1921

Publié intégralement pour la première fois en 1963 dans Le Xe Congrès du P.C.(b)R. 8-16 mars 1921. Compte rendu sténographique

Œuvres t. 32, pp. 173-216, 219-251, 260-274, 278-286, Paris-Moscou. Traduction revue.


Lénine

Xe CONGRÈS DU P.C. (b)R.

(8-16 MARS 1921)


CONCLUSION SUR LE RAPPORT D'ACTIVITÉ DU COMITÉ CENTRAL DU P.C.(b)R.
LE 9 MARS

(Applaudissements prolongés.)

Camarades, il fallait tout naturellement s'attendre après le rapport d'activité politique du Comité central, à ce que la critique, les observations, les additifs et les amendements, etc., portent principalement sur le travail politique, sur les erreurs politiques, et à ce que des indications d'ordre politique soient formulées.

Malheureusement, en étudiant les débats qui se sont déroulés ici, en examinant une fois de plus les points principaux soulevés au cours de ces débats, on ne peut s'empêcher de se demander : si le congrès a si rapidement clôturé ces débats, n'est-ce pas parce qu'on y a dit des choses incroyablement creuses et que les représentants de l'«opposition ouvrière» ont été presque seuls à intervenir? En effet, qu'avons-nous entendu sur le travail politique du Comité central et les tâches politiques d'actualité ? La plupart des orateurs se sont réclamés de l'«opposition ouvrière», ce n'est pas un titre pour rire !... Et ce n'est pas une plaisanterie que de constituer une opposition à un tel moment, dans un parti comme le nôtre!

La camarade Kollontaï, par exemple, a dit carrément : «Dans son rapport, Lénine a éludé Cronstadt.» Lorsque j'ai entendu ces mots, je suis resté stupéfait. Tous les congressistes savent parfaitement, - bien sûr, dans les comptes rendus des journaux il faudra parler moins ouvertement, - qu'ici même, dans mon rapport, j'ai tout ramené aux leçons de Cronstadt, tout, depuis le début jusqu'à la fin [1] ; et j'ai peut-être davantage mérité le reproche d'avoir beaucoup parlé dans mon rapport des leçons pour l'avenir découlant des événements de Cronstadt, et moins des erreurs du passé, des faits politiques et des points cruciaux de notre travail qui, à mon avis, déterminent nos objectifs politiques et nous aident à éviter les erreurs commises.

Qu'avons-nous entendu ici à propos des leçons de Cronstadt ?

Lorsque certains interviennent au nom de l'opposition et qualifient cette opposition d'«ouvrière » pour dire que le Comité central a mal dirigé la politique du parti, on doit leur répondre : indiquez ces erreurs sur les questions essentielles et indiquez les moyens de les rectifier. Malheureusement, nous n'avons absolument rien entendu de tel, pas un son, pas un mot sur la situation actuelle et ses enseignements. Les orateurs n'ont même pas abordé la conclusion que j'ai tirée. Il se peut fort bien qu'elle soit fausse, mais si l'on présente un rapport d'activité au congrès c'est bien pour que l'on en corrige les erreurs. Assurer la cohésion du parti, interdire l'opposition, telle est la conclusion politique de la situation actuelle ; la conclusion économique est la suivante : ne pas se contenter de ce qui a été fait dans la politique d'entente entre la classe ouvrière et les paysans, chercher des voies nouvelles, s'en servir, les éprouver. J'ai indiqué de façon concrète ce qu'il faut. Il est possible que ce ne soit pas juste. Mais personne n'en a soufflé mot. Un des orateurs, Riazanov je crois, m'a seulement reproché d'avoir mentionné dans mon rapport l'impôt, de but en blanc, sans que la question ait été préparée par une discussion. Ce n'est pas exact. Je suis surpris que des camarades responsables fassent au congrès des déclarations de ce genre. La discussion sur l'impôt a été engagée il y a plusieurs semaines dans la Pravda. Si les camarades qui se complaisent à jouer à l'opposition et à nous reprocher de ne pas permettre une large discussion, n'ont pas voulu y participer, ce sont eux les coupables. Nous sommes en liaison avec la Pravda non seulement parce que le camarade Boukharine est membre du Comité central, mais aussi parce que les sujets les plus importants et les orientations politiques les plus importantes sont toujours discutés par le Comité central, sinon il n'y aurait pas de travail politique possible. Le Comité central a ouvert la discussion sur l'impôt. La Pravda a publié des articles. Personne n'y a répondu. Ceux qui n'ont pas répondu ont démontré qu'ils ne voulaient pas s'occuper de cette question. Et lorsque après la parution de ces articles, au cours d'une réunion du Soviet de Moscou, quelqu'un - je ne me souviens pas s'il était sans-parti ou menchevik - a pris la parole pour parler de l'impôt, j'ai dit : vous ignorez ce qu'écrit la Pravda. Il était plus naturel d'adresser ce reproche à un sans-parti qu'à un membre du parti. Ce n'est pas par hasard que la discussion a été engagée dans la Pravda ; nous aurons à envisager cette question à ce congrès. Dans leurs critiques, les orateurs ont fait preuve d'un manque total d'esprit pratique. La question avait été soumise à la discussion, il fallait y participer, sinon toute cette critique est sans fondement. Il en est de même pour le problème politique. Je le répète, toute mon attention visait à tirer une conclusion juste des derniers événements.

