1933

Biulleten Oppositsii, n°38/39, février 1934. Signé Alfa.


Œuvres - décembre 1933

Léon Trotsky

Notes d’un journaliste

12 décembre 1933


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L'épuration du parti

Il a fallu une bonne récolte en Ukraine et la reconnaissance du gouvernement soviétique par Roosevelt [1] pour que la bureaucratie stalinienne daigne convoquer un congrès du parti après un intervalle de trois ans et demi [2]. Le congrès du parti est destiné non pas à décider de la politique à mener dans ces conditions difficiles, mais à chanter les louanges des chefs, étant donné ces succès épisodiques.

Mais, même dans les conditions mentionnées ci‑dessus, la nécessité d'une épuration du parti préalable à la convocation du congrès s'est fait sentir. Elle a eu lieu en fonction de critères divers. Il ne fait aucun doute qu'un certain nombre de vauriens et d'agents des ennemis de classe ont été balayés. Dans ce régime, il est impossible d'évaluer le pourcentage qui en reste à l'intérieur du parti. Mais l'objectif principal de l'épuration était de terroriser le parti avant le congrès. Bien sûr, le parti est suffisamment apeuré sans cela. Mais qui sait ? Ne serait‑il pas possible que le mécontentement qui s'accumule dans les masses surgisse au grand jour sous la forme d'une discussion avant le congrès ? C'est pourquoi, en guise de préambule au congrès, on procéda, non à une discussion, mais à une épuration. Cette fois‑ci, on a chassé décidément tous ceux qui avaient manifesté un penchant quelconque pour la discussion à l'intérieur du parti.


Il faut au moins trois paires de lunettes pour juger d'après la Pravda du déroulement de l'épuration. Ces gens‑là sont tellement adonnés au mensonge qu'ils ne peuvent plus s'arrêter dans leur élan, même au cas où une petite parcelle de vérité se retournerait en leur faveur. Mais, en tout cas, une chose est claire : le « trotskysme » ne laisse pas la bureaucratie en paix. On ne dit plus que « le trotskysme est écrasé, enterré et ainsi de suite », la tendance est plutôt à exagérer sa force.

On retrouve le « trotskysme » dans tous les articles et entrefilets sur l'épuration, et, en outre, sous deux aspects. D'une part, sont considérés comme « trotskystes » ceux des bureaucrates qui, étant les plus compromis, ne peuvent plus sauver leur peau, et, d'autre part, on inclut dans la catégorie « trotskysme » toute critique du bureaucratisme. Ces deux caractéristiques s'excluent l'une l'autre. Mais l'appareil stalinien ne peut se passer ni de l'une, ni de l'autre : il faut absolument que la culpabilité pour les crimes des staliniens les plus haïs par la foule retombe sur le « trotskysme ». Mais il faut par ailleurs rappeler à tous ceux qui pensent, qui critiquent et qui sont courageux, que, s'ils ne se calment pas, on les traitera comme il convient à des trotskystes.

La Pravda, en faisant le bilan de l'épuration, déplore les obstacles auxquels l'appareil doit se heurter de la part des ennemis du parti : « Il est caractéristique, écrit ce journal, que, dans toutes ces activités, un rôle actif soit joué par ces trotskystes qui n'ont pas désarmé. Lors de l'épuration, ils arrivent par groupes de divers endroits et se démènent comme des diables pour disculper leurs amis et les préserver en vue d'actions futures. Généralement, ils ont recours à des méthodes de dissimulation. Au lieu de se manifester ouvertement, ils sèment leurs graines de contre-révolution sous prétexte de poser des questions, de faire des remarques, de fournir des explications, et ainsi de suite. »

Dans ces mots résonne toute la sincère indignation de la buraucratie effrayée : l'ennemi sème « les graines de la contre-révolution », par des questions, des remarques et de simples explications. Combien tendues, combien saturées de mensonges faut‑il que soient les relations entre les ouvriers et MM. les épurateurs, pour qu'il soit nécessaire de s'acharner contre des questions banales dès lors qu'elles menacent de dévoiler les mécanismes de la direction.

