1945

L'EMANCIPATION DES TRAVAILLEURS SERA L'ŒUVRE DES TRAVAILLEURS EUX-MÊMES (Marx)
Nº 4 – Bulletin inter-usines de l'opposition syndicale
BULLETIN INTERIEUR


La Voix des Travailleurs

Barta

15 décembre 1945


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UN AN DE PARLOTTES ET UNE HEURE DE GREVE

Dans le numéro 2 de La Voix, nous demandions à la C.G.T. d'expliquer par quels moyens (ayant épuisé toutes les possibilités de parlotte) elle comptait faire aboutir les revendications, pourtant très minimes, des petits fonctionnaires. Nous indiquions que le seul moyen était l'action directe. Il a fallu attendre des mois pour que le Cartel se décide à répondre aux désirs souvent exprimés des syndiqués de base, et appelle les employés à l'action.

Cependant, si les dirigeants de la C.G.T. ont consenti à une grève générale "d'avertissement" d'une heure, ils se déclarent en même temps adversaires de la grève. "Dans les circonstances actuelles", dit Raynaud, "une grève générale serait catastrophique ; elle aurait pour résultat, notamment par l'arrêt des chemins de fer, d'affamer le pays". Ce sont là les arguments patronaux employés de tous temps contre l'action ouvrière. Qu'est-ce qui empêche le puissant Syndicat des Cheminots et la C.G.T. d'assurer, en même temps que la grève, le transport des denrées indispensables à la vie de la population laborieuse ?

Car, que voyons-nous ? C'est cette grève (même d'une heure), à la différence de toutes les supplications antérieures, qui a obligé le gouvernement à mettre à l'ordre du jour la question des salaires dans les services publics.

Mais en raison de l'attitude des dirigeants syndicaux qui, AU LIEU DE SUSPENDRE SUR LE GOUVERNEMENT LA MENACE D'UNE GREVE GENERALE JUSQU'A LA SATISFACTION DES REVENDICATIONS, fournissent au contraire tous les arguments contre la grève et s'efforcent d'en détourner les employés, les éventuelles concessions gouvernementales seront faites de manière à diviser les employés des Services publics (augmentations individuelles et de certaines catégories). D'autre part, ce qu'il donne d'une main, le gouvernement se prépare à le reprendre de l'autre, en liant l'augmentation des salaires à une augmentation des prix du tabac, des P.T.T., des chemins de fer.

Cependant que depuis bientôt un an les salaires sont bloqués et que la vie continue à monter sans arrêt, le prétexte qu'on ne pouvait pas augmenter les salaires parce que cela fait augmenter les prix s'est définitivement révélé comme un mauvais prétexte. Les secrétaires de la C.G.T. ont été obligés d'indiquer au meeting du Vel d'Hiv quelques unes des dépenses inutiles et anti-populaires faites par le gouvernement et sur lesquelles on pourrait largement prélever l'augmentation demandée par les petits fonctionnaires. Raynaud a parlé de "la D.G.E.R. police de guerre civile qui engloutit des sommes folles" et de la pléthore de hauts fonctionnaires contrôleurs, agents de la répatition, etc. Neumeyer a parlé du budget officiel de guerre de 125 milliards "alors que la guerre est terminée depuis bientôt un an" et des 100 milliards de subventions aux capitalistes. Il aurait pu également parler des frais d'occupation en Allemagne, avec l'armée de hauts fonctionnaires et de gradés militaires qu'on y entretient, des frais d'occupation en Indochine, et des milliards qu'on s'apprête à verser aux capitalistes "nationalisés", car, eux, on s'en voudrait de les "léser". Par ailleurs, si un haut fonctionnaire, bénéficiant de nombreux avantages, a besoin de 450 000 francs par an pour vivre, comment peut-on tolérer que le salaire de base d'un petit fonctionnaire soit de 3 200 francs par mois ?

