1921

Un travail de Boukharine récapitulant les acquis du marxisme. Il servira de manuel de formation de base aux militants communistes durant les années de construction des sections de l'Internationale Communiste.


La théorie du matérialisme historique

N.I. Boukharine

6
L'équilibre entre les éléments de la société


43: Types de structures économiques et types divers de sociétés.

En examinant la question de la société, nous nous heurtons à des types historiques définis de sociétés. Qu'est-ce que cela signifie  ? Cela signifie qu'il n'existe pas de société « en général » ; qu'en réalité une société existe toujours sous une enveloppe historique déterminée quelconque; qu'elle porte l'uniforme de son temps. C'est tout à fait compréhensible. Nous savons qu'une société (n'importe quelle société) est un ensemble de gens exerçant les uns sur les autres une action réciproque constante; ces innombrables influences réciproques ont pour base les relations que crée entre ces gens le travail, le système de rapports de production, si l'on prend ces relations et ces influences mutuelles à tout instant donné. Mais ce système de rapports de production est constitué par un ensemble de gens disposés d'une manière définie, de gens que n'unit pas simplement le lien du travail, mais un type déterminé de lien de travail.

Il est donc clair que la société n'existe que sur une base de travail définie ; et comme à cette base définie, à ce « mode de production » défini correspond aussi un « mode de représentation a défini, il est également compréhensible que c'est cela même qui donne aussi le type de toute société, d'une société dans son ensemble, et non pas seulement dans sa partie de production matérielle ou économique. La technique d'une société est liée avec le mode de production, le mode de production avec le mode de représentation, et cette union du système matériel, du système humain et du système spirituel fait d'une société un type social bien déterminé. De même que dans le règne animal nous distinguons. diverses espèces d'animaux, divers genres, diverses familles, etc., de même en sociologie, nous distinguons divers genres de sociétés. De cela nous avons déjà maintes fois parlé plus haut. Mais il nous faut souligner ici l'idée fondamentale de ce paragraphe, à savoir que cette différence entre les « genres » sociaux, les types de société, peut être saisie sans peine non seulement dans la sphère économique, mais dans n'importe quelle série de phénomènes sociaux. Un type de société peut être signalé et d'après son idéologie, et d'après son économie. De l'art féodal on peut conclure aux rapports de production féodaux, des rapports de production féodaux on peut conclure à l'art féodal ou à la religion féodale, ou au caractère de la psychologie féodale en général, etc., et de même dans tous les cas. C'est pourquoi, par exemple, en déchiffrant n'importe quels monuments littéraires mis au jour par les archéologues, nous pouvons nous représenter les divers aspects de la vie des peuples disparus, imaginer leur genre de vie. En lisant le code d'Hamourabi, nous ressuscitons la vie économique de Babylone, d'après l'Iliade et l'Odyssée nous pouvons juger de l'histoire de la Grèce homérique, et ainsi de suite.

