1939

Le bilan du "Frente Popular" espagnol selon les trotskystes : "Battre le fascisme, seule la révolution prolétarienne le pouvait. Or, toute la politique des dirigeants républicains, socialistes, communistes et anarchistes, tendait à détruire l'énergie révolutionnaire du prolétariat."

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L'Espagne livrée

M. Casanova

Comment le Front Populaire a ouvert les portes à Franco


IV. L'armée républicaine et ses contradictions

- Nous connaissons les effets de la politique du Front Populaire, parce qu'ils sont les mêmes en France, mais le gouvernement républicain disposait tout de même d'une armée, qui avait résisté victorieusement à Madrid, engageait parfois des opérations avec succès, comme à Belchite, Téruel, sur l'Ebre, etc.., avec un commandement unique. Le retour aux conceptions bourgeoises a-t-il eu pour effet un renforcement de la valeur (discipline, coordination, moral) de l'armée républicaine ?

- Ah oui !, répond notre camarade. « Mando unico » (le commandement unique), tel était le mot d'ordre, du reste juste, des staliniens et de tous les républicains, so­cialistes compris. On faisait ressortir même le service énorme qu'il a rendu pendant la « Grande Guerre » aux Alliés. Mais on oubliait qu'en Espagne, il s'agissait d'une guerre civile.

Le commandement unique était nécessaire, (et même urgent au début), mais on avait besoin d'un état-major prolétarien et révolutionnaire, dévoué à la classe ou­vrière et sous son contrôle.

Au contraire, l'Etat-Major était composé de quelques officiers supérieurs de la monarchie, comme le général Pozas, plus tard limogé dans des circonstances mystérieuses, après la débâcle d'Aragon, et qui est rentré en grâce en chantant les louanges du « grand Staline » ; d'autres, dont le « républicanisme » ne s'est pas révélé sûr en toutes circonstances, et de nouveaux venus qui étaient prêts à recevoir des médailles et à accéder au grade de lieutenant-colonel ou même de colonel, mais qui, au moment du danger, passaient avec les plans chez Franco. Il y avait évidemment dans l'Etat-Major des hommes honnêtes et dévoués, mais ils étaient une infime minorité.

Il fallait un commandement unique procédant avec une main de fer, mais un commandement comme celui de Léon Trotsky en 1917-1921 en Russie. Pour cela, il fallait un pouvoir révolutionnaire, une dictature du prolétariat et un parti révolutionnaire conscient de sa tâche à l'image du parti bolchevick de 1917. Tout cela n'existait pas en Espagne.

Il a été prouvé théoriquement et maintenant, hélas, aussi empiriquement, qu'en Espagne une armée forte, expression d'un pouvoir fort, n'était possible que sur la base fasciste ou sur la base de la dictature du proléta­riat. Le gouvernement de Négrin n'a pas su créer une armée forte et coordonnée. Evidemment, il ne s'agit pas de Négrin personnellement qui n'est que l'expression d'un certain rapport temporel des forces entre les différentes classes sociales et courants politiques, mais de toute l'orientation vers la république démocratique.

Veux-tu une preuve de la faillite des docteurs du Front populaire en matière militaire ? En voilà une, et de poids.

Dans les discours officiels on disait toujours : « Finie, la période des milices chaotiques de la première pé­riode romantique de la révolution, de ces maudites « tri­bus » ! [1]. Enfin, nous possédons une armée régulière, disciplinée et organisée. De nouveaux cadres - ajoutait­-on - sont créés ». Seulement, quand venait le moment du danger, tout ce château de cartes tombait... et on faisait appel aux organisations ouvrières... aux maudits comités (prétendue source du gâchis) et aux volontaires. Cela s'est répété deux fois. Au mois de mars-avril 1938, quand Prieto a fait appel aux 100.000 volontaires pour l'armée et aux 50.000 pour les travaux de fortification. C'était dans les locaux des organisations, des partis, qu'on engageait, comme dans la maudite période des milices. Et cela s'est encore répété, fin de décembre 1938 on a fait appel aux volontaires et aux organisations.


Notes

[1] C'est ainsi que le stalinien Comorera a qualifié les héroïques colonnes de Durruti, Jubert, Rovira, parties en juillet 1936 en direction de Huesca et Saragosse. Au point de vue organisation, il y avait du vrai dans le définition de Comorera, mais les « tribus » luttaient héroïquement, tandis que son Ejercito Popular était commandée par des traîtres.


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