Nous traversons une époque où un péril sérieux nous menace ; comme je l'ai déjà dit, la contre-révolution petite-bourgeoise est plus dangereuse que Dénikine [2]. Les camarades ne l'ont pas nié. Cette contre-révolution a ceci de particulier qu'elle est petite-bourgeoise, anarchiste. J'affirme qu'il existe un lien entre les idées, les mots d'ordre de cette contre-révolution petite-bourgeoise, anarchiste, et les mots d'ordre de l'«opposition ouvrière». Aucun des orateurs n'a répondu à cela, et pourtant, ce sont surtout des représentants de l'«opposition ouvrière» qui ont pris la parole. Cependant, la brochure de l'«opposition ouvrière», publiée à l'occasion du congrès par la camarade Kollontaï, le confirme avec on ne peut plus d'évidence. Et c'est à cette brochure que je devrai m'arrêter le plus longtemps, pour vous expliquer pourquoi la contre-révolution dont j'ai parlé prend une forme anarchiste, petite-bourgeoise, pourquoi elle est si immense et si dangereuse, et pourquoi les représentants de 1'«opposition ouvrière» qui prennent ici la parole ne comprennent absolument pas ce danger.

Mais avant de répondre aux représentants de 1'«opposition ouvrière» qui sont intervenus ici, je dirai, pour ne pas l'oublier, quelques mots sur un autre sujet, sur Ossinski. Ce camarade, qui a écrit pas mal de choses et présenté un programme à lui, est intervenu pour critiquer le rapport d'activité du Comité central. Nous nous attendions à ce qu'il fît au congrès la critique des principales mesures, critique d'une extrême importance pour nous. Au lieu de cela, il a dit que nous avons soi-disant «exclu » Sapronov, ce qui prouverait que nos paroles sur la cohésion nécessaire sont en divorce avec nos actes ; il a souligné que deux représentants de l'«opposition ouvrière» avaient été élus au présidium. Je suis étonné de voir qu'un publiciste très en vue du parti et un responsable occupant un poste aussi élevé puisse faire état de telles vétilles de dixième ordre ! Le trait marquant d'Ossinski est de voir partout de la politicaillerie. Il voit de la politicaillerie dans le fait que l'«opposition ouvrière » a reçu deux places au présidium.

J'ai signalé à une réunion du parti à Moscou et, malheureusement, il faut que je le répète à présent au congrès, que l'«opposition ouvrière» a marqué son apparition en octobre et en novembre en amenant le système des deux locaux, la formation d'une fraction.

Nous avons dit maintes fois, et je l'ai dit moi-même en particulier,- sur ce point il n'y a pas eu de divergences au C.C. - que notre tâche était de séparer dans 1'«opposition ouvrière » les éléments sains des éléments malsains, justement parce qu'elle a reçu une certaine diffusion et a nui au travail à Moscou. En novembre, quand a eu lieu la conférence dans deux locaux [3], les uns siégeant ici, et les autres dans une autre pièce, au même étage, lorsque moi aussi j'ai eu à en pâtir et faire le commissionnaire d'une pièce à l'autre, c'était de l'ouvrage gâché, le début de l'activité fractionnelle et de la scission.

Dès septembre, pendant la conférence du parti [4], nous estimions que notre tâche était de séparer les éléments sains des malsains, car on ne saurait considérer que ce groupe soit sain. Lorsqu'on nous dit qu'il n'y a pas assez de démocratie, nous répondons : c'est absolument vrai. Oui, il n'y a pas assez de démocratie. Nous avons besoin d'aide, d'indications sur la façon d'appliquer la démocratie. Il faut qu'elle soit vraiment appliquée, et non en paroles. Nous acceptons aussi ceux qui se réclament de l'«opposition ouvrière », ou même qui ont une appellation plus vilaine, bien que je pense qu'il n'y a pas d'appellation pire et plus impudente pour des membres du parti communiste que celle-ci. Même s'ils inventaient un nom plus laid encore, nous nous dirions : puisque c'est une maladie qui contamine une partie des ouvriers, il faut redoubler d'attention à son sujet. Et ce que le camarade Ossinski nous a reproché, on ne sait pour quelle raison, doit être considéré comme un mérite.

A présent, je passe à 1'«opposition ouvrière». Vous avez reconnu que vous êtes restés dans l'opposition. Vous êtes venus au congrès du parti avec la brochure de la camarade Kollontaï, avec une brochure portant l'inscription : «opposition ouvrière». Lorsque vous remettiez les dernières épreuves, vous étiez au courant des événements de Cronstadt et de la contre-révolution petite-bourgeoise qui montait. Et c'est à ce moment-là que vous venez avec le titre d'«opposition ouvrière» ! Vous ne comprenez pas la responsabilité que vous assumez, ni comment vous violez l'unité ! Au nom de quoi ? Nous vous interrogerons, nous vous ferons passer ici un examen.