En voilà assez des directives des sphères bureaucratiques de la C.G.T. En voilà assez des discussions stériles et des ajournements qui laissent à la bourgeoisie les mains libres de manoeuvrer. SEULE LA GREVE GENERALE jusqu'à la satisfaction de nos revendications, et l'organisation de la solidarité de classe de tous les travailleurs obligeront le Gouvernement à céder.


La lutte pour la démocratie dans les syndicats

"La démocratie syndicale assure à chaque syndiqué la garantie qu'il peut, à l'intérieur du syndicat, défendre librement son point de vue sur toutes les questions intéressant la vie et le développement du syndicat", est-il proclamé dans le préambule des statuts de la C.G.T. en mars 1936.

Néanmoins, malgré cette reconnaissance statutaire de la démocratie, en fait, à l'heure actuelle, les travailleurs sont impuissants à établir leur contrôle sur les dirigeants syndicaux. Or, ce contrôle doit surgir automatiquement là où la démocratie est une réalité et non pas seulement un mot vide de toute signification pratique.

Marx avait découvert, en étudiant la structure réelle de la société que, d'une manière générale, "le droit (les garanties juridiques statutaires, etc.) ne peut jamais s'élever au-dessus (se distinguer) du régime économique et du développement culturel conditionné par ce régime".

Autrement dit, si l'on veut appliquer ce raisonnent à la question qui nous occupe, ce ne sont pas les statuts de la C.G.T., mais la connaissance de la situation réelle, économique, politique, morale des travailleurs qui nous éclairera sur l'absence de la démocratie dans les syndicats.

Si les permanents syndicaux, au lieu d'être aux ordres des travailleurs, forment une bureaucratie incontrôlée et par conséquent hostile aux luttes ouvrières (qui troublent leur "élévation" sociale de laquais du patronat), cela est dû, en effet, à la situation suivante des ouvriers.

La surexploitation patronale, le manque de ravitaillement, des heures de travail souvent fantaisistes imposées par les capitalistes sous divers prétextes, enlèvent à la grande majorité des syndiqués la capacité physique et intellectuelle d'aller aux réunions. Car, dans celles-ci, les permanents syndicaux reposés et ayant eu le temps de préparer leurs manoeuvres, invoquent des "raisons" que les travailleurs ne peuvent pas contredire sur le champ, mais dont ils aperçoivent la tromperie le lendemain. Ils se voient "roulés" et renoncent à aller aux réunions.

La minorité des syndiqués qui participe aux réunions et par les votes de laquelle les bureaucrates donnent une allure "démocratique" à leurs décisions, se divise en deux catégories : les travailleurs qui suivent les "responsables", soit parce que trompés par leurs "justifications réalistes", soit parce qu'espérant qu'un jour ou l'autre ils feront leur travail, et des travailleurs qui savent à quoi s'en tenir sur eux, mais qui ne veulent pas, ne peuvent pas (et ils ont raison), abandonner l'organisation syndicale. C'est parmi ces derniers surtout que se manifeste un esprit oppositionnel.

Qu'est-ce qui empêche les opposants de se manifester vigoureusement dans les syndicats ? Car ils auraient alors l'approbation et l'appui de l'écrasante majorité des syndiqués qui ont abandonné les réunions et qui y reviendraient.

C'est que, tandis que les bureaucrates bénéficient de l'appui de l'Etat bourgeois, qui leur assure, à eux, collaborateurs de la "paix sociale" (l'écrasement des travailleurs sans résistance), tous les moyens légaux pour leur propagande, les opposants, couverts de calomnies par les bureaucrates, peuvent donner matière à la répression policière.

Voilà pourquoi, malgré les statuts de la C.G.T., il n'y a pas de démocratie dans les syndicats. Voilà pourquoi les permanents insèrent dans les journaux seulement ce qui leur plaît, excluent les opposants que les patrons ont soin de renvoyer ensuite, etc : ils sont aidés en cela par toute l'exploitation et l'oppression bourgeoises qui pèsent sur l'ensemble de la classe ouvrière.