Koltsov à Paris

Koltsov [3], correspondant de la Pravda, envoie des télégrammes de Paris pour informer les ouvriers russes du déroulement du procès de Leipzig [4]. Voici ce qu'il écrit :

“ L'ancien trotskyste, aujourd'hui député nazi au Reichstag, Karwahne [5], se présente à la barre des témoins. Son rôle actuel est tout à fait en accord avec son passé... Ce qui est le plus remarquable dans la déposition de Karwahne, c'est qu'elle est tout entière consacrée à la défense des positions du groupe trotskyste de Katz [6], lequel combattait, voyez‑vous, “le régime interne impossible du parti communiste allemand”. Un député fasciste se faisant le champion des thèses trotskystes pendant un procès fasciste, et en présence de combattants communistes qu'on est en train !de condamner à mort, voilà ce que les graines des idées trotskystes ont donné comme digne récolte. ”

Des dizaines de milliers de staliniens sont déjà passés et passent encore au national‑socialisme. Nombre d'entre eux se sont présentés comme témoins au procès de Leipzig [7]. Parmi ces renégats, il aurait pu se trouver un ancien de l'Opposition de gauche. Mais ni le groupe d'Iwan Katz, ni Karwahne, n'ont jamais été en liaison avec le “ trotskysme ”. Non seulement Karwahne avait rejeté les idées du parti communiste dont il fut membre pendant un temps, mais il rejetait aussi les idées semi‑anarchistes du groupe d'Iwan Katz. Koltsov refuse toutefois de pardonner à Karwahne son passé. Koltsov est intransigeant en ce qui concerne le passé. Ne serait‑ce pas parce que son propre passé est parfaitement irréprochable ?

Non, ce n'est pas pour cela : Koltsov est le type achevé du carriériste intrigant. Pendant la révolution d'Octobre, il fut l'ennemi acharné des bolcheviks ; pendant la guerre civile, il se cachait en Ukraine, collaborant aux journaux de Petljura [8] et autres Gardes‑blancs. Après que l'Armée rouge eût chassé les Blancs d'Ukraine, il se rendit à Moscou. Parfaitement conscient qu'il n'avait pas le choix, Koltsov mit sa plume alerte au service de la dictature du prolétariat (à condition évidemment qu'on lui donne un logement et un payok – une carte d'alimentation – de privilégié). Boukharine, alors directeur de la Pravda, était bien embarrassé : “ Sa plume ne manque pas de vivacité, disait‑il, mais c'est un bien vilain monsieur ! ” Après l'apparition de l'Opposition de gauche, Koltsov, pendant un certain temps, ne sut pas de quel côté se tourner et essaya de s'entendre avec les deux camps. En outre, conformément à sa nature, il avait pris l'habitude de faire le beau devant Sosnovsky !, le meilleur et le plus influent des journalistes soviétiques. Au moment où les dirigeants de l'Opposition de gauche furent exilés (décembre 1927), Koltsov commença à faire circuler des ragots sur Sosnovsky, afin de se blanchir totalement aux yeux des dirigeants.

Il ne s'en tira pas impunément. La femme de Sosnovsky le gifla au théâtre Bolchoï à Moscou. Non seulement les oppositionnels de gauche, mais même les plus endurcis des bureaucrates saluèrent chaleureusement le “ geste ” de cette révolutionnaire énergique, et tout le monde, sans distinction de tendance, trouva que jamais gifle n'avait si bien atteint son but.

Après ces quelques renseignements biographiques, nous sommes sûrs que les communiqués parisiens de Koltsov concernant le “ trotskysme ” de Karwahne n'ont pas besoin de commentaires.

L'ennemi de classe

Vers la fin d'octobre, les ingénieurs, techniciens et ouvriers de la mine Butovka, dans la région du Don, ont rendu publics, dans une lettre adressée à Staline, les succès qu'ils avaient remportés : « La première victoire, écrivaient‑ils, ne fut pas facile : les agents de l'ennemi de classe, camouflés sous des blouses de mineur, nous ont fait une opposition féroce, et, dans l'obscurité de la mine, poursuivaient leurs sombres agissements, essayant de détraquer les machines, d'inonder le puits et d'obstruer les galeries. »

« L'ennemi de classe camouflé sous une blouse de mineur » n'est autre qu'un ouvrier mécontent. Cet extrait de la lettre démontre avec une tragique éloquence que le problème ici ne concerne pas que des éléments isolés et démoralisés, mais une lutte de masse, une guerre civile dans les mines. Si la victoire contre le sabotage n'a pas été « facile », c'est parce que les vainqueurs n'avaient pas le soutien des masses. Les auteurs de cette lettre ne nourrissent aucune illusion sur la stabilité d'une « victoire » remportée dans de telles conditions. Nous n'en resterons pas là, écrivent‑ils, nous ne pouvons pas en rester là. Nous savons que, avant le congrès, l'ennemi de classe et les saboteurs n'ont pas été écrasés. Ils se sont cachés pour attendre leur heure et accomplir leur besogne de destruction.