Le camarade Ossinski a employé cette expression dans un sens polémique ; il voyait une faute ou une erreur de notre part ; tout comme Riazanov, il voyait de la politicaillerie dans notre politique à l'égard de l'«opposition ouvrière ». Il n'y a pas là de politicaillerie, il y a la politique que mène et que mènera le C.C. Lorsqu'il existe des groupes malsains, des tendances malsaines, il faut leur prêter trois fois plus d'attention.

S'il y a quelque chose de sain dans cette opposition, il est indispensable de consacrer toutes nos forces à séparer les éléments sains des malsains. Nous ne pouvons pas l'emporter pleinement sur la bureaucratie ni appliquer une démocratie conséquente, parce que nous sommes faibles, nous manquons de forces ; quiconque pourra nous y aider doit être invité ; quiconque, sous prétexte de nous aider, nous apporte des brochures semblables, doit être démasqué et écarté !

Et ce tri devient plus facile ici, devant le congrès du parti. On élit ici au présidium ceux qui représentent le groupe malade, et à présent ils n'oseront plus se plaindre, pleurnicher, ces «pauvres petits », ces «offensés», ces « exilés»... Montez tout de suite à la tribune, et prenez la peine de répondre ! Vous avez parlé plus que quiconque... Voyons à présent ce que vous nous offrez au moment où approche un danger que vous reconnaissez vous-même plus grave que Dénikine ! Que nous offrez-vous? Quelle critique faites-vous? Cet examen doit avoir lieu à présent, et je pense qu'il sera définitif. Cela suffit, on ne peut plus jouer ainsi avec le parti ! Celui qui se présente au congrès avec une pareille brochure se joue du congrès. On ne peut mener un tel jeu à un moment pareil, où des centaines de milliers d'éléments démoralisés détruisent, ruinent l'économie ; on ne peut se comporter ainsi envers le parti, on ne peut agir ainsi. Il faut en prendre conscience, il faut y mettre un terme !

Après ces remarques préliminaires sur les élections au présidium et le caractère de 1'«opposition ouvrière», je voudrais vous signaler la brochure de la camarade Kollontaï. Elle est réellement digne de votre attention ; elle résume le travail effectué par cette opposition pendant plusieurs mois, ou l'activité de sape à laquelle elle s'est livrée. Un camarade, de Samara je crois, a déjà dit ici que j'avais apposé «administrativement» l'étiquette de syndicalisme sur l'«opposition ouvrière». Parler ici de méthodes administratives est on ne peut plus déplacé ; ici également il faut voir pour quelle question une décision administrative s'impose. Le camarade Milonov a voulu lancer un mot terrible, mais son astuce n'est pas très réussie ; j'appose soi-disant une étiquette «administrativement». J'ai déjà dit maintes fois que dans les réunions le camarade Chliapnikov et d'autres m'ont reproché de «semer la terreur» avec le mot «syndicalisme». Au cours de je ne sais plus quelle discussion, peut-être bien au congrès des mineurs, j'ai répondu à ce propos au camarade Chliapnikov : « Qui donc voulez-vous duper ?» Nous nous connaissons, le camarade Chliapnikov et moi, depuis de longues années, depuis la clandestinité et l'émigration ; comment peut-il déclarer que je terrorise qui que ce soit quand je définis certaines déviations ! Et que viennent faire ici les «méthodes administratives» lorsque je dis des thèses de 1'«opposition ouvrière» qu'elles sont erronées, qu'elles sont syndicalistes ? Pourquoi la camarade Kollontaï écrit-elle que je lance à la légère le mot «syndicalisme» ? Ceux qui tiennent ces propos devraient un peu les prouver. Je suis prêt à admettre que ma démonstration est fausse et que l'affirmation de la camarade Kollontaï est plus fondée, je suis prêt à le croire. Seulement, il me faut au moins une petite preuve, non pas des propos sur la volonté de terroriser ou d'administrer (en effet, de par mes fonctions, je suis malheureusement beaucoup appelé à administrer), mais une réponse précise réfutant l'accusation de déviation syndicaliste que j'ai adressée à l'«opposition ouvrière».

Cette accusation, je l'ai lancée devant tout le parti, en prenant mes responsabilités, elle figure dans une brochure à 250000 exemplaires. Tout le monde l'a lue. De toute évidence, tous les camarades se sont préparés à ce congrès et tous doivent savoir que la déviation syndicaliste est une déviation anarchiste et que l'«opposition ouvrière» qui se retranche derrière le dos du prolétariat, est un mouvement petit-bourgeois, anarchiste.

Que ce mouvement pénètre dans les larges masses, on le voit bien, et le congrès du parti l'a mis en évidence. Que ce mouvement soit en train de se propager, les brochures de la camarade Kollontaï et les thèses du camarade Chliapnikov le prouvent. Et ici on ne saurait se tirer d'affaire comme le fait constamment le camarade Chliapnikov, en invoquant son caractère authentiquement prolétarien.