Tandis que les opposants, eux, dispersés et sans journaux, ne sont pas à même de leur opposer la force (irrésistible) de l'ensemble des syndiqués. "L'avantage des dirigeants actuels de la C.G.T., c'est de pouvoir combattre des éléments isolés. Nous devons leur enlever cet avantage", disait La Voix n°1.

Il faut donc unir tous ceux qui, dans le syndicat et dans l'usine, indépendamment de leurs opinions politiques, sont de véritables démocrates-prolétariens. C'est là le rôle de l'opposition Lutte de Classes dans la C.G.T., c'est là le but de La Voix des Travailleurs qui doit devenir une véritable tribune des exploités, pour lesquels presque personne ne parle aujourd'hui et dont personne ne parlera aussi bien qu'eux-mêmes !

MATHIEU


Encore les Nationalisations... A la S.E.I.T.A.

Le Service d'Exploitation Industrielle des Tabacs et Allumettes est "nationalisé". En fait, pour les employés de l'Etat, le directeur n'est qu'un patron irresponsable qui se retranche derrière ses paperasses dès qu'il s'agit de prendre une décision.

Les revenus du S.E.I.T.A. vont à la Caisse Autonome. La fixation des prix de vente peut faire varier singulièrement la quantité de produits vendus et partant le bénéfice.

Pourquoi seul un Comité très restreint fixe-t-il arbitrairement les prix ? Pourquoi importe-t-on certains produits de préférence à d'autres ? Pourquoi encore de nombreux marchés de matériel et de fournitures sont-ils passés en dépit du bon sens ? Des ouvriers ont souvent dénoncé des achats scandaleux de machines inutilisables avant d'avoir fonctionné. Aucune justification n'est donnée, si ce n'est aux Inspecteurs des Finances, avocats et hommes lige des trusts qui contrôlent par leur intermédiaire l'entreprise "nationalisée".

Dans ces conditions, il est impossible aux travailleurs du S.E.I.T.A. d'admettre qu'on prenne leur entreprise comme "modèle" de nationalisation, alors qu'elle représente une véritable poule aux oeufs d'or pour un tas d'intermédiaires, fournisseurs, concessionnaires, financiers, etc.

Que Messieurs les Administrateurs ouvrent leurs livres de comptes et rendent compte de leur gestion devant les Comités d'usine ou d'entreprise élus par tous les travailleurs ! Sans la confiscation (sans indemnité ni rachat), sans un véritable contrôle ouvrier sur la production, les nationalisations ne sont qu'une opération comptable pour les capitalistes, et qu'une duperie pour les travailleurs.


Dans quel régime sommes-nous ?

La "nationalisation" du crédit a été l'occasion pour les journaux de poser la question : en quel régime sommes-nous ?

Pour les travailleurs, pareille question ne se résout pas par de savantes discussions sur des formules juridiques mais les rapports qu'ils ont avec leur patron ou administrateur, par la place qu'ils occupent dans la production. C'est une question pratique à la-quelle répond notre activité de chaque jour. Aussi, pour les ouvriers, il est clair que rien n'est changé, et que nos capitalistes "nationalisés" se portent à merveille.

Si les porte-paroles de la bourgeoisie crient si fort que nous entrons dans le socialisme, c'est qu'il s'agit pour eux de sauver le régime bourgeois en faisant passer ses misères et sa faillite au compte du socialisme. Il s'agit de nous empêcher de voir qui sont les responsables, et de nous donner des paroles en échange de nos nerfs et de nos muscles.

De même, Hitler et Mussolini se proclamaient "socialistes", pendant qu'à l'abri de leurs "nationalisations" les financiers et industriels nazis remplissaient leurs poches. En Angleterre, le gouvernement travailliste a "nationalisé" la banque d'Angleterre, en la payant 4 fois plus cher aux actionnaires et en leur garantissant un intérêt égal à leurs anciens dividendes. En France, Déat déclarait le 1er mai 1944 que, grâce à la Charte du Travail , "les voies de gestion économique étaient ouvertes à la classe ouvrière", et nos "chefs" ouvriers politiques et syndicaux nous disent la même chose à propos des Comités d'entreprise. Mais comment les ouvriers pourraient-ils réellement participer à la gestion, puisque le rôle du Comité d'entreprise, comme celui du Comité Social de Vichy, ce n'est en fin de compte que pousser à la production, permettre au patron - seul maître de l'entreprise - la réalisation de plus gros bénéfices.

