1932

Edition établie d'après les documents laissés par le regretté Pierre Broué, résultats de travaux à la Houghton Library, pour les "Oeuvres" de Léon Trotsky en français.

Trotsky

Léon Trotsky

Lettre à un camarade allemand

le 1er novembre 1932

Buyukada, le 1er novembre 1932

Cher camarade,

Merci beaucoup pour votre lettre détaillée et très intéressante du 24 septembre. Je vous ai envoyé pour la "Permanente Révolution" un article sur le bonapartisme allemand, et j'aimerais beaucoup qu'il paraisse dans le prochain numéro. J'ai eu l'impression que la "Permanente Révolution" doutait un peu de la justesse de cette caractérisation. En tous cas, elle n'a pas assez développé ce thème. Il me semble pourtant que notre position sur cette question est très favorable et qu'elle aura pour nous des effets politiques bénéfiques, pour peu que nous la développions dans toutes les directions. Vous aurez plus de détails à la lecture de l'article lui-même.

Si l'Allemagne ne connaît pas, dans les semaines qui viennent, un dénouement grave, c'est-à-dire si la crise, en quelque sorte, se "stabilise", alors il est probable que le centre de gravité se déplacera vers l'Union soviétique. Vous avez, bien sur, une information suffisante concernant les faits. J'espère que ma brochure russe paraîtra bientôt en allemand.

La stimulation du mouvement d'Opposition de Gauche en U.R.S.S. exercera sous peu, du moins je l'espère, un effet puissant sur l'Opposition de Gauche polonaise et allemande. Aujourd'hui, le plus important est de maintenir à flots la "Permanente Revolution". Je crois que la brochure russe ("L'économie soviétique en danger"), si elle est bien diffusée, peut rapporter un bénéfice considérable. Seulement, il faudrait que tous les camarades fassent preuve d'un peu plus de zèle pour la diffusion. Ce serait un crime terrible de laisser couler le journal.

On m'écrit qu'entre votre profession et votre activité politique vous ne savez plus où donner de la tête. Si la situation se "stabilise" dans l'un ou l'autre sens, peut-être ouvrez-vous la possibilité de venir ici vous reposer quelques semaines. En tous cas, cela me ferait très plaisir.