Voici comment la camarade Kollontaï commence sa brochure. A la première page nous lisons : «L'opposition comprend la fraction avancée des prolétaires organisés dans un esprit de classe, les communistes.» Au Congrès des mineurs, un délégué de Sibérie a dit qu'on y soulevait les mêmes questions qu'à Moscou, et voici ce que la camarade Kollontaï en dit dans sa brochure :

«Nous ignorions totalement qu'il y ait à Moscou des divergences et des discussions sur le rôle des syndicats», a dit le délégué de la Sibérie au Congrès des mineurs, «mais nous étions préoccupés par les mêmes questions que celles qui se posent à vous.»

Et ensuite :

«Derrière l'opposition ouvrière, il y a les masses prolétariennes ou plus exactement : l'opposition ouvrière est la partie de notre prolétariat industriel soudée en classe, animée de la conscience de classe, de la fermeté de classe. »

Dieu soit loué, nous savons maintenant que les camarades Kollontaï et Chliapnikov sont « soudés en classe et animés de la conscience de classe ». Seulement, camarades, quand on parle et quand on écrit de la sorte, il faut tout de même avoir un peu le sens de la mesure ! A la page 25 de cette brochure, la camarade Kollontaï écrit, et c'est là un des points capitaux des thèses de l'«opposition ouvrière» :

«L'organisation de la gestion de l'économie nationale appartient au congrès des producteurs de Russie, groupés en syndicats de production qui élisent un organisme central dirigeant l'ensemble de l'économie nationale de la République. »

C'est la thèse de l'«opposition ouvrière» que j'ai toujours citée dans la discussion et dans la presse. Je dois dire qu'après l'avoir lue, je n'ai pas eu besoin de lire les autres, c'eût été perdre mon temps, car après cette thèse, il est évident que tout a été dit, qu'il s'agit d'un mouvement petit-bourgeois, anarchiste, et à présent, à la lumière des événements de Cronstadt, il est d'autant plus étrange d'entendre cette thèse.

J'ai signalé cet été au IIe Congrès de l'Internationale Communiste la portée de la résolution sur le rôle du parti communiste. Cette résolution unit les ouvriers communistes, les partis communistes du monde entier. Elle explique tout. Est-ce à dire nous séparons le parti de l'ensemble de la classe ouvrière qui exerce délibérément la dictature du prolétariat ? C'est l'avis de certains membres «de la gauche» et de nombreux syndicalistes. C'est actuellement une conception fort répandue en tous lieux. C'est un fruit de l'idéologie petite-bourgeoise. Ces thèses de l'«opposition ouvrière» rompent en visière à la résolution du IIe Congrès de l'Internationale Communiste sur le rôle du parti communiste et l'exercice de la dictature du prolétariat. C'est du syndicalisme, car il est évident, à la réflexion, que notre prolétariat est déclassé dans sa majeure partie, que les crises inouïes, la fermeture des fabriques ont fait que les gens ont fui à cause de la famine, les ouvriers ont tout simplement abandonné les fabriques, ont dû s'établir dans les campagnes et ont cessé d'être des ouvriers. Ne le savons-nous pas, ne voyons-nous pas que les crises sans précédent, la guerre civile, l'interruption des rapports normaux entre la ville et la campagne, l'arrêt des arrivages de blé ont amené l'échange de petits articles quelconques fabriqués par de grandes usines, des briquets, par exemple, contre du blé puisque les ouvriers ont faim et que le blé n'est pas livré ? Ne l'avons-nous pas constaté en Ukraine, ne l'avons-nous pas vu en Russie? Tout cela engendre, sur le plan économique, le déclassement du prolétariat, ce qui provoque inévitablement les tendances petites-bourgeoises anarchistes, les force à se manifester.

Après avoir subi tous ces maux, après avoir vu tout cela dans la pratique, nous savons combien il est terriblement difficile de les combattre. Après deux années et demie de pouvoir soviétique, nous avons déclaré à la face du monde dans l'Internationale Communiste que la dictature du prolétariat est impossible sans l'intermédiaire du Parti communiste. Les anarchistes et les syndicalistes nous ont, à ce moment-là, agonis d'injures, en disant : «Vous voyez ce qu'ils pensent : le parti communiste est indispensable pour exercer la dictature du prolétariat [5]. » Mais nous l'avions déclaré devant toute l'Internationale Communiste. Et après cela, des gens «animés de la conscience de classe et soudés en classe » viennent nous trouver pour nous dire que «l'organisation de la gestion de l'économie nationale appartient au congrès des producteurs de Russie » (cf. la brochure de la camarade Kollontaï). «Congrès des producteurs de Russie», qu'est-ce que cela signifie ? Allons-nous encore perdre notre temps avec des oppositions semblables dans le parti ? Il me semble qu'il est temps d'en finir avec ces discussions ! Tous ces propos sur la liberté de parole et la liberté de critique, qui émaillent toute la brochure et transparaissent dans tous les discours de l'«opposition ouvrière», constituent les neuf dixièmes de la substance de discours vides de substance ; autant de paroles de la même espèce. Car il faut, camarades, parler non seulement des mots, mais de leur contenu. Nous ne serons pas dupes de mots comme «liberté de critique». Lorsqu'on a dit que des symptômes de maladie se manifestaient dans le parti, nous avons déclaré que cette indication méritait une triple attention : sans aucun doute la maladie existe. Aidez-nous à la guérir. Dites-nous comment vous pouvez la traiter. Nous avons passé pas mal de temps à discuter et je dois dire que, maintenant, il vaut beaucoup mieux «discuter avec les fusils» qu'avec les thèses préconisées par l'opposition. Il ne faut plus d'opposition, camarades, ce n'est pas le moment ! Ou bien par ici, ou bien par là, avec un fusil et pas avec l'opposition. Cela découle de la situation objective, ne vous en prenez à personne. Camarades, nous n'avons pas besoin d'opposition à présent ! Et je crois que le congrès devra arriver à cette conclusion, il devra conclure que l'opposition à présent est finie et bien finie, nous en avons assez des oppositions! (Applaudissements.)

