, mais non le condamner. À titre d'ennemis vaincus, on peut les éliminer de son chemin, mais on ne peut les juger à titre de criminels [7]. En effet, une fois accomplie la révolution ou la contre-révolution, on ne peut appliquer aux défenseurs de ces lois les lois que l'on a abrogées. C'est la lâche hypocrisie de la légalité que vous, Messieurs, ne sanctionnerez point par votre verdict...

À cette occasion, Messieurs, regardons en face ce qu'est en réalité le terrain légal, comme on l'appelle. Je suis d'autant plus obligé d'insister sur ce point que nous passons — et c'est juste — pour des ennemis du terrain légal, et que les lois des 6 et 8 avril ne doivent leur existence qu'à la reconnaissance formelle du terrain légal.

La Diète représentait essentiellement la grande propriété foncière. Or, la grande propriété foncière constituait effectivement la base de la société du Moyen Âge, de la société féodale.

La société bourgeoise moderne, notre société, repose, à l'inverse, sur l'industrie et le commerce. Quant à la propriété foncière, elle a perdu toutes ses anciennes conditions d'existence et dépend désormais du commerce et de l'industrie. C'est pourquoi l'agriculture est, de nos jours, gérée industriellement, et les anciens seigneurs féodaux sont tombés au niveau des producteurs de bétail, de laine, de blé, de betteraves, d'eau-de-vie, etc., de gens qui, comme n'importe quel autre commerçant, font le trafic de ces produits industriels !

Tout attachés qu'ils restent à leurs préjugés, dans la pratique ils se transforment en bourgeois qui produisent le plus possible avec le moins de frais possible, qui achètent le meilleur marché possible pour vendre le plus cher possible. Le mode de vie, de production et de trafic de ces gens inflige donc à lui tout seul un démenti à leurs prétentions surannées pleines de superbe. Pour être l'élément social prédominant, la propriété foncière doit reposer sur le mode de production et d'échange féodal.

La Diète nationale représentait ce mode de production et d'échange féodal qui, depuis fort longtemps, avait cessé d'exister, et dont les représentants, si attachés qu'ils soient à leurs anciens privilèges, jouissent tout autant des avantages de la société nouvelle et les exploitent. Or, la nouvelle société bourgeoise, reposant sur de tout autres bases, un mode de production qui avait changé, devait s'emparer également du pouvoir politique ; elle devait nécessairement l'arracher des mains de ceux qui représentaient les intérêts de la société en voie de disparition, un pouvoir politique dont toute l'organisation était issue de conditions sociales matérielles absolument différentes. D'où la révolution.

En conséquence, la révolution était dirigée contre la monarchie absolue, synthèse politique suprême de la vieille société, aussi bien que contre la représentation selon le système des états correspondant à un ordre social mis en pièces depuis longtemps par l'industrie moderne, ou tout au plus aux vestiges prétentieux des états décomposés, dépassés chaque jour un peu plus par la société bourgeoise, et refoulés à l'arrière-plan. En vertu de quel principe la Diète nationale, représentant la vieille société, dicte-t-elle les lois à la nouvelle société qui a conquis ses droits dans la révolution ? Grâce à la prétention qu'elle affiche de défendre le terrain légal. Or, Messieurs, qu'entendez-vous donc par le maintien du terrain légal ? Le maintien de lois qui font partie d'une époque révolue de la société et ont été faites par les représentants d'intérêts sociaux disparus ou en voie de disparition, autrement dit de lois dressées par ces intérêts contre les besoins généraux actuels.

Or, la société ne repose pas sur la loi : c'est une illusion juridique. Elle doit plutôt être l'expression, opposée à l'arbitraire individuel, des intérêts et besoins communs de la société, tels qu'ils découlent du mode matériel de la production existant à chaque fois. Ainsi, le Code Napoléon que je tiens en main n'a pas engendré la société bourgeoise. La société bourgeoise, née au XVIII° et développée au XIX° siècle, trouve bien plutôt simplement une expression légale dans ce Code. Dès que celui-ci ne correspond plus aux conditions sociales, ce n'est plus qu'un chiffon de papier. Vous ne pouvez faire de vieilles lois le fondement d'une évolution sociale nouvelle, pas plus que ces vieilles lois n'ont créé les anciennes conditions sociales. Issues de ces vieilles conditions sociales, elles doivent disparaître avec elles. Elles changeront nécessairement avec les conditions d'existence changées. Vouloir maintenir les anciennes lois envers et contre les exigences et besoins nouveaux de l'évolution sociale revient, au fond, à maintenir hypocritement des intérêts particuliers inactuels contre l'intérêt général actuel.