En dépit de la terminologie byzantine qu'on leur impose, les auteurs de la lettre font clairement apparaître comment et pourquoi l'ouvrier se transforme en ennemi de classe. Tout en énumérant les victoires, la lettre admet au passage que « dans le domaine de l'amélioration des conditions de vie et de culture... nous sommes toujours à la traîne ». Que se cache‑t‑il derrière ces mots ? Peut‑être pouvons‑nous tirer de l'inventaire des succès et victoires une réponse partielle : « Le jardinage individuel s'est largement répandu dans notre mine... Nos cadres sont tout à fait assurés de ne pas manquer de légumes pendant l'hiver. » Cette dernière phrase est imprimée en gros caractères dans le journal pour souligner l'importance de la victoire. Les jardins individuels impliquent qu'après une dure journée de travail, les ouvriers doivent bêcher leurs parcelles comme des paysans chinois ; en conséquence de ce double travail, les cadres ouvriers, c'est‑à‑dire l'aristocratie de la mine, sont certains d'avoir des légumes tout au long de l'hiver.

Et voilà quelle est la réalité, même perçue à travers le prisme des louanges des dépêches officielles.

Une citrouille dans le bureau du directeur

La Pravda décrit avec enthousiasme comment un directeur responsable d'une usine d'instruments de précision s'occupe en même temps d'un jardin, de production laitière, d'élevage de lapins, etc. « Cet été », écrit ce journal, « pendant la sécheresse, les ouvriers, après leur journée de travail, venaient dans les jardins du kolkhoze, munis de seaux pour arroser les plantations et leur éviter de sécher. » On nous parle là du jardin d'une usine. Mais que devient, dans cette affaire, la journée de sept heures ? La Pravda, toujours transportée, cite les résultats de ce double travail : « Des légumes seront fournis en suffisance aux cuisines de l'usine. Les ouvriers recevront une part non négligeable de la récolte pour leur usage personnel. » Quelle effroyable tension dans la situation alimentaire apparaît à travers cet article attendrissant !

« Non seulement, mais encore »

En 1920, pour éviter l'effondrement du réseau des transports, le congrès du parti, sur proposition de Trotsky, institua ce qu'on appela les sections politiques [9] dans les chemins de fer, c'est‑à-dire des organismes du parti soigneusement sélectionnés et militarisés, placés au‑dessus des syndicats du transport et des organismes locaux du parti. Cette mesure d'urgence eut des résultats : l'amélioration des transports. Mais les ouvriers manifestèrent leur hostilité à ces sections politiques qui empiétaient sur la démocratie syndicale. Au début de 1921, les sections politiques furent supprimées et l'ordre normal rétabli.

Aujourd'hui, ce sont une fois de plus les sections politiques qui régissent les transports, et, cette fois, avec les pleins pouvoirs. Dans un rapport public, Zimine [10], le chef de la direction politique, ne s'est pas montré du tout optimiste dans sa description de la situation des chemins de fer et en particulier des résultats atteints à travers la reconstitution des sections politiques. Zimine découvre partout les activités des Blancs, d'ennemis et de saboteurs, et, après chaque dénonciation, ne manque jamais de souligner que « tout cela se passait aux yeux et à la barbe des communistes ».