Ce groupe avait depuis longtemps la liberté de critique. Et aujourd'hui, au congrès du parti, nous demandons : quels sont les résultats, quel est le contenu de votre critique, qu'avez-vous appris au parti avec votre critique? Nous sommes prêts à faire participer au travail ceux d'entre vous qui sont près des masses, des masses réellement soudées en classe, ayant réellement une maturité de classe. Et si le camarade Ossinski y voit de la politicaillerie, il sera le seul, les autres y verront une aide utile aux membres du parti. Nous devons réellement aider ceux qui vivent vraiment au sein de la masse ouvrière, qui la connaissent de près, qui ont de l'expérience et peuvent fournir des indications au Comité central. Qu'ils se donnent le nom qui leur plaît, peu importe, à condition qu'ils nous aident, qu'ils ne jouent pas à l'opposition, ne défendent pas à tout prix les groupes et fractions, mais nous aident. Si, au contraire, ils persistent à jouer à l'opposition, le parti devra les exclure.

Et lorsqu'à la même page de sa brochure, la camarade Kollontaï écrit en caractères gras que nous éprouvons de la «méfiance à l'égard de la classe ouvrière », elle sous-entend par là qu'ils sont, eux, la véritable opposition «ouvrière». A la page 36 de cette brochure, cette idée est exprimée avec plus de netteté encore :

«L'opposition ouvrière» ne doit pas et ne peut pas faire de concessions. Cela ne signifie pas inciter à la scission...» ! Non, sa tâche est autre. Même en cas de défaite au congrès, elle restera à l'intérieur du parti et défendra pas à pas, fermement, son point de vue, en sauvant le parti et en redressant sa ligne. »

« Même en cas de défaite au congrès », ça au moins, c'est de la prévoyance ! (Rires.) Je m'en excuse, mais je me permettrai de déclarer, pour ma part, avec assurance que le congrès ne tolérera pas cela! (Applaudissements.) N'importe qui a le droit de redresser la ligne du parti. Toutes les possibilités vous ont été offertes.

Le congrès a posé une condition demandant qu'il n'y ait pas la moindre raison de nous accuser de vouloir exclure qui que ce soit. Nous saluons tout concours dans l'application de la démocratie. Mais on ne saurait l'appliquer au moyen des phrases quand le peuple est exténué. Tous ceux qui veulent aider doivent être les bienvenus ; quant à ceux qui disent qu'ils ne feront pas de concessions et sauveront le parti tout en y restant, nous ripostons : oui, mais à condition qu'on vous y laisse! (Applaudissements.)

En cette matière, nous n'avons pas le droit de tolérer la moindre équivoque. Nous avons incontestablement besoin d'aide pour lutter contre la bureaucratie, pour défendre la démocratie, pour resserrer nos liens avec les masses réellement ouvrières. Dans cet ordre d'idées, nous pouvons et nous devons faire des «concessions». Ils auront beau répéter qu'ils n'acceptent pas les concessions, nous, nous disons : nous les acceptons. Ce ne sont pas du tout des concessions, c'est une aide au parti ouvrier. Ainsi, tout ce qu'il y a de sain et de prolétarien dans 1'«opposition ouvrière» rejoindra le parti ; les auteurs des discours syndicalistes, les gens «animés de la conscience de classe », eux, resteront en dehors. (Applaudissements.) Cette voie a été suivie à Moscou. En novembre, la conférence de la province de Moscou s'est terminée dans deux locaux : les uns par ici, les autres par là. C'est la veille de la scission. La dernière conférence de Moscou a dit : « Nous prendrons dans l'opposition ouvrière ceux que nous voulons et non ceux qu'ils veulent », parce qu'il nous faut le concours de ceux qui sont liés aux masses ouvrières, qui nous apprendront pratiquement à combattre la bureaucratie. C'est une tâche difficile. Je crois que le congrès devra tenir compte de l'expérience de Moscou et procéder à l'examen, non seulement de ce point, mais de toutes les questions à l'ordre du jour. Finalement, à ceux qui disent qu'ils «n'acceptent pas les concessions », le congrès devra répliquer : «Le parti, lui, accepte des concessions», il faut que le travail soit concerté. Grâce à cette politique, nous séparerons les éléments sains des éléments malsains de l'«opposition ouvrière» et le parti s'en trouvera renforcé.

