1971

"Nous prions le lecteur de n’y point chercher ce qui ne saurait s’y trouver : ni une histoire politique de la dernière République espagnole, ni une histoire de la guerre civile. Nous avons seulement tenté de serrer au plus grès notre sujet, la révolution, c’est-à-dire la lutte des ouvriers et des paysans espagnols pour leurs droits et libertés d’abord, pour les usines et les terres, pour le pouvoir politique enfin."

P. Broué

La Révolution Espagnole - 1931-1939

Problèmes et querelles d'interprétation - IV. Les conquêtes révolutionnaires

Les réalisations des ouvriers et des paysans espagnols dans leur réplique révolutionnaire au pronunciamiento de la contre-révolution n’ont pas toutes également piqué la curiosités et intéressé les chercheurs. Le « deuxième pouvoir », celui des comités, n’a guère retenu l’attention, même dans ses aspects les plus inédits. En revanche, et, sans doute, depuis mai 1968, du fait de ce que l’on peut, sans crainte d’offenser qui que ce soit, appeler la « mode » de l’autogestion, les études se sont multipliées sur les entreprises « collectivisées », « saisies » et « autogérées » [1]. Nous avouons qu’il nous semble que ce type d’études marque actuellement le pas. On peut sans doute multiplier encore les études sur les mille et une manières dont les ouvriers ou les paysans espagnols ont cherché à se rendre maîtres de l’outil de production et de leur propre activité de producteurs : on n’avance pas d’un pas vers le règlement des problèmes fondamentaux posés par la plus partielle de ces études : celui de la centralisation économique essentielle à la plus élémentaire planification, elle-même condition de la maîtrise de l’homme sur la production qui était l’objectif recherché par les révolutionnaires. La suppression de l’argent dans les communautés agricoles d’Aragon n’a pas - il s’en faut - réglé le problème du crédit, et c’est au niveau de ce dernier que resurgissent les problèmes proprement politiques, pratiquement négligés ou méprisés dans l’étude des réalisations de la révolution, ce qui n’est sans doute pas le résultat du hasard.

Notes

[1] Voir notamment Mintz, L’autogestion dans l’Espagne révolutionnaire, et Gaston Leval, L’Espagne libertaire.

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