En présentant ces tours de passe-passe et ces escroqueries comme des "pas en avant" vers le socialisme, nos "chefs" nous mentent et empêchent les travailleurs d'organiser efficacement leur résistance à l'exploitation capitaliste, parce qu'ils cachent les contradictions terribles de notre société, contradictions qui s'expriment dans la lutte des classes. En faisant cela, ils se joignent, quelles que soient leurs intentions, au choeur des larbins payés par les monopoleurs, pendant que la base de l'exploitation capitaliste et de tous les maux dont nous souffrons reste intacte : la propriété privée des moyens de production qui permet à une poignée de magnats de disposer de notre sort à tous.

C'est à cette propriété capitaliste qu'il faut s'attaquer si l'on veut vraiment éviter la catastrophe. Et seule la classe ouvrière peut s'y attaquer, car elle seule n'a pas d'intérêts ou de privilèges à sauvegarder dans l'affaire. Un CONTROLE OUVRIER à tous les échelons de la production doit permettre de dévoiler dans le pays tout entier la malfaisance des capitalistes et la catastrophe où ils nous mènent. Ce contrôle préparera ainsi la voie à la seule mesure efficace : l'expropriation des capitalistes et la gestion directe des entreprises par les travailleurs. Pour y arriver, il faut briser les barrières que les bureaucrates ouvriers dressent devant notre activité de classe, il nous faut renouveler nos organisations en les épurant des "collaborateurs" avec la bourgeoisie, et nous débarrasser des idéologies bourgeoises, dont ils se sont fait les propagateurs.

LUCIEN


Pour l'échelle mobile des heures de travail

La production capitaliste est une production qui cherche à favoriser les intérêts particuliers des possédants sans se soucier des besoins de la consommation. Ces intérêts étant tous contradictoires, il s'ensuit une anarchie dans la production, donc une anarchie dans la répartition du travail.

Tandis que l'on oblige certains ouvriers à s'épuiser au travail par des journées longues et pénibles, d'autres ouvriers sont réduits au chômage.

Au printemps dernier, pendant que de nombreux ouvriers chômaient totalement ou partiellement (dans certaines boîtes on ne faisait que 35 heures), les usines Citroën-Levallois qui rénovaient des moteurs américains faisaient 60 heures par semaine et dans certains endroits des ouvriers faisaient jusqu'à 61 heures et même 70 heures. Dans les autres usines de la même firme, le nombre d'heures était tout-à-fait différent d'un atelier à l'autre (40, 45, 48, 49 h 1/2, etc.).

Dans de nombreuses boîtes on a invité les ouvriers à abandonner leurs vacances pour gagner la "bataille de la production". Chez Renault où l'on demande un effort constant aux ouvriers et où, d'autre part, on utilise les prisonniers allemands, l'embauche se fait au compte-goutte. Chez Citroën également, après avoir été suspendue pendant un certain temps, l'embauche est très limitée pendant que l'on renvoie des ouvriers et des ouvrières pour insuffisance de production.

Chez Delaunay-Belleville, à Saint-Denis, l'effectif de plus de 2 000 ouvriers a été réduit à quelques centaines. Chez Hispano le manque de charbon menace de faire fermer la boîte, ce qui représente la mise à pied de 4 500 ouvriers.

Dans le bâtiment on débauche en masse sur les chantiers S.N.C.F. tandis que le ministre du travail négocie pour obtenir que l'Italie envoie plusieurs centaines de milliers d'ouvriers (déportés) à titre de "réparations".

Cette anarchie dans la répartition du travail est la conséquence de l'anarchie économique du vieux système capitaliste en décomposition. Elle représente pour les ouvriers un très grave danger.