On a dit ici que la production doit être gérée par le «congrès des producteurs de Russie». J'ai du mal à trouver les mots pour qualifier cette ineptie, mais je me console à l'idée que tous les cadres du parti ici présents sont en même temps des cadres des institutions soviétiques qui accomplissent un travail révolutionnaire depuis un, deux ou trois ans. Il est superflu de critiquer cela devant eux. Si en entendant des discours semblables, ils arrêtent les débats, c'est parce qu'il est fastidieux, peu sérieux, de parler d'un «congrès des producteurs de Russie» appelé à gérer l'économie nationale. Cela pourrait peut-être être proposé dans un pays où, après la prise du pouvoir politique, le travail n'aurait pas été amorcé du tout. Mais ce n'est pas notre cas. Il est curieux de trouver à la page 33 de cette brochure le passage suivant :

«L'opposition ouvrière» n'est pas ignorante au point de ne pas tenir compte du grand rôle de la technique et des cadres techniques bien dressés »... « Elle ne songe pas à fonder ses propres organismes de gestion de l'économie nationale, élus au congrès des producteurs, puis à dissoudre les conseils de l'économie nationale, les comités généraux, les centres. Non, ses intentions sont différentes : elle se propose de se subordonner ces centres de gestion précieux sur le plan technique, de leur assigner des tâches théoriques, de les utiliser comme les fabricants et patrons d'usines utilisaient autrefois les spécialistes et techniciens. »

Donc, la camarade Kollontaï et le camarade Chliapnikov, et autres gens «soudés en classe» qui les suivent placent sous leur indispensable direction les Conseils de l'économie nationale, les comités généraux et les centres, tous les Rykov, Noguine et autres «quantités négligeables » auxquels ils assigneront des tâches théoriques ! Voyons, camarades, peut-on prendre tout cela au sérieux ? Si vous aviez des «tâches théoriques» quelconques, pourquoi ne les avoir pas indiquées ? Pourquoi avons-nous proclamé la liberté de discussion? Nous ne l'avons pas fait pour échanger simplement des paroles. Pendant la guerre, nous disions : «Ce n'est pas le moment de critiquer, Wrangel nous guette, si nous faisons une faute, nous la réparons en battant Wrangel. » La guerre finie, on commence à crier : « Donnez-nous la liberté de discussion.» Lorsque nous demandons : «Dites-nous quelles ont été nos erreurs?» On nous répond : « Il ne faut pas dissoudre les Conseils de l'économie nationale et les comités généraux, mais leur assigner des tâches théoriques.» Pourquoi le camarade Kissélev qui, au congrès des mineurs où il représentait l'«opposition ouvrière» «soudée en classe », a obtenu une minorité insignifiante, pourquoi, quand il était directeur du Comité général du Textile, ne nous a-t- il pas appris à combattre la bureaucratie ? Pourquoi le camarade Chliapnikov, lorsqu'il était Commissaire du Peuple, pourquoi la camarade Kollontaï lorsqu'elle était, elle aussi, Commissaire du Peuple, ne nous ont-ils pas appris à combattre la bureaucratie? Nous savons bien que nous sommes entachés de bureaucratie ; nous qui avons affaire de très près à cet appareil bureaucratique, nous en souffrons. Nous signons un papier, mais quel en sera le résultat? Comment le contrôler avec un appareil bureaucratique aussi énorme ? Vous savez comment le réduire, je vous en prie, chers camarades, faites-nous part de votre savoir ! Vous avez envie de discuter, mais à part des déclarations générales vous ne donnez rien du tout. Vous vous livrez, au lieu de cela, à de la démagogie pure. Vous dites : «Les spécialistes briment les ouvriers, les ouvriers mènent une vie de forçat dans la république du travail.» C'est de la démagogie pure !