Ainsi, les formes historiques de la société, le caractère de détermination de ces formes, concernent non seulement la base économique, mais tout l'ensemble des phénomènes sociaux, car la structure économique détermine et la structure politique, et la structure idéologique. Un terme étant donné, l'autre l'est aussi. Il ne s'ensuit évidemment pas qu'un type de société soit séparé de l'autre, par des frontières si tranchées qu'elles ne laissent place à aucun élément commun à ces sociétés différentes. « Les étroites lignes-frontières de l'abstraction séparent aussi peu les époques de l'histoire de la société humaine, que les époques de l'histoire de la terre » (Capital, T. I.). Au contraire, la vie réelle nous montre dans chaque type social, à chaque nouvelle structure sociale, des restes des anciennes formations économiques parfois très considérables et jouant un très grand rôle. Si nous prenons par exemple, la société capitaliste contemporaine, nous trouverons une masse de vestiges des anciennes institutions économiques. Toute l'importante couche paysanne avec son économie particulière est, essentiellement, un reste de l'époque féodale; de même l'artisanat, etc. Le capitalisme « pur » suppose une bourgeoisie et un prolétariat, et ne suppose ni paysans, ni artisans, ni rien de semblable. Dès lors, si dans la structure économique une pareille « pureté » ne peut exister, il va de soi que dans le domaine idéologique aussi il y aura inévitablement un certain «mélange d'idées ». En d'autres termes on peut trouver dans la société capitaliste autant qu'on veut de traces de l'idéologie féodale, par exemple dans l'aristocratie terrienne et la paysannerie, dans les « classes rurales », qui s'appuient sur les anciens rapports agraires, où se sont encore conservés un certain nombre de traits antiques. « ... Il est supposé dans la théorie (il s'agit ici de la théorie de l'économie capitaliste, N. B.) que les lois du mode de production capitaliste se développent dans leur pureté. Mais en réalité, on n'a jamais qu'une approximation et cette approximation est d'autant plus grande que le mode capitaliste de production est plus développé et que l'enchevêtrement avec les vestiges des états économiques précédents disparaît davantage. » (Le Capital, T. III, p. 154). En même temps que l'entrelacement des formes économiques, il y aura aussi, fatalement, entrelacement des formes idéologiques. Voilà pourquoi il n'y a jamais ni « mode de production » absolument unique, ni, à plus forte raison, « mode de représentation » absolument unique (nous disons « à plus forte raison » parce que le « mode de représentation » est différent dans les différentes classes, même appartenant à une seule et même culture économique prise dans sa pureté virginale). Cependant, il ne s'ensuit nullement que nous ne puissions ou ne devions pas distinguer divers types de rapports de production et de formes idéologiques. Car, dans n'importe quelle société existant en réalité, il y a toujours un type dominant déterminé de rapports de production, et par conséquent, un « mode de représentation » déterminé dominant. C'est donc avec raison que W. Sombart dit: « Je distingue une époque dans la vie économique, d'après l'esprit de la vie économique, à condition qu'un esprit déterminé soit réellement dominant à un moment donné. » (W. Sombart, Le Bourgeois, p. 6).

Exactement de même, Marx, parlait, au sujet du capitalisme, d'une « forme sociale dans laquelle domine le mode capitaliste de production. » (Cf. Théories sur la plus-value, T. I., p. 424). De même qu'en géologie nous distinguons le singe de l'homme, malgré leurs traits de ressemblance, de même dans l'examen des formes sociales, nous distinguons une forme de l'autre, malgré leurs traits communs, et bien que dans les formes « supérieures » nous rencontrions même souvent des restes parfaitement inutiles, incompréhensibles à première vue, des anciens aspects (ce qu'on appelle des « rudiments »).

Dans le troisième chapitre de ce livre, nous avons déjà indiqué que dans l'examen de la société, il est indispensable de discerner sa forme sociale, qui a sa racine dans les particularités de la structure économique. Ce point de vue a plus d'une fois provoqué les protestations de la science bourgeoise officielle, à qui déplaisait toute idée de réédification radicale des rapports sociaux. Les savants bourgeois reconnaissent eux-mêmes maintenant que c'est bien là le nœud de la question. Ainsi, le Dr. Bernard Odenbreit écrit : « Marx, comme c'est tout à fait naturel pour un « révolutionnaire », considérait d'une façon particulièrement aiguë le caractère historique transitoire des constitutions sociales. À cette vue générale dans le domaine des sciences sociales se joint une connaissance consciemment critique du domaine plus étroit de l'économie politique... » (Plenge : Staatswirtschaftliche Beiträge (Contribution à la science politique), 1er cahier : B. Odenbreit : La théorie comparative de l'industrie dans K. Marx, Essen, édit. Baedeker, 1919, p. 15). Nous y sommes ! Considérer « d'une façon aiguë ce qui se transforme, cela ne se trouve forcément que chez les révolutionnaires ». C'est ici, comme nous le savons, l'une des principales causes de la prééminence des sciences sociales du prolétariat révolutionnaire sur les sciences sociales de la bourgeoisie contre-révolutionnaire.