Le patronat, en imposant un travail exténuant à une partie des travailleurs, outre qu'il y trouve un très grand profit, ruine physiquement cette catégorie d'ouvriers. D'autre part, il corrompt l'autre partie réduite au chômage, rabaissée à la situation de lumpen-prolétaires ou vivant de "combines". Il divise les ouvriers chômeurs qui veulent travailler et les ouvriers qui veulent conserver leur place en créant entre eux une concurrence de main d'oeuvre dans le but de réduire au minimum leur standard de vie. Il entretient une mésentente perpétuelle entre les ouvriers français et les ouvriers immigrés en opposant leurs intérêts.

Le prolétariat, qui est la seule classe capable de sauver la société de la ruine, ne doit pas se laisser décimer par les conséquences néfastes de l'anarchie capitaliste : le chômage d'une part et le travail forcé d'autre part.

C'est pourquoi il doit mettre en avant de ses revendications l'échelle mobile des heures de travail qui établira une répartition judicieuse du travail entre tous les bras disponibles. L'échelle mobile des heures de travail mettrait les ouvriers à l'abri d'une situation toujours précaire (la crainte d'aller au chômage). Elle renforcerait l'unité prolétarienne. C'est, avec l'échelle mobile des salaires, une revendication minimum qui ne permettra pas à la classe ouvrière de s'affranchir totalement de la tutelle capitaliste, mais qui lui permettra de conserver assez de force pour mener sa lutte émancipatrice contre la bourgeoisie.

VAUQUELIN


ECHOS


Gnome et Rhône (S.N.E.C.M.A.)

– A l'atelier de chaudronnerie, les ouvriers mécontents d'un chronométreur, Suret, qui leur avait fait plusieurs "entourloupettes" et qui leur diminuait des temps déjà bien justes, ont décidé de ne plus en vouloir. Le secrétaire Delteil, en réunion d'atelier, a voulu prendre la défense de Suret et arranger les choses. Dans la première partie de sa motion, il était question des temps trop courts, mais il tenait, en fin de motion à repêcher le "camarade" Suret. Les ouvriers ont accepté de voter la première partie de cette motion, mais avec énergie ont refusé la deuxième partie et devant la volonté unanime des ouvriers, le fameux "camarade" Suret a été déplacé. Bravo la chaudronnerie ! D'avoir su obliger Delteil à respecter et à appliquer votre décision, et à montrer aux ouvriers du service où sera placé maintenant le "camarade" Suret (ancien ouvrier, mais qui doit l'avoir oublié), l'action qu'il faut mener contre ceux qui oublient de quelle classe ils font partie.


Bâtiment

– La Fédération du Bâtiment (C.G.T.) a donné son accord pour l'arrivée de 700 000 travailleurs italiens du Bâtiment, suivant entente entre les gouvernements français et italien. Devant les protestations des syndiqués, la Fédération donne l'assurance "toute gratuite" que les ouvriers italiens seront des "volontaires" et qu'elle les organisera. Nous sommes certains qu'il n'y a pas 700 000 ouvriers italiens de volontaires, cette main-d'oeuvre sera réquisitionnée par le gouvernement italien. Il ne suffit pas que la C.G.T promettre d'organiser, de syndiquer, etc, ces ouvriers quand ils seront là, il faut dès maintenant qu'elle mène une bataille intransigeante contre tout transfert forcé d'ouvriers d'un pays à l'autre. Nous devons par notre action de base, opposer aux patrons et à leurs agents du gouvernement, nos décisions et les faire imposer par notre fédération.

A bas les déportations d'ouvriers d'un pays à l'autre !


Chez Citroën Clichy

A l'ajustage, à la suite d'un débrayage, les ouvriers ont obtenu une augmentation horaire de 1 fr.

– quelques ouvriers ayant arrêté le travail pour exiger la révision des "temps" promise depuis longtemps, le délégué promet de s'en occuper et ajoute que ce n'est pas aux ouvriers de monter à la direction, qu'ils ne sont pas "mandatés" et qu'il ne faut pas suivre la propagande de la IVe Internationale, il conclut : "J'en ai repéré un aux "chemises", je n'en suis pas bien sûr, sans quoi je le ferais virer en moins de deux".

