1848-49

Marx et Engels journalistes au coeur de la révolution...

Une publication effectuée en collaboration avec la bibliothèque de sciences sociales de l'Université de Québec.


La Nouvelle Gazette Rhénane

K. Marx

Le procès du refus des impôts

n°218, 10 février 1849


Cologne, le 9 février.

Si dans le procès d'avant-hier, la décision des jurés a été importante pour la presse, l'acquittement hier de Marx, Schneider et Schapper a été décisif pour les procès intentés par les tribunaux rhénans au sujet du refus des impôts. Le fait lui-même était extrêmement simple et ne supportait aucun doute. Dans le document incriminé, on lisait [1] :

« Le comité démocratique de Rhénanie appelle toutes les Assemblées de la province rhénane à tout mettre en œuvre pour que les mesures suivantes soient prises et exécutées :
1) Après que l'Assemblée nationale prussienne elle-même ait décidé le refus des impôts, il faut repousser partout et de toutes les manières leur recouvrement par la force.
2) Il faut organiser partout la réserve de l'armée territoriale pour repousser l'ennemi ...
3) Il faut partout sommer les autorités de déclarer publiquement si elles reconnaissent les résolutions de l'Assemblée nationale et veulent les appliquer. En cas de refus, il faut nommer des comités de salut public . Il faut renouveler, au moyen d'élections populaires générales, les conseils municipaux qui s'opposeraient à l'Assemblée législative. »

Ce document est pourtant assez compréhensible. Indépendamment de la recevabilité ou de l'irrecevabilité du décret de refus des impôts, on avait affaire manifestement au cas d'incitation à l'émeute et à la guerre civile. Les accusés n'ont pas caché non plus que par « ennemis » (paragraphe 2) il fallait comprendre l'ennemi intérieur, la force armée du gouvernement. Néanmoins les autorités, désespérant d'obtenir une condamnation en application de cet article du Code, avaient choisi une accusation moins sévère : celle d'incitation à la rébellion et à la résistance envers des agents de la force publique (articles 209 et suivants).

Il s'agissait donc de savoir si le décret de refus des impôts pris par l'Assemblée autorisait à appeler de cette façon à résister à la force publique, à organiser une force armée contre celle de l'État et de leur propre chef à déposer et mettre en place les autorités.

Après une très courte délibération les jurés ont répondu affirmativement à cette question.

Après cette décision, Lassalle et Cantador ne tarderont sans doute pas à être remis bientôt en liberté. On ne peut pas attendre de la Chambre des mises en accusation de Cologne qu'elle émette à leur sujet un avis différent de celui des jurés concernant Marx, Schneider et Schapper.

Demain, nous reviendrons spécialement sur Lassalle. On semble avoir la louable intention de différer son affaire jusqu'aux prochaines Assises (en mars) pour lui octroyer ainsi trois nouveaux mois de détention préventive. Nous espérons que le verdict du jury de Cologne déjouera ces plans si philanthropiques. Nous donnerons demain quelques détails agréables sur la façon dont Lassalle est traité à la prison de Dusseldorf.


Notes

[1] Voir article n° 147 du 19 novembre 1848.


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