Défendre le terrain légal, c'est chercher à faire passer ces intérêts particuliers pour les intérêts dominants, alors qu'ils ne prédominent plus ; c'est chercher à imposer à la société des lois condamnées par ses conditions d'existence, par son mode de travail et de distribution, sa production matérielle même ; c'est tenter de maintenir en fonction des législateurs qui ne poursuivent plus que des intérêts particuliers, en abusant du pouvoir politique d'État pour mettre, par la force, les intérêts de la minorité au-dessus des intérêts de la majorité. Elle se met donc, à tout instant, en contradiction avec les besoins existants, freine le commerce et l'industrie, et prépare les crises sociales qui éclatent en révolutions politiques.

Séance du comité de l'Union ouvrière du 15-1-1849

Le citoyen Anneke propose que les prochaines élections fassent l'objet de la discussion des séances suivantes [8].

Le citoyen Schapper dit que si cela s'était produit il y a environ un mois, nous aurions pu escompter sans doute de bons résultats pour notre parti à nous, mais qu'il était, hélas ! trop tard aujourd'hui pour cela, étant donné que nous n'étions pas encore organisés. Il ne sera donc pas possible à l'Union ouvrière de faire élire ses propres candidats.

Le citoyen Marx est également d'avis que l'Union ouvrière, en tant que telle, ne saurait aujourd'hui faire passer ses candidats. Quoi qu'il en soit, il ne s'agit pas pour l'heure de réaliser quoi que ce soit sur le plan des principes, mais de faire opposition au gouvernement, à l'absolutisme, au pouvoir féodal. Or, pour cela, il suffit de simples démocrates, de prétendus libéraux, qui eux non plus ne sont pas d'accord, et de loin, avec l'actuel gouvernement. Il faut bien prendre la situation telle qu'elle est. Mais comme il importe surtout maintenant de faire une opposition la plus forte possible à l'actuel système absolutiste, le simple bon sens déjà exige que l'on admette qu'il n'est pas possible de réaliser ses propres conceptions et principes lors des élections et que l'on s'accorde avec un autre parti qui fait également de l'opposition, afin que ce ne soit pas notre ennemi commun, la royauté absolue, qui triomphe.

En conséquence, on décida de participer au comité électoral général qui devait se former à Cologne après qu'eut été fait le découpage des circonscriptions électorales, afin d'y défendre le principe démocratique général.

Pour réaliser une liaison plus étroite entre les ouvriers et les démocrates 20, on nomma les citoyens Schapper et Röser qui participaient aux réunions du comité de la Société démocratique et devaient ensuite rendre compte des résultats de leur action.

Décisions de l'assemblée générale de l'Union ouvrière le 16-4-1849

L'assemblée décide à l'unanimité :

  1. de quitter la Fédération des sociétés démocratiques d'Allemagne et de s'affilier, au contraire, à la Fédération des Unions ouvrières allemandes, dont le comité central se trouve à Leipzig  [10];
  2. de charger son comité de convoquer un congrès ouvrier général à Leipzig ainsi qu'un congrès provincial detoutes les unions ouvrières de Rhénanie et de Westphalie, dans le but d'une liaison plus étroite du parti social pur ;
  3. d'envoyer une délégation au congrès des unions ouvrières d'Allemagne qui se tiendra prochainement à Leipzig.

Réunion du comité, 17-4-1849

5. À la suite de la décision de l’assemblée générale d'hier, convoquer pour le premier dimanche de mai un congrès des représentants de toutes les unions ouvrières de Rhénanie et de Westphalie [11].

Afin d'exécuter cette résolution, le comité nomme un comité de province provisoire de six membres, composé des citoyens K. Marx, W. Wolff, K. Schapper, Anneke, Esser et Otto, et charge celui-ci de lancer une invitation motivée aux unions intéressées...

