1848-49

Marx et Engels journalistes au coeur de la révolution...

Une publication effectuée en collaboration avec la bibliothèque de sciences sociales de l'Université de Québec.


La Nouvelle Gazette Rhénane

K. Marx - F. Engels

Le procès politique

n°218, 10 février 1849


De Weimar, le 3 février.

À cette date le Frankfurter Journal a reçu les lignes suivantes :

« Les jours approchent où notre première Cour d'Assises doit prononcer sa sentence sur les instructions politiques en cours. Après avoir été remis de semaine en semaine, le début des débats doit, à ce qu'on dit, être fixé définitivement au 15 courant. Les séances seront ouvertes en même temps que le procès contre les chefs du parti démocratique, arrêtés, ici et à Iéna, au mois d'octobre dernier : le docteur Lafaurie, le candidat Rothe, l'étudiant Amelung, le docteur Otto et l'homme de lettres Jäde. Ce sont presque les seuls de tous les détenus arrêtés en masse à ce moment-là, contre qui le procureur général ait pu somme toute trouver matière à accusation. L'enquête contre l'écrivain Deinhard, arrêté à cette époque, a si peu rendu qu'après deux mois de détention dans les cachots insalubres de notre tribunal criminel, le procureur général n'a même pas pu établir la moindre accusation contre Deinhard. L'aspirant Lange, lui, arrêté en même temps, a eu quatre hémorragies à la prison de Weimar et fut ramené à moitié mort à Iéna chez ses parents où il ne tarda pas à mourir le 7 janvier de cette année, après avoir subi quatre interrogatoires successifs en trois jours par le tribunal criminel. Nos jurés ne manqueront pas de s'étonner si, au cours des débats, au lieu de prétendus plans de trahison dont on a tant parlé et débattu, on leur soumet de simples vétilles, servant à alimenter les accusations formulées à l'encontre des terroristes cités plus haut. »

(Espérons qu'après sa prochaine victoire le peuple ne sera pas aussi naïf et oublieux qu'en mars pour laisser en fonction tous ses bourreaux. On peut supposer presque à coup sûr qu'il se hâtera au contraire d'envoyer pendant six mois afin d'enquête dans des prisons de Pennsylvanie [1] toute la bande de fonctionnaires réactionnaires et à leur tête, ces légalistes hypocrites assoiffés de sang appelés aussi juges, et que pour achever de les désintoxiquer, il les utilisera à la construction de chemins de fer et de routes.)


Notes

[1] Prisons de Pennsylvanie : système pénitentiaire où chaque détenu était isolé dans une cellule. La première prison de ce type fut érigée en 1791 à Philadelphie dans l'État de Pennsylvanie aux États-Unis. Au XIX° siècle, ce système se répandit largement en Europe; en Allemagne, la célèbre prison de Moabit, construite de 1842 à 1849 à Berlin, et une série d'autres prisons, étaient organisées sur ce modèle.


Début Précédent Haut de la page Sommaire Suite Fin