Le rapporteur n'offre aucune explication de cette indifférence de la part des communistes. Selon lui, les réformes administratives introduites par les sections politiques se heurtent à chaque pas à une résistance. « Il faut, dit‑il, souligner que le sabotage est courant, non seulement au bas de l'échelle, mais aussi à l'intérieur de l'appareil dirigeant des routes et du NKPS (Commissariat du peuple aux transports). » Cette formule jetée en passant traduit parfaitement l'âme de l'actuel régime soviétique. Pendant les premières années après la révolution, les foyers de sabotage étaient les bureaux, les départements et organes administratifs et toutes sortes d'états‑majors de vieux spécialistes. La lutte contre le sabotage était menée grâce à un contrôle d'en bas, c'est‑à‑dire grâce aux ouvriers de la base. Aujourd'hui, cette relation mutuelle est inversée : ce qui exaspère Zimine, c'est que le sabotage se rencontre non seulement chez les ouvriers (ça, c'est pour ainsi dire dans l'ordre des choses), mais aussi chez les cadres plus élevés dont la mission est de préserver le régime. Sans le vouloir, le dictateur politique des transports a parfaitement défini les bases politiques de la dictature stalinienne tout entière.


La lutte pour la qualité

La rédaction de la Pravda n'explique pas, ne critique pas, mais elle commande. Elle « attire l'attention », « met en lumière », « exige des explications immédiates ». Puisque la question de la qualité des produits est à l'ordre du jour (et pour être plus précis, ceci depuis des années), la Pravda, d'un ton sans appel, publie ses instructions sur la manière d'améliorer l'acier, les cotonnades et les transports.

Mais à propos de la qualité de la Pravda elle‑même ? De toute évidence, il n'y a personne qui soit susceptible d'« attirer l'attention » sur elle et de la « mettre en lumière ». En attendant, la qualité de ce journal, qui dispose de ressources et de possibilités exceptionnelles, est très médiocre. Il est imprimé sur un papier de la pire espèce ; parmi les journaux du monde entier, la Pravda se remarque par sa grisaille et son papier poreux. L'impression est mauvaise, l'encre épouvantable. Mais le pire, c'est le journal en tant que journal. Au lieu de nouvelles, un bavardage à n'en plus finir. Au lieu d'articles politiques, des décrets administratifs. A chaque colonne, de répugnantes flatteries à l'égard du « chef génial », du « grand théoricien », et ainsi de suite. Le tout écrit dans le style d'un fonctionnaire raté qu'on a chargé de l'« idéologie » parce qu'il n'est bon à rien d'autre.

Incapables d'apprendre

La résolution du 13° plénum du C.E. de l'I.C. (dont il est question en détail dans le même numéro) nous enseigne entre autres : « Le pouvoir soviétique est la forme d'Etat de la dictature démocratique‑révolutionnaire du prolétariat et de la paysannerie, assurant la transformation de la révolution démocratique-bourgeoise en révolution socialiste (Chine, etc.). » La dictature démocratique, contrairement à la dictature socialiste, est bourgeoise (ou, si l'on veut, petite­-bourgeoise). La dictature bourgeoise ne peut pas « se transformer » en dictature prolétarienne sans qu'une révolution prolétarienne ait eu lieu. Le Comintern a déjà dirigé ses efforts vers une « transformation » de la dictature du Kuomintang en dictature du prolétariat [11]. Cette politique a eu pour résultat l'écrasement du prolétariat par le Kuomintang. Aujourd'hui encore, la politique du Comintern ne prépare rien d'autre aux peuples d'Orient. La tragédie de Shanghai n'a rien appris aux cancres de l'hôtel Lux [12].


Notes

[1] C'est le 17 novembre 1933 que le gouvernement des Etats‑Unis, dont Franklin Roosevelt était président depuis le 4 mars, avait reconnu le gouvernement de l'U.R.S.S.

[2] Le 16° congrès du parti avait eu lieu du 26 juin au 13 juillet 1930. Le 17° venait d'être convoqué pour le 26 janvier 1934.

[3] Mikhail M. Ginzburg, dit Koltsov (1898‑1942), jouissait de la confiance de Staline et était plus qu'un journaliste, un porte‑parole officieux. Il était alors correspondant de la Pravda à Paris.

[4] Le procès qui se déroulait à Leipzig était celui de Dimitrov et de ses camarades communistes accusés d'avoir incendié le Reichstag. Koltsov n'y assistait pas, mais le commentait de Paris.

[5] Berthold Karwahne (1887‑1957) avait été l'un des dirigeants du K.P.D. à Hanovre et membre d'une fraction “ ultra‑gauchiste ” (Cf. note suivante). Il avait été exclu en 1926, avait rompu avec ses camarades de fraction, et avait rejoint avec beaucoup d'éclat le parti nazi en 1927 ; il avait été élu député au Reichstag en 1930.