Si nous prenons la plus ancienne des formes connues de société, qu'on appelle le Communisme primitif, nous verrons qu'à son type de rapports de production, où « l'individualité » travailleuse n'est pas encore séparée de la « horde », correspondent aussi ses « formes de conscience »: pas de religion, pas d'idée de rang, pas même d'idée de personnalité, de séparé, de particulier, d'individuel. Mais considérons la Société féodale, « dont les traits essentiels sont, d'une part, le morcellement du pays en une quantité de fiefs indépendants, de principautés, et de seigneuries privilégiées, et d'autre part, l'union de ces fiefs par des liens contractuels de vassalité » (N.-P. Silvanski : Le Féodalisme dans l'ancienne Russie, Saint-Pétersbourg, 1907, p. 45). Ici, le style de l'économie a le caractère hiérarchique, le style de la « politique » a le même caractère, le « style » de l'idéologie également. Comme nous l'avons déjà vu, partout domine l'idée du rang. À la base se trouve la grosse propriété foncière (« nulle terre sans seigneur à, tel est l'adage qui caractérise cet édifice économique), immobile et figée. Les liens économiques sont des liens entre propriétaires et serfs ; ils sont fixes, immobiles, immuables du point de vue des membres de la société féodale ; tout est « attaché », « rivé » à sa place dans le système hiérarchique : « Où la chèvre est attachée, elle broute ». Et de même dans la superstructure politique, qui reflétait ces rapports de production.

« La tendance hiérarchisante de la vie féodale a été érigée en théorie et en système par les juristes du XIIIe siècle (il s'agit ici du féodalisme européen, N. B.)... Les prédicateurs voient facilement une division horizontale de la société considérée comme un tout, même si elle se divise en seigneurs et en valets. Ils rappellent aux serfs les paroles de l'apôtre, ordonnant aux esclaves d'obéir à leur maître. Dieu a mis sur la terre des «rois, des dues et d'autres gens, à qui il a ordonné de commander aux autres. Ils ont été placés par Dieu, afin que les petits dépendent des forts. » (L.-N. Karsavine : La Culture du moyen-âge, Petrograd, 1918). Toute la conception du monde est religieuse, c'est-à-dire pénétrée du principe de rang, nu, comme on dit encore, « autoritaire »; de là son immobilité, son traditionalisme ; la science est, avant tout, une interprétation de la tradition et de l'Écriture Sainte ; l'art est « divin » et exalte dans sa forme et son contenu les forces « supérieures », célestes et terrestres; la morale dominante, la coutume, est une morale de fidélité féale, d'orgueil nobiliaire, de culte du glorieux souvenir des ancêtres, de respect à la « bonne naissance » et à la « noble extraction » ; « quod licet Jovi, non licet bovi », ce qui est permis à Jupiter n'est pas permis à un bœuf. En un mot, nous avons sous les yeux un « mode » social particulier, une forme particulière de société, depuis sa base économique jusque et y compris les formes les plus « élevées » de la conscience sociale.

Considérons maintenant la société capitaliste. Sa base économique est constituée par un tout autre genre de rapports. « L'opposition entre la puissance de la propriété foncière, reposant sur les relations personnelles entre les seigneurs et les serfs (Knechtschafts und Herrschaftsverhältnissen), et la puissance impersonnelle de l'argent est clairement exprimée dans les deux dictons français : a Nulle terre sans seigneur ». « L'argent n'a pas de maître ». (Marx, Capital, I). Cette thèse de Marx nous révèle une des dépendances économiques fondamentales de la société capitaliste, à savoir le lien qui unit les entreprises par l'intermédiaire du marché, et qui donne naissance à la puissance impersonnelle de ce marché, et à la puissance impersonnelle, « abstraite » de l'argent. Cependant, la chose a encore un autre aspect. La puissance sociale impersonnelle de l'argent transformé en capital trouve malgré tout, un maître, dans la mesure où la simple production de marchandise se transforme en production capitaliste.