Lisez tous cette brochure, camarades, je vous y engage très vivement ! Il n'est pas de meilleur document contre l'« opposition ouvrière» que la brochure L'Opposition ouvrière de la camarade Kollontaï. Vous verrez que l'on ne peut vraiment pas aborder la question de la sorte. Que la bureaucratie soit un problème névralgique, nous le reconnaissons tous, cela figure même dans notre programme. Il est très aisé de critiquer les comités généraux et les Conseils de l'économie nationale, mais lorsque vous le faites ainsi, les masses d'ouvriers sans-parti comprennent qu'il faut les dissoudre ! Les socialistes-révolutionnaires saisissent l'occasion au vol. Des camarades ukrainiens m'ont dit qu'au cours de leur conférence [6], les socialistes-révolutionnaires de gauche ont formulé des propositions absolument identiques. Or, quelles sont les résolutions de Cronstadt ? Vous ne les avez pas toutes lues? Nous vous les montrerons : elles disent la même chose. Si j'ai souligné le danger de Cronstadt, c'est qu'on n'y revendique, semble-t-il, qu'un tout petit décalage : «Que les bolcheviks partent », «nous amenderons légèrement le pouvoir», voilà ce qu'on veut à Cronstadt. Le résultat, c'est que Savinkov est arrivé à Revel, que les journaux parisiens ont parlé de l'événement deux semaines à l'avance et qu'un général blanc a fait son apparition. Voilà ce qui est arrivé. C'est ainsi que se sont déroulées toutes les révolutions. Voilà pourquoi nous disons : puisque nous en sommes là, nous devons resserrer nos rangs pour répondre, le fusil à la main, à cette chose, si innocente paraisse-t-elle comme je l'ai dit dans mon premier discours. A cela, l'«opposition ouvrière» ne répond rien, elle dit : « Nous ne dissoudrons pas les conseils de l'économie nationale, nous les «soumettrons à notre direction. » «Le congrès des producteurs de Russie» subordonnera à sa direction les 71 comités généraux du Conseil de l'économie nationale ! Je demande: est-ce qu'ils plaisantent? Peut-on prendre au sérieux ces gens-là? C'est bien l'élément petit-bourgeois, anarchiste, non seulement dans la masse ouvrière, mais au sein même de notre parti, ce que nous ne pouvons en aucun cas tolérer. Nous nous sommes permis un luxe, celui de les laisser exposer leur avis dans tous les détails, nous les avons écoutés plusieurs fois. Dans ma discussion au IIe Congrès des mineurs, avec les camarades Trotski et Kissélev, deux points de vue se manifestaient avec netteté. L'«opposition ouvrière» disait : « Lénine et Trotski vont s'unir ». Trotski a pris la parole pour déclarer : «Ceux qui ne comprennent pas qu'il faut s'unir sont contre le parti ; bien entendu, nous allons nous unir parce que nous sommes des membres du parti. » Je l'ai soutenu. Certes, des divergences nous séparaient, mais lorsqu'il se forme au Comité central des groupes plus ou moins égaux, c'est le parti qui juge et il juge de manière à nous unir conformément à sa volonté et à ses indications. C'est ce que nous avions l'intention de déclarer, le camarade Trotski et moi, au congrès des mineurs, alors qu'ici, l'«opposition ouvrière » dit: « Nous ne ferons pas de concessions, mais nous resterons au parti.» Eh bien, non, ça ne marchera pas ! (Applaudissements.) Je le répète, pour combattre la bureaucratie, l'aide de tous les ouvriers, quel que soit le nom qu'ils se donnent, pourvu qu'ils veuillent sincèrement nous aider, est archi-souhaitable. Dans cet ordre d'idées, nous accorderons des «concessions» (en mettant ce terme entre guillemets) malgré toutes les déclarations provocantes, nous y consentirons parce que nous savons à quel point le travail est dur. Nous ne pouvons dissoudre ni les comités généraux ni les Conseils de l'économie nationale. Lorsqu'on nous approche de manquer de confiance en la classe ouvrière, de ne pas laisser les ouvriers accéder aux organismes de direction, ce ne sont là que des mensonges. Nous cherchons et nous sommes heureux de prendre tout administrateur quelque peu compétent issu de la classe ouvrière ; nous le mettons à l'épreuve. Car si le parti ne fait pas confiance à la classe ouvrière, ne laisse pas les ouvriers accéder à de hautes fonctions, à bas ce parti; dites tout ce que vous avez sur le cœur ! J'ai indiqué que c'est un mensonge, que la pénurie de forces nous épuise, que nous accueillons, les bras ouverts, la moindre aide, de toute personne quelque peu compétente, et quand c'est un ouvrier, avec trois fois plus d'empressement. Mais nous n'en avons pas. C'est ce qui donne naissance à l'anarchie. Nous devons lutter contre la bureaucratie, il nous faut des centaines de milliers auxiliaires.

Le problème de la lutte contre la bureaucratie s'est posé dans notre programme comme un travail de longue haleine. Plus la paysannerie est morcelée plus la bureaucratie est inévitable au sommet.

Il est facile d'écrire : « Il y a quelque chose qui ne va pas dans notre parti. » Vous comprenez vous-mêmes ce que signifie d'affaiblir l'appareil soviétique lorsque deux millions d'émigrés russes sont à l'étranger. Ils ont été chassés par la guerre civile. Ils nous ont fait le plaisir de siéger à présent à Berlin, Paris, Londres et dans toutes les capitales, excepté la nôtre. Ils soutiennent ce même élément qu'on appelle le petit producteur, l'élément petit-bourgeois.