Décision de la première filiale de l'Union ouvrière de Cologne [12]

Proposition

Considérant

  1. que le docteur Gottschalk, dans le journal Freiheit, Arbeit, présente le docteur Karl Marx comme un ami et un partisan du député de Francfort, Franz Raveaux, alors que, dans la réunion du comité du 8 février, le citoyen Marx a clairement expliqué que si, pour l'heure, il appuyait la candidature de Raveaux et de Schneider II, il était loin de partager leurs idées, sur le plan des principes, qu'au contraire le premier avait été attaqué sans ménagements par La Nouvelle Gazette rhénane au cours de la période de sa plus grande gloire, mais qu'en ce moment il ne pouvait être question de démocrates rouges ou rosés, étant donné qu'actuellement il s'agit essentiellement de faire opposition à la monarchie absolue et, dans ce but, de rassembler les démocrates rouges et rosés face aux braillards [13];
  2. en outre qu'à l'occasion du Congrès démocratique de Francfort le docteur Gottschalk a pris la parole pour déclarer qu'il pouvait utiliser les ouvriers de Cologne aussi bien pour une monarchie rouge que pour une république rouge, présentant donc les ouvriers comme de simples machines qui lui obéissent au doigt et à l'œil ;
  3. que, dans le journal Freiheit, Arbeit, les attaques portées contre Raveaux ont un caractère tout à fait grossier et mesquin, lui reprochant une maladie organique présentée comme manie ;
  4. que les autres attaques de ce journal ne se fondent le plus souvent sur aucun élément réel et, ne serait-ce que par leur candeur, ne méritent même pas d'être réfutées, mais n'en dénoncent pas moins la haine et la rancœur vulgaires ainsi que le caractère vil et sournois de leurs auteurs ;
  5. qu'après sa libération de prison le docteur Gottschalk a combiné un plan dirigé contre plusieurs membres de l’Union ouvrière en vue de réorganiser l'Union ouvrière et, dans ce but, s'est octroyé à lui-même le poste de président après s'être mis à la tête d'un comité de cinq membres, ce qui dénonce une mentalité despotique heurtant les principes démocratiques les plus élémentaires ;
  6. que cette nouvelle organisation tournait le dos au parti des prolétaires proprement dits pour se jeter dans les bras des petits-bourgeois, étant donné qu'il était prévu d'augmenter la cotisation mensuelle de chaque membre à 5 sous d'argent ;
  7. que le docteur Gottschalk a tenté simultanément d'opérer des changements dans le journal de l'Union, à la suite de quoi celui-ci a cessé de paraître pendant quinze jours, et qu'il n'avait pas reçu de l'Union le moindre pouvoir, ni même n'en avait simplement informé, de quelque façon que ce soit, celle-ci ou son comité. Tout cela constitue manifestement une intervention abusive dans les règles de l'Union, intervention que rien ne peut justifier et qui ne saurait être excusée par la nécessité ou des raisons urgentes, voire le départ consécutif du docteur Gottschalk ;
  8. qu'après sa libération le docteur Gottschalk, au lieu de combler les attentes des ouvriers de Cologne en continuant comme auparavant son activité dans le sens du progrès, est parti, à la stupeur générale, sans même leur adresser un seul mot d’adieu ou de remerciement pour leur persévérance et leur fidélité ;
  9. que le docteur Gottschalk, par égards exagérés pour sa propre personne, s’est exilé et a lancé une proclamation de Bruxelles qui ne pouvait être rien d'autre qu'une déclaration tentant de justifier son attitude : lui, le républicain, se référant à sa propre personne, y parle « du juge toujours suprême du pays » ou « de la voix du peuple », autrement dit il considère que le juge suprême n'est pas la voix populaire universelle, à moins que son expression de juge suprême vise le roi, ce qui le placerait directement dans le camp des légitimistes et monarchistes ; qu'en outre, dans sa déclaration il exprime son mépris pour le peuple, en supposant que celui-ci en tant que juge suprême, voix du peuple, puisse aliéner ses pouvoirs à quelqu'un qui puisse jouer le rôle mesquin de porteur d'épaulettes, alors que lui-même cherche à se ménager une issue, tant auprès du roi que du peuple ;
  10. que le docteur Gottschalk, pressé par l'Union ouvrière d'expliquer ou de commenter ce qu'il entendait par « le juge toujours suprême » dans sa prétendue déclaration, n'a pas jugé bon de lui faire la moindre réponse ;
  11. que, sans y avoir été appelé par qui que ce soit, le docteur Gottschalk est ensuite retourné en Allemagne, par quoi toute l'affaire de son expatriation a crevé comme une simple bulle et peut être considérée comme simple manœuvre électorale ratée (ses frères et ses amis ayant été très actifs pour le faire élire à Berlin).