[6] lwan Katz (1889‑1956), militant social‑démocrate avant la guerre, avait rejoint l'U.S.P.D. en 1919 et le K.P.D. en 1920 après le congrès de Halle de l'U.S.P.D. Député au Landtag de Prusse, il avait été un des porte‑parole de la gauche, assurant la liaison entre Moscou et la Zentrale allemande. A l'été de 1925, il avait rompu avec la gauche et organisé sa propre fraction, ultra‑gauchiste, qui avait pris la majorité dans l'organisation du parti de Hanovre. Exclu du K.P.D. en janvier 1926, il avait fondé alors la “ Ligue Spartakus des organisations communistes de gauche ” qui s'était rapidement décomposée; il s'était tenu dès lors à l'écart de l'activité politique, ce qui n'avait pas empêché les nazis de l'arrêter en 1933. Comme tous les militants de tendance ultra‑gauchiste, il n'avait pas la moindre sympathie ni pour Trotsky ni pour le “ trotskysme ”.

[7] Au procès de Leipzig, l'accusation avait présenté comme “ témoins à charge ” nombre d'anciens militants du K.P.D. dont certains sortaient directement des mains de la Gestapo et d'autres se présentaient “ volontairement ”. Ces hommes devaient plus tard s'entredéchirer âprement. Willi Kerff (né en 1897), ancien dirigeant du parti en Thuringe, collaborateur du C.C. en 1923, figura parmi ces témoins. Il fut accusé d''être agent de la Gestapo par un autre témoin, Walter Dittbender (1891‑1937), dirigeant du Secours rouge, finalement fusillé en U.R.S.S. comme... agent de la Gestapo. Un nombre non négligeable de cadres staliniens s'étaient rangés du côté des vainqueurs et les servaient ; le K.P.D. clandestin multipliait à l'époque les mises en garde concernant Wilhelm Hein (1889‑1958), membre du comité central et suppléant du bureau politique, ami et proche collaborateur de Thälmann. On sait que la plupart des arrestations qui démantelèrent la direction clandestine du K.P.D. furent opérées à la suite de trahisons venues des sommets de l'appareil. C'est ainsi que John Schehr (1896‑1934), successeur de Thälmann, avait été livré à la Gestapo par un autre haut responsable, Alfred Kattner, abattu peu après en représailles. Le cas le plus connu est cependant celui de Werner Kraus (1898‑1964), ancien dirigeant du K.P.D. en Poméranie, puis en Prusse orientale, député communiste, qui apparut au lendemain de l'incendie du Reichstag en uniforme de S.A. – avec le grade de Sturmführer – et collabora avec la Gestapo, pour l'arrestation de ses anciens camarades, avec un grand succès. Les spécialistes estiment aujourd'hui qu'il avait été infiltré par les nazis dans les rangs du K.P.D. Il ne s'y était évidemment maintenu en si bonne position qu'en participant activement, avant 1933, à la “ chasse aux trotskystes ” dans les rangs du parti.

[8] Simon V. Petljura (1879‑1926), ancien militant social‑démocrate, avait pris temporairement la tête d'un gouvernement de l'Ukraine qui s'appuyait sur la Pologne et les Alliés, et son bref règne avait donné lieu à de sanglants pogroms antisémites.

[9] En russe : politotgiel, abréviation de polititcheskii omgiel (section politique).

[10] Nous n'avons trouvé aucune indication sur ce haut fonctionnaire.

[11] Allusion à la politique, menée en 1926‑1927 en Chine par I'I.C., de soutien du gouvernement nationaliste du Kuomintang, qui s'était terminée tragiquement par le massacre des communistes et l'extermination des cadres du mouvement ouvrier par le général Chang Kaï‑chek, chef de l'armée du Kuomintang.

[12] « La tragédie de Shanghai » est une allusion au coup du 17 avril 1927, le massacre des communistes et syndicalistes de la ville par les troupes de Chang, appuyées sur la police et les hommes de main fournis par la pègre du port, avec l'appui financier des banques étrangères et des gouvernements impérialistes. L'hôtel Lux était l'hôtel de Moscou où étaient logés les membres de l'appareil dirigeant de l'I.C. et ses visiteurs étrangers.


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