« De même que dans l'or sont effacées toutes les différences qualitatives des marchandises, de même l’or a son tour, tel un leveller  [1] radical, efface toutes différences. Mais l'argent est lui-même une marchandise, une chose palpable, pouvant devenir la propriété de chacun. Celle force sociale devient de la sorte la force particulière d'un homme en particulier ». (Capital, T. I., chapitre sur la monnaie, paragraphe sur la thésaurisation). De là découle le second trait de l'économie de la société capitaliste, son caractère de hiérarchie. Ce trait est lui aussi brillamment mis en lumière par Marx. Il écrit dans le chapitre sur le travail collectif (Capital, T. I.) : « La direction capitaliste est, quant à sa forme, despotique. Au fur et à mesure que le travail collectif se développe sur une plus grande échelle, ce despotisme revêt des formes particulières et adéquates... Le capitaliste est libéré de tout travail manuel dès que son capital atteint cette grandeur minima à partir de laquelle devient possible la production capitaliste au sens propre du terme. De même, la surveillance directe et constante des ouvriers isolés ou des groupes d'ouvriers, passe dès lors à une catégorie particulière d'ouvriers salariés. Tout comme une armée a besoin d'une hiérarchie (souligné par nous, N. B.) de supérieurs militaires, une masse d'ouvriers réunis dans un travail commun sous le commandement d'un seul et même capital, a besoin d'officiers supérieurs, industriels (administrateurs, managers), et de sous-officiers (surveillants, contremaîtres, foremen, overlookers.), qui, pendant le procès du travail, dirigent au nom du capital. Le travail de surveillance s'attache à eux comme leur fonction exclusive. »

Ainsi, le mode de production capitaliste porte un double caractère : d'une part, c'est un ensemble « d'entreprises » séparées, particulières, reliées entre elles par le lien anarchique du marché et de l'échange, et où la puissance élémentaire du marché domine toute entreprise particulière; d'autre part, c'est un système hiérarchique de « commandement du capital ». Rien d'étonnant que sur la base d'un tel mode de production prenne naissance le mode de représentation correspondant. Son « style » doit refléter en lui ce double caractère. En effet, le « mode de représentation » du monde capitaliste se caractérise, d'une part, par ce que Marx a appelé le fétichisme de la marchandise, et d'autre part par ce même principe du « rang » que nous avons observé aussi dans la société féodale. L'assemblage de ces deux a principes constitutifs » nous donne le style fondamental du « mode de représentation » qui prévaut dans le monde capitaliste.

Qu'est-ce que le fétichisme de la marchandise  ?

Dans la société capitaliste-mercantile, l'entreprise travaille « indépendamment » pour un marché inconnu. Au fond, chaque travail est ici une particule du travail social, et toutes les particules dépendent les unes des autres. Mais ceci se passe de telle manière, que le lien social entre les hommes, qui travaillent, en fait les uns pour les autres, échappe aux yeux humains. Si nous avions en face de nous une société socialiste, où tout marche conformément à un plan, il serait clair alors pour tous que les hommes travaillent les uns pour les autres, que chaque aspect séparé du travail n'est qu'une particule de l'ensemble du travail social, etc. Les rapports entre les hommes seraient clairs, aucun brouillard ne les masquerait, mais il n'en est pas ainsi dans le monde capitaliste. Ici, ce lien de travail entre les hommes est invisible, il est caché aux hommes. Par quoi est-il caché  ? Par la cohue du marché. Sur le marché, les marchandises passent, s'achètent et se vendent. Mais ce ne sont pas les hommes qui, rationnellement, dominent le marché, c'est le marché qui, avec ses prix, domine les hommes. Les hommes voient le mouvement des choses, et, cependant, ils ne comprennent pas qu'ils travaillent les uns pour les autres, qu'ils sont tous liés par le lien général du travail. Ce lien de travail qui les unit leur apparaît sous l'aspect particulier de l'extraordinaire puissance des choses, des marchandises, sous l'aspect de la « valeur » de ces marchandises. Les rapports entre les hommes leur semblent des rapports entre les choses. C'est là le fétichisme de la marchandise, cette attribution aux choses de propriétés extraordinaires, tandis que leur mouvement dissimule en réalité le travail mutuel des hommes. Ce fétichisme, par lequel « des relations sociales définies entre les hommes... prennent à leurs yeux la forme fantastique de relations entre les choses » (Marx), qui constitue la particularité distinctive du a mode de représentation » capitaliste. Nous avons déjà vu comment les savants, artistes, philosophes, etc., de la classe bourgeoise se révoltent lorsqu'on parle des racines sociales de la science, de l'art et de la philosophie. Ils sont fétichistes jusqu'à la moelle des os ; car ils ne voient pas le lien social; ils ne peuvent pas comprendre que leur travail divin, inspiré est, lui aussi, une part de l'ensemble du travail social.