La première filiale de l'Union ouvrière de Cologne déclare : qu'elle n'approuve en aucune façon le comportement du docteur Gottschalk après son acquittement par le tribunal des jurés de Cologne ; en outre, rejette avec fermeté et indignation la prétention émise par Gottschalk d'abuser de l'Union ouvrière dans l'intérêt de la monarchie rouge ou de se laisser fourvoyer par de sournoises attaques personnelles contre certains, ou de se laisser octroyer un président avec un comité d'hommes de paille, ou de chercher son salut dans un exil volontaire qui invoque la grâce du roi en même temps que du peuple, ou de se laisser traiter comme un gamin par un individu quel qu'il soit.

Décisions de l'assemblée générale du 23-4-1849

L'assemblée générale se réunira dorénavant chaque mercredi.

Le conseil provisoire élu par le comité en vue de la tenue d'un congrès des unions ouvrières de Rhénanie et de Westphalie à Cologne, et composé de Karl Marx, K. Schapper, W. Wolff, F. Anneke, Esser et Otto, se trouve confirmé.


Notes

[1] Cf. La Nouvelle Gazette rhénane, 14 octobre 1848.

[2] Nous extrayons ces brefs relevés des diverses interventions de Marx dans la Société démocratique de Vienne des journaux Der Radikale, 31-8-1848, Die Constitution, 1-9-1848, et Der Volksfreund, 5-9-1848 (cf. Werke, 5, p. 490-91).
Le 2 septembre 1848, Marx fit un exposé sur « Travail salarié et capital » lors de la réunion de la Première Société ouvrière de Vienne, mettant en évidence que les rapports sociaux du salariat et du capital étaient à l'origine de la révolution sociale de 1848.
Après l'échec de la révolution d'octobre à Vienne, Marx parla devant la Société ouvrière de Cologne : Marx fit un exposé sur les événements survenus à Vienne, et expliqua que si Win-dischgrätz, a réussi à conquérir Vienne, c'est à cause des multiples trahisons de la bourgeoisie de cette ville. »

[3] Cf. La. Nouvelle Gazette rhénane, 6 décembre 1848.
Cf., en outre, les articles du volume I des Éditions sociales sur les différents procès de Marx ou des membres de la commune de la Ligue communiste de Cologne : « Arrestations », p. 216, 217-220, « Information judiciaire contre La Nouvelle Gazette rhénane », p. 228-231, 255-259 : « Le Conflit entre Marx et la qualité de citoyen prussien », p. 461-464 ; volume II : « Le Procureur général Hecker et La Nouvelle Gazette rhénane », p. 75-80 ; « Le Parquet et La Nouvelle Gazette rhénane », p. 146-149 ; « Trois procès d'État contre La Nouvelle Gazette rhénane, p. 173-174 ; « Procès contre Gottschalk et ses compagnons », p. 255-267 ; « La Contre-révolution prussienne et la magistrature », p. 268-76, et le dernier article, magnifique, sur l' « Interdiction de La Nouvelle Gazette rhénane par la loi martiale » du 19-5-1849 (trad. fr. : Marx-Engels, Écrits militaires, p. 262-264).

[4] Cf. traduction française de l'article d'Engels sur la « Parodie de guerre au Schleswig-Holstein », 5-6-1848 (ibid., p. 195-197).

[5] Cf. Marx, « La Bourgeoisie et la contre-révolution », La Nouvelle Gazette rhénane, 10-12-1848. Dans sa plaidoirie devant la cour d'assises de Cologne, Marx développe le postulat fondamental du socialisme scientifique : « La révolution n'est pas une question de forme d'organisation, mais une question de force », qui résume toute la supériorité du socialisme scientifique sur les premiers balbutiements de l'utopisme (et toutes ses formes ultérieures, plus ou moins avouées). En effet, c'est une utopie de croire qu'il faut réaliser d'abord un modèle d'organisation, par exemple, de la production (coopératives, cellules d'entreprise, conseils de fabrique) ou de relations humaines (dans le parti ou la société), afin de l’étendre progressivement au reste de la société : cette conception rejoint le réformisme et abandonne le terrain de la violence révolutionnaire de classe.
Cette formule de Marx implique toute une vision matérialiste du développement économique et politique de la société sur la base de grandeurs ou masses physiques qui évoluent sans lois abstraites a priori, d'inspiration finalement divinisées (justice, égalité, démocratie, souveraineté de l'esprit ou de la raison dans le peuple, le roi ou le chef), mais d'après les besoins de leur vie et de leur développement.

[6] Marx, « Le Procès du comité de district rhénan des démocrates, plaidoirie de Marx », La Nouvelle Gazette rhénane, 25-2-1849.