Citroën-Grenelle

Embauche : le nouvel O.S. embauché, qui a une période d'essai de 12 jours, est payé pendant 48 heures au boni moyen de sa catégorie sur la base d'un taux d'affûtage de 17 fr 50 de l'heure qui lui reste pendant toute la période d'essai. Passé ce délai, le boni lui est compté d'après sa production. Ainsi, au bout de 48 heures, la Direction admet qu'un ouvrier doit être capable de fournir le rendement demandé et alors le boni lui est donné d'après sa production ; tandis que pour le taux d'affûtage, elle reconnait qu'il est toujours en période d'essai et ne lui donne que 17 fr 50 de l'heure.

Citroën-Clichy

La Section Syndicale présente aux ouvriers réunis dans la cour un horaire de travail, proposé par la Direction, avec travail le samedi et le dimanche, par suite des restrictions d'électricité. Devant l'hostilité générale des ouvriers, la Section Syndicale demande d'autres suggestions. Aucune réponse. L'horaire proposé est donc accepté, car "l'Economie française manquant de charbon réclame des sacrifices pour son redressement".

Dans le cas présent, les ouvriers consentent au sacrifice de leur traditionnel repos du samedi et du dimanche. Par contre, que le travail soit effectué samedi et dimanche ou pendant la semaine, les patrons empochent les mêmes bénéfices. Pour eux, aucun sacrifice.

Les dirigeants syndicaux qui savent si bien prendre leurs responsabilités lorsqu'il s'agit par exemple de briser une grève (voir écho Citroën-Levallois), rejettent comme d'habitude ces responsabilités lorsqu'il s'agit de défendre les intérêts des travailleurs, leur demandent des sacrifices mais n'en demandent pas aux patrons.

Pas question disent les ouvriers. D'accord, nous allons faire des sacrifices, mais à condition que les patrons en fassent aussi : le salaire des jours non ouvrables sera majoré de 100% !"

Citroën-Levallois

La Direction ayant proposé un horaire de 40 heures et un autre de 45 heures, un responsable de la C.E. a dit aux ouvriers : "Il faut faire 45 h. car avec 40 h. nous ne pourrons pas nourrir nos femmes et nos gosses". Le patron n'aurait pas dit mieux. Les ouvriers jugent que ce qu'il faut augmenter, c'est le salaire horaire et non les heures de travail.

Dans une Assemblée syndicale, à la question d'un ouvrier qui demandait pourquoi Beaumont n'était pas encore là, le responsable syndical lui répondit : "C'est moi qui le remplace, Beaumont est chez Simca où les ouvriers ont tenté de faire la grève. Depuis un certain temps se manifeste dans la Région Parisienne une tendance à faire grève. C'est à cause de La Lutte de Classes, etc..."

Briseurs de grève, voilà le rôle des dirigeants actuels du syndicat.


A la S.C.T

Le manque de travail va en s'accentuant. Le patron veut licencier 35 ouvriers pris parmi les plus récents embauchés. Les ouvriers refusent à l'unanimité et proposent de travailler tous 4 semaines sur 6 ; c'est une façon juste de poser la revendication : échelle mobile des heures de travail.


Chez Otis

Dans les ascenseurs, une délégation a demandé pour tous les ouvriers une augmentation de 4 fr. de l'heure. Les patrons refusent et font des contre-propositions : ils offrent une augmentation, variant de 0 fr 50 à 2 fr 50 et 3 fr, mais seulement pour les professionnels.

Or, les graisseurs qui ne gagnent que 26 fr. se voient refuser toute augmentation. L'ensemble des ouvriers est solidaire des graisseurs. Beaucoup proposent de protester par une grève d'une heure et même d'une journée. Mais les "bonzes" calment les mécontents et empêchent toute opinion qui n'est pas dans leur "ligne" de s'exprimer.

Les ouvriers signent une protestation contre l'augmentation partielle et pour l'augmentation générale.