Le fétichisme du monde capitaliste apparaît avec un relief singulier dans le domaine de ce qu'on appelle les normes morales ou l' « éthique », dont les savants professeurs aiment par-dessus tout à disserter. Nous avons déjà expliqué que les Dormes éthiques sont des règles de conduite indispensables à la vie de la société, ou de la classe, ou du groupe professionnel, etc. Elles ont la signification de règles auxiliaires sociales indispensables. Cependant, dans la société fétichiste, cette signification humaine et sociale qu'elles ont n'est pas consciente. Au contraire, ces normes, c'est-à-dire ces règles techniques de conduite apparaissent comme un « devoir » suspendu sur les hommes comme une sorte de force extérieure, quasi divine, de contrainte : cet inévitable fétichisme éthique est très bien exprimé par le génial philosophe bourgeois Emmanuel Kant, dans sa théorie de l' « impératif catégorique »,

C'est d'une tout autre façon que le prolétariat doit voir la chose. Il ne peut pas se faire le héraut du fétichisme capitaliste. Pour lui, les normes de sa conduite sont des règles d'une même valeur technique que celles auxquelles obéit le menuisier pour faire un tabouret. Quand le menuisier veut faire un tabouret, il rabote, il scie, il assemble, etc. Cela découle du processus même de son travail. Il ne va pas s'occuper des règles de préparation du bois, ou de quoi que ce soit d'étranger à lui, pris dans un domaine autre que le sien. De même le prolétariat dans sa lutte sociale. S'il veut conquérir le communisme, il lui faut faire ceci et ceci, exactement comme le menuisier qui veut faire un tabouret. Et tout ce qui est conforme avec ce but doit être fait. L' « éthique » se transforme peu à peu pour le prolétariat en simples règles techniques de conduite, facilement compréhensibles et nécessaires pour arriver au communisme qui, ainsi, cessent d'être une éthique. Car c'est l'essence même de l'éthique d'être un ensemble de règles dissimulées sous une enveloppe fétichiste. Le fétichisme est l'essence de l'éthique. Là où disparaît ce fétichisme, l'éthique disparaît aussi. Il ne viendra par exemple à l'esprit de personne de qualifier le statut d'une coopérative ou d'un parti d' « éthique » ou de « moral ». Ceci parce qu'en ce cas, chacun saisit le sens humain de ce statut. L'éthique, elle, suppose un brouillard fétichiste, où plus d'un perd sa route. Ainsi le prolétariat a besoin de normes de conduite et très précises, mais il n'a nul besoin d' « éthique », c'est-à-dire de sauce fétichiste pour un mets utile. Il va de soi que le prolétariat lui-même ne se libérera pas d'un seul coup du fétichisme de la société mercantile dans laquelle il vit. Mais c'est là une autre question.

Le fétichisme de l'idéologie capitaliste-mercantile se combine avec le principe du « rang », et ces deux principes constitutifs fondamentaux constituent le pivot du mode de représentation capitaliste, le cadre dans lequel s'insère son contenu idéologique. Ainsi la société capitaliste est, elle aussi, une espèce de société, avec des traits particuliers, caractéristiques, à tous les « étages » de la vie sociale, jusque et y comprises les plus hautes constructions idéologiques. Ainsi un type de structure économique suppose aussi un type de structure sociale et politique et un type de structure idéologique. La société a un « style » fondamental dans toutes les manifestations dominantes de sa vie.


Notes

[1] Leveller (niveleur), nom donné aux révolutionnaires anglais.


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