[7] Les procès contre les bolcheviks au cours de la contre-révolution stalinienne relèvent de la même idéologie hypocrite, appliquée aux révolutionnaires par un adversaire qui prétend revendiquer l'héritage de la révolution bolchevique. D'où tous les mensonges et mystifications qui font apparaître aujourd'hui le parti comme un moyen de coercition dirigé contre les militants eux-mêmes, bref un appareil monstrueux et diabolique qui se retourne contre ses propres auteurs (en fait, la contre-révolution a liquidé, avec des moyens insidieux, la grande révolution de 1917 et son acquis).
Aux yeux du marxisme révolutionnaire, la vie de la III° Internationale comporte une autre leçon, à savoir que la « terreur idéologique » au sein du parti est non seulement nocive, mais encore inutile du point de vue de la révolution. Alors que la doctrine communiste se diffuse du fait qu'elle correspond aux brûlantes réalités sociales, cette malheureuse méthode consistait à vouloir remplacer ce processus naturel et organique par une catéchisation forcée : c'est ainsi que des éléments récalcitrants et égarés, soit pour des raisons plus fortes que les hommes et le parti, soit à cause des imperfections mêmes du parti, furent publiquement humiliés et mortifiés en congrès, sous les yeux de l'ennemi de classe, même quand ils avaient représenté le parti et dirigé l'action révolutionnaire dans des épisodes politiques de portée historique. Imitant la méthode chrétienne de la pénitence et du mea culpa, l'Internationale prit l'habitude de contraindre ces éléments à une confession publique de leurs erreurs, le plus souvent en leur promettant plus ou moins de retrouver par ce moyen d'importantes positions dans les rouages de l'organisation. Un moyen aussi philistin et parfaitement conforme à la morale religieuse n'a jamais amendé aucun membre du parti, ni protégé le moins du monde ce dernier contre les menaces de dégénérescence. Au contraire. Lorsque le parti s'achemine vers la victoire, l'obéissance des militants est spontanée et totale, mais non aveugle et forcée : la discipline centrale répond à la cohérence entre les fonctions de la base et du centre avec leur action et leur programme, et aucun dressage bureaucratique, aucun volontarisme antimarxiste ne peut s y substituer si elle fait défaut.
Dans les terribles confessions auxquelles furent réduits les grands chefs révolutionnaires avant de disparaître dans les purges de Staline, comme dans toutes les palinodies qui accompagnent les tournants ultérieurs du communisme dégénéré russe, chinois, etc., les autocritiques sont une méthode contre-révolutionnaire, d'ignobles absurdités inutiles et hypocrites que la méthode (bigote et bourgeoise) de la réhabilitation n'efface évidemment en rien. C'est par l'abus croissant de telles méthodes que la dernière vague de la contre-révolution est parvenue à brouiller jusqu'aux yeux souvent même des révolutionnaires, la vision de la lutte et des méthodes communistes. En effet, c’est en agitant le vain et vide recours démocratique, la consultation des volontés de la base du parti, que certains opposants pensèrent sauver le processus révolutionnaire, dicté par les rapports de force, comme si l'adversaire triomphant se laissait impressionner et arrêter par des bulletins de vote dans sa course où lui-même est poussé par des forces sociales et économiques toutes matérielles.

[8] Cf. Freiheit, Arbeit, 21 janvier 1849.
Après l'exposé de la politique générale du parti dans la crise révolutionnaire, cette série de textes aborde les luttes entre organisations et au sein même du parti ouvrier, qui ont lieu parallèlement au passage à la revendication de la République rouge démocratique-sociale, soit à la direction par le parti ouvrier de l'ensemble des forces révolutionnaires, prolétariennes aussi bien que petites-bourgeoises et bourgeoises.
Dans ces conditions, la lutte au sein même des organisations ouvrières tourna autour de la question de savoir s'il fallait utiliser les moyens politiques.
Marx s'opposa essentiellement à Gottschalk, fondateur de l'Union ouvrière, évincé ensuite par Marx et ses partisans. Gottschalk soutenait les revendications économiques spécifiques des ouvriers, et se comportait passivement sur le plan politique, se contentant de remettre des pétitions au nom des travailleurs aux autorités en place dans le cadre politique établi. Marx-Engels, au contraire, proposaient une large action politique tendant, par tous les moyens politiques possibles dans le cadre donné de la phase historique et du programme communiste, à renverser les puissances établies. Ainsi, Marx joua un rôle dirigeant dans le Comité démocratique de la province rhénane qui rassemblait des forces révolutionnaires disparates de la bourgeoisie, petite-bourgeoisie, paysannerie et artisanat. L'Union ouvrière y côtoyait la Société démocratique ainsi que l'Association pour les ouvriers et les patrons, aussi longtemps que tout ce monde était révolutionnaire.
Le présent texte illustre de façon tranchée la conception de l'activité, et donc de l'organisation, toute politique de Marx-Engels, puisqu'il s'agit de la question des élections au cours de la révolution bourgeoise ou, en d'autres termes — plus significatifs —, de la révolution antiféodale et anti-absolutiste dans laquelle, par définition, l'un des actes révolutionnaires essentiels est précisément le transfert de la souveraineté politique du prince au peuple, transfert s'accompagnant de bouleversements gigantesques dans l'économie et la société : le parlementarisme est alors révolutionnaire.