Nous ferons tout ce qui sera en notre pouvoir pour extirper la bureaucratie en promouvant les ouvriers de la base, nous tiendrons compte de toute indication pratique dans ce sens. Même si l'on appliquait à cela le terme impropre de «concessions » dont on se sert ici, il est certain que 99% du congrès dira en dépit de cette brochure : « Nous ferons des «concessions » malgré tout et nous gagnerons au parti tous les éléments sains ! » Allez avec les ouvriers et apprenez-nous à combattre la bureaucratie si vous le savez mieux que nous, mais n'intervenez pas comme l'a fait Chliapnikov. C'est une chose que l'on ne saurait éluder. Je ne parle pas de la partie théorique de son discours, parce que Kollontaï a dit la même chose. Je parlerai des faits qu'il a cités. Il a affirmé qu'on laisse pourrir les pommes de terre, et a demandé pourquoi on ne traduit pas Tsiouroupa en justice. Et moi je demande: pourquoi ne traduit-on pas en justice Chliapnikov pour de pareilles interventions ? Parlons-nous sérieusement de discipline et d'unité dans un parti organisé, ou bien sommes-nous à une réunion du genre de Cronstadt ? Car c'est une phrase à la Cronstadt, d'esprit anarchiste, à laquelle on répond par le fusil. Nous sommes des membres organisés du parti, nous sommes venus ici pour corriger nos erreurs. Si d'après le camarade Chliapnikov, il faut traduire Tsiouroupa en justice, pourquoi Chliapnikov en tant que membre organisé du parti, n'a-t-il pas porté plainte à la Commission de contrôle ? Quand nous avons fondé la Commission de contrôle, nous avons dit : le C.C. est submergé par le travail administratif, élisons des hommes jouissant de la confiance des ouvriers qui ne seront pas aussi surchargés de travail administratif et qui, examineront les plaintes au nom du C.C. Cela permettait de développer la critique et de corriger les erreurs. Pourquoi donc, si Tsiouroupa a agi aussi irrégulièrement, ne pas en avoir référé à la Commission de contrôle? Or, Chliapnikov vient ici, au congrès, devant l'assemblée la plus responsable du parti et de la république lancer l'accusation qu'on a laissé pourrir les pommes de terre et demander pourquoi Tsiouroupa n'a pas été traduit en justice. Et moi je vous demande, n'y a-t-il jamais d'erreurs au département de la Guerre, de batailles perdues, de convois et de matériel abandonnés ? Il faudrait alors traduire en justice ces travailleurs militaires? Le camarade Chliapnikov lance ici des mots auxquels il ne croit pas lui-même, des mots qu'il ne peut justifier. Les pommes de terre pourrissent dans notre pays. Bien sûr, il y aura une foule d'erreurs, notre appareil n'est pas au point, nos transports non plus . Mais si, au lieu de corriger les erreurs, on lance à la légère de pareilles accusations et de plus, comme l'ont déjà fait observer ici plusieurs camarades, avec une joie mauvaise, si on demande pourquoi Tsiouroupa n'a pas été traduit en justice, alors qu'on nous traduise en justice nous, le Comité central. Nous considérons qu'une pareille intervention est de la démagogie. Il faut traduire en justice soit Tsiouroupa et nous, soit Chliapnikov, mais on ne peut pas travailler ainsi. Lorsque des camarades du parti parlent comme Chliapnikov l'a fait ici, et il en fait toujours autant dans les autres réunions, et même si la brochure de la camarade Kollontaï ne cite pas de noms, toute la brochure est dans le même esprit, nous disons : on ne peut travailler ainsi, car c'est de la démagogie sur laquelle se fondent les éléments anarchistes de Makhno et de Cronstadt. Nous sommes tous deux membres du parti, nous nous présentons tous deux ici devant l'instance suprême, et si Tsiouroupa s'est rendu coupable d'une action illégale et si nous, le Comité central, nous le couvrons, alors vous n'avez qu'à produire une accusation précise, mais ne jetez pas des paroles qui seront répétées demain, à Moscou, et de bouche à oreille, parviendront immédiatement à la bourgeoisie ; demain, toutes les commères des institutions soviétiques vont répéter vos paroles avec une joie mauvaise, les poings sur les hanches. Si Tsiouroupa est tel que le décrit Chliapnikov, si, comme il l'exige, il faut le traduire en justice, j'affirme qu'il faut réfléchir sérieusement à ces paroles ; des accusations pareilles ne se lancent pas à la légère. Ceux qui produisent de telles accusations sont éliminés du parti, ou bien on leur dira : nous t'envoyons aux pommes de terre, dans telle province ; on verra s'il y aura moins de pommes de terre pourries que dans celles que Tsiouroupa a administrées.


Notes

Les notes rajoutées par l’éditeur sont signalées par [N.E.]

[1] Voir Rapport d'activité politique du comité central. [N.E.]

[2] Voir Rapport d'activité politique du comité central. [N.E.].

[3] La Conférence de la province de Moscou du P.C.(b)R. eut lieu du 20 au 22 novembre 1920, à Kremlin.

Les travaux de la conférence se déroulèrent dans une situation très tendue à cause des groupuscules oppositionnels qui se dressaient contre la ligne suivie par le parti. S'efforçant de faire entrer au Comité de Moscou du parti le plus grand nombre possible d'amis politiques, l'«opposition ouvrière» organisa une conférence spéciale de délégués ouvriers dans la salle Mitrophanievski du Grand Palais du Kremlin, l'opposant au reste des délégués qui siégeaient dans la salle Sverdlov. [N.E.]

[4] Il s'agit de la IXe Conférence de Russie du P.C.(b)R. qui se tint du 22 au 25 septembre 1920 à Moscou. [N.E.]

[5] Lénine fait allusion aux interventions d'Angel Pestaña, représentant de la «Confédération nationale du Travail d'Espagne», et de Jack Tanner, représentant de l'organisation ouvrière anglaise « Shop Stewards Committees », à la séance du 23 juillet 1920 du IIe Congrès de l'Internationale Communiste. [N.E.]

[6] Allusion à la Conférence de sans-parti sur le ravitaillement qui se tint les 5 et 6 mars 1921 à Kharkov. Les s.-r. de gauche et les mencheviks qui y prirent la parole critiquèrent violemment les activités des organismes économiques et de ravitaillement. Mais la Conférence ne soutint pas leur résolution. [N.E.]


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