A la Lorraine à Argenteuil

Jusqu'alors les ouvriers travaillant aux pièces et qui avaient du retard passaient des bons blancs. La semaine dernière, les bureaux leur ont fait savoir que dorénavant ils ne pourraient plus en passer et leur ont réglé leurs bons en acompte. De ce fait les retards d'une quinzaine doivent être rattrapés la quinzaine suivante.

Sous différentes formes (du boni collectif au boni individuel, mutations, diminution des temps), le patron vise le même but : augmentation du rendement, diminution du salaire. Retroussons nos manches, ça ira mieux pour les patrons.


Renault

Maintenant que les Communistes sont au Ministère, les ouvriers savent qu'ils vont "bosser". Pour beaucoup d'ouvriers, le fait même de produire, de travailler, les ennuie, mais ils voient le salaires des heures supplémentaires qui sera une compensation. Camarades, il ne faut pas être dupes des manoeuvres patronales qu'appuie la politique actuelle du Syndicat. Il faut exiger des salaires nous permettant de vivre sans augmentation de la journée de travail déjà beaucoup trop longue. On exige un effort sans cesse accru des ouvriers pour "la réussite de l'expérience de la Régie Renault", mais à quoi sont utilisés les efforts des ouvriers ? A faire des tanks ! (Voir le journal de la Section Syndicale).

Est-ce cela la reconstruction ?


Les Etablissements Peugeot à Montbéliard

possèdent une école d'apprentissage dont les frais de fonctionnement sont couverts d'une part par les indemnités de l'Etat, d'autre part par le travail des élèves de 2ème et 3ème année (pièces de série).

Les enfants sont admis à 14 ans. Le nouveau contrat d'apprentissage, d'une durée de 10 ans (service militaire non compris, et sans qu'il soit possible de devancer l'appel) les lie jusqu'à 25 ou 26 ans, soit après leur majorité. Existe-t-il une loi qui permette aux parents de disposer de leurs enfants après 21 ans ?

En cas de rupture de contrat, pour racheter sa liberté, l'apprenti devrait verser 25 000 francs.

Ainsi, pour deux ans d'apprentissage, Peugeot veut s'attacher des ouvriers pour la vie. Surtout qu'en province, à 25 ou 26 ans, l'ouvrier cherche à fonder un foyer et il n'est pas si facile de trouver de l'embauche dans une autre entreprise.

Cette main d'oeuvre professionnelle lui coûte très peu cher, et il l'emploie exactement où il veut. Le taux actuel des jeunes professionnels, au sortir de l'école est de 19 à 23 frs.

Devant le nombre de travailleurs décidés dans ces conditions à retirer leurs enfants, la direction a promis de modifier les clauses de son marché d'esclaves.


Chez les petits forains

– A nouveau la gendarmerie procède à la confiscation sur place de la marchandise des petits forains des marchés de Paris et de banlieue, cela quand ils ne peuvent pas présenter la facture d'achat de leurs marchandises. Ils les mettent ainsi dans l'impossibilité de continuer à gagner leur vie, puisque seule la vente de chaque jour leur permet de maintenir leur petit stock et de vivre. Si les petits marchands ne peuvent pas présenter de factures, c'est parce que les profiteurs grossistes ne veulent pas leur en faire et leur vendent la marchandise au-dessus du cours officiel, ou leur font des factures à des prix parfois de moins de 100% de ce qu'ils payent effectivement. Si le contrôle économique, au lieu d'être un instrument des capitalistes, était sous le contrôle de la population, c'est à la tête qu'il devrait frapper, et aller faire un tour rue des Gravilliers et rue du Temple où, à longueur de journée, on débite de la marchandise sans facture.


Abonnement pour 10 numéros : 20 francs.

Adresser provisoirement la correspondance et les fonds au
camarade Jacques Ramboz
7, impasse du Rouet – Paris 14ème

PERMANENCE
Jeudi et vendredi, 18h à 20h ; samedi de 9h à 12h, de 14h à 20h ; dimanche de 9h à 12h


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