[9] Le fait que la démocratie fit faillite n'infirme en rien la justesse de la tactique adoptée dans la situation donnée, et ne justifie nullement que l'abstention politique eût été plus conforme au programme communiste ou plus efficace. D'abord, cette tactique était la seule possible et la seule souhaitable dans la phase anti-absolutiste de la révolution (permanente, comme la définira Marx dans son Adresse de 1850, pour l'Allemagne). Elle ne freinait ni n'arrêtait alors l'activité révolutionnaire des masses, contrairement à ce qui se passe dans la crise qui précède l'assaut révolutionnaire du prolétariat dans un pays déjà capitaliste (cf., par exemple, les élections du 26 mars 1871 en ce qui concerne la Commune de Paris, Marx-Engels, La Commune de 1871, 10/18, p. 105, et note 105, p. 300).

[10] Cf. Freiheit, Brüderlichkeit, Arbeit, 22 avril 1849.
Deux conditions sont posées à une action en commun avec les forces démocratiques des autres classes sociales : qu'il s'agisse de réaliser des tâches progressives bourgeoises ; que ces forces luttent sur le terrain révolutionnaire. C'est la seconde condition qui, faisant défaut en Allemagne au cours de cette période déterminée, justifia l'abandon de cette organisation vidée de toute signification. Hélas, la phase historique « démocratique » n'en fut pas surmontée pour autant. Au contraire. Les faibles forces du prolétariat furent de plus en plus seules sur le terrain révolutionnaire, non encore prolétarien.

[12] Cf. Freiheit, Brüderlichkeit, Arbeit, 22 avril 1849.
Un intérêt nouveau se manifeste depuis quelques années en Allemagne pour le passé révolutionnaire de ce pays. En témoigne par exemple, la réimpression de la presse militante des années 1848. Les éditions Detlev Auvermann K.G. de Glashütten im Taunus viennent, récemment, de publier en fac-similé l'organe de l'Union ouvrière de Cologne Freiheit, Arbeit (14-1-1849 - 24- 6-1849), en l'introduisant du texte de H. von Stein, Der Kölner Arbeiterverein (1846-1849), qui fut publié pour la première fois en 1921, et en l'accompagnant des remarques de E. Czobel, extraits de Grünberg Archiv, vol. 11, p. 299-335, Leipzig, 1925, ainsi que des pages 429-432 extraites du premier volume de Marx-Engels, Archiv, Francfort, 1928.
Signalons enfin, chez le même éditeur, la réimpression de la revue du Banni : Der Geächtete, Zeitschrift in Verbindung mit mehreren deutschen Volksfreunden herausgegeben von J. Venedey, Paris, 1834 — déc.-janv. 1846.

[12] Cf. Freiheit, Brüderlichkeit, Arbeit, 29 avril 1849.
Ces comptes rendus d'activité de parti témoignent de la lutte que Marx-Engels durent engager au sein de l'organisation pour défendre et expliquer leur conception du cours de la révolution.
En général, les réunions où les discussions sont souvent longues, apparemment tortueuses, voire sibyllines, et parfois âpres, sont précisément celles où les militants se forment, explicitant pour eux-mêmes les mots d'ordre du parti et ses principes avec les préoccupations et les problèmes concrets qui se posent aux individus dans les diverses localités et conditions particulières (dont les arguments opposés dans la discussion reflètent souvent la nature). C'est donc dans ces réunions que s'élabore la conscience de l'action historique du prolétariat. Grâce à cette activité, « la théorie devient une force, en gagnant les masses ».

[13] En 1848-1849, les démocrates républicains furent appelés « les subversifs » par les constitutionnels bourgeois que les premiers baptisèrent